SPECIAL 20 ANS - L’essor des musées chinois a entretenu ces dernières années la fièvre des commentateurs, quant à leur nombre et à l’originalité de leurs constructions.
Si, au milieu de la décennie 1990, on dénombrait environ un millier d’établissements, en 2002, le Quotidien du peuple annonçait que le pays disposerait de 3 000 musées à la fin de 2015. La prévision a été dépassée, puisque dès l’an dernier plus de 3 500 étaient recensés, dont plus de 500 institutions de statut privé, avec une fréquentation annuelle de 160 millions de visiteurs. Autant dire que dans les dernières années, ainsi en 2011, a été inauguré plus d’un musée par jour – abritant il est vrai des collections très éclectiques, sinon pas de collections du tout. Par comparaison, la croissance américaine des musées, qui a connu un sommet de la mi-1990 à la fin de la décennie 2000, n’a été que de 20 à 40 nouveaux musées par an. Mais le plus étonnant est que l’administration chinoise a pour ambition d’atteindre le chiffre de 40 000 musées – soit le double des musées nord-américains. Dans ces conditions, Jeffrey Johnson, spécialiste des mégapoles chinoises à Columbia University, a pu parler de « museumification » de la Chine – un phénomène qu’il compare volontiers à une bulle spéculative.
Outre le manque ou l’improvisation des collections, le problème des musées chinois est lié à l’absence d’un public connaisseur ou simplement intéressé. L’importance des destructions au cours de la guerre civile de la décennie 1940, puis de la Révolution culturelle, comme les orientations actuelles de l’éducation, ont conduit à négliger l’approche de l’art. L’art occidental est souvent complètement ignoré, même s’il est importé au sein d’expositions spectaculaires. Les échanges entre musées occidentaux et institutions chinoises s’inscrivent encore largement dans des stratégies diplomatiques : l’exposition montée par un groupe de musées allemands (Berlin, Dresde, Munich) et consacrée à l’art des Lumières, présentée en 2011 au Musée national de Chine à Pékin, était largement financée par les Affaires étrangères allemandes, dans le cadre d’un programme pluriannuel, et couronnait la rénovation de ce musée par une firme de Hambourg. Or, si elle a suscité en Allemagne un débat passionné, elle semble n’avoir connu aucun écho, ou presque, sur place. La vérité est sans doute que bâtir en quelques décennies une culture de musée qui a mis deux siècles à s’imposer en Occident n’est pas a priori chose aisée.
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En Chine, un nouveau musée par jour
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°410 du 28 mars 2014, avec le titre suivant : En Chine, un nouveau musée par jour