VERSAILLES
VERSAILLES [13.06.16] - Le ministère de la Culture a annoncé une enquête administrative après les aveux de Bill Pallot et les soupçons pesant sur plusieurs sièges achetés par Versailles. L’expert Guillaume Dillée se retrouve en première ligne.
![Bill Pallot - Copyright photo Benoît Linero / L'Œil](/sites/lejournaldesarts/files/styles/libre_w468/public/2019-08/bill-pallot-portrait-copyright-photo-benoit-linero-l-oeil-2006.jpg?h=d132c8aa&itok=0Uu6IEUb)
La révélation, par Le Journal des Arts, que Bill Pallot, de la galerie Aaron, a reconnu la fabrication d’une paire de fausses chaises, copiées d’une série commandée en 1780 par Marie Antoinette, a consterné le marché de l’art et le milieu des conservateurs.
Contrairement à l’original, conservé à Versailles, cette paire arbore une fausse marque au fer du garde meuble de la reine. Classée trésor national en 2013, elle a été vendue pour deux millions d’euros à un collectionneur de Londres par la galerie Kraemer, qui l’a reprise l’année dernière en remboursant son client. Vendredi soir, après cet aveu, Bill Pallot a été placé en détention -une mesure exceptionnelle. Laurent Kraemer a été remis en liberté sous caution. Tous deux ont été mis en examen, en compagnie d’un doreur, pour escroquerie en bande organisée et éventuel blanchiment.
Laurent Kraemer a proclamé sa bonne foi, en trouvant « honteux de voir le nom de sa famille ramené à celui d’un faussaire ». Bill Pallot de son côté a reconnu qu’un trafic de faux mobilier durait depuis des années sur une vaste échelle à Paris, même s’il n’admet qu’une une participation épisodique « par jeu ».
La ministre de la Culture a tout de suite pris ses distances avec le château de Versailles, en annonçant l’ouverture « sans délai d’une inspection administrative » portant sur l’acquisition de mobilier « entre 2008 et 2012, d’une valeur de 2,7 millions d’euros ». Autrement dit, tous les achats mis en cause par des rumeurs. Dans la foulée, Audrey Azoulay a même annoncé une révision des procédures d’acquisition, sans attendre la conclusion de l’enquête.
« Nous n’avions aucune raison de douter de ces chaises », rappelle Gérard Mabille, qui fut le conservateur du mobilier à Versailles de 2008 à 2014. Se sentant trahi par un spécialiste « qui avait gagné la confiance des conservateurs depuis trente ans », il nous a déclaré que Bill Pallot lui avait montré une des fausses chaises « des années avant qu’elle ne réapparaisse galerie Kraemer ». « Des faux de cette qualité, je n’en avais jamais vus », ajoute-t-il, en soulignant que les acquisitions relèvent d’un « travail d’équipe ». Directrice du château, Béatrix Saule approuve, en faisant observer la difficulté des examens scientifiques et de la datation des bois sur des sièges. « S’il y a eu erreur, elle est collective », enchérit Jean-Jacques Aillagon, qui fut président de Versailles de 2007 à 2011, en soulignant que ces procédures nécessitent l’approbation de trois commissions officielles. L’ancien ministre suggère l’établissement d’un comité d’« experts incontestables » pour examiner les pièces litigieuses et la diffusion de leurs conclusions. Selon ses proches, le grand conservateur du Louvre Daniel Alcouffe, qui a lui-même présenté ces chaises, entre autres, comme une importante découverte, et dont Bill Pallot a été l’élève et le protégé, est « atterré ».
Un autre des amis intimes de Bill Pallot, l’expert Guillaume Dillée se retrouve en première ligne. La galerie Kraemer nous a en effet indiqué lui avoir acheté la paire de fausses chaises « sans se douter qu’elle provenait de Bill Pallot ». Le nom de Guillaume Dillée apparaît dans d’autres transactions, dont l'achat par Versailles en 2011 à Drouot, pour 200 000 €, d’une bergère qu'il a expertisée comme provenant de la sœur cadette de Louis XVI. Contacté à plusieurs reprises à Melbourne, où il vit désormais, il s’est refusé à tout commentaire.
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Le monde de l’art sonné par les aveux de Bill Pallot
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