Le Comité de l’Unesco a généreusement allongé sa Liste du patrimoine immatériel représentatif. Il a également inscrit quatre éléments sur le Registre des bonnes pratiques, auquel il souhaite donner une meilleure visibilité.
Rabat (Maroc). Réuni à Rabat du 28 novembre au 3 décembre, le Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a tenu sa 17e session pour la première fois depuis trois ans en présentiel. 39 nouveaux éléments rejoignent la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, et 4 éléments, la Liste de sauvegarde urgente. Cette cuvée récompense des dossiers bien montés, à l’instar de celui de la France pour les savoir-faire et la culture de la baguette, de l’Algérie pour le raï, du Japon et de ses danses furyu-odori, sans oublier la culture apicole en Slovénie ou l’élevage des chevaux Lipizzan partagé entre huit pays d’Europe – « un dossier de candidature multinational exemplaire » selon l’organe d’évaluation. Les éléments nécessitant l’inscription d’une sauvegarde urgente sont tous des savoir-faire artisanaux (poterie, travail de la pierre, tissage), du Vietnam, du Chili, de l’Albanie ou de la Turquie.
Sont également inscrits sur la Liste 6 éléments qui ne satisfont pas aux critères de la Convention concernant la protection du patrimoine mondial. Malgré une appréciation sévère de la part de l’organe d’évaluation, qui recommandait le renvoi de ces candidatures, les États parties ont décidé de les inscrire. Parmi les insuffisances pointées, des candidatures étaient trop axées sur l’activité touristique (la fête de la Semaine sainte au Guatemala, les festivités associées au voyage de la sainte Famille en Égypte) ; et certaines valorisaient plus un produit que les pratiques sociales qui lui sont liées (le rhum léger à Cuba). D’autres ne pouvaient justifier d’une implication suffisante des communautés associées à ces pratiques et d’un plan de sauvegarde suffisamment détaillé (l’art de la blouse brodée en Roumanie, le spectacle « ortéké » au Kazakhstan, la danse « kaela » en Zambie).
Les candidatures présentées cette année montrent un fort déséquilibre géographique, avec une seule proposition venue d’Afrique subsaharienne et, a contrario, de nombreuses demandes émanant des États européens et d’Asie centrale.
En engageant une réflexion sur l’article 18 de la Convention, cette 17e session fixe par ailleurs l’objectif d’une meilleure visibilité pour la troisième liste portée par le Comité, qui demeure sous-exploitée et méconnue : le Registre des bonnes pratiques. Celui-ci existe depuis 2009 mais ne compte qu’une trentaine d’éléments inscrits. Le Registre recense des expériences réussies de sauvegarde d’un élément du patrimoine immatériel, afin de montrer la voie aux candidatures et éléments inscrits sur les listes. Les critères du registre ont été assouplis afin de recueillir un plus grand nombre de propositions, et l’idée de création d’un observatoire pour partager ces bonnes pratiques a été formalisée à Rabat. Ont été mis à l’honneur sur ce Registre le festival « Tocati » à Vérone, qui fait vivre les jeux traditionnels, ou un programme de professionnalisation des formateurs en tissage au Koweït.
À Rabat, le Comité a également examiné la mise en œuvre de la Convention. Depuis une réforme de 2018, un cycle de rapports visant six régions différentes du monde chaque année est exigé des États. Lancé en Amérique du Sud il y a deux ans, ce suivi des inscriptions portait cette année sur l’Europe. Cette nouvelle méthode porte ses fruits : 95 % des rapports attendus ont été soumis au Comité, contre 16 % en 2016 et 21 % en 2017, soit avant cette réforme qui régionalise la démarche. Les 42 éléments évalués en Europe dressent un tableau plutôt satisfaisant de la sauvegarde du patrimoine immatériel, encadrée par les autorités locales et des ONG.
Enfin, cette session a permis au Comité de suivre l’avancement de 42 dossiers d’assistance internationale soumis au Fonds du patrimoine culturel immatériel. Ces dossiers représentent presque un tiers des projets financés par le fonds depuis sa création en 2008. 9,4 millions de dollars ont ainsi été investis par le fonds dans ces projets, dont la moitié se situent en Afrique. La plupart d’entre eux consistent en un « renforcement des capacités », qui soutient les communautés dans leurs efforts de sauvegarde par la formation, un travail d’inventaire, une aide au développement des stratégies de sauvegarde. Faisant état d’un certains nombres de réussites, le Comité s’est montré satisfait de ce dispositif d’aide, désormais étendu à de nouvelles actions : l’assistance à la préparation d’une candidature à la Liste nécessitant une sauvegarde urgente, et une aide ponctuelle d’un montant de 100 000 euros. Un arsenal étoffé, pour aborder les 30 ans de la Convention sereinement, l’année prochaine, au Botswana (Afrique australe).
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Le Comité du Patrimoine culturel immatériel étoffe ses listes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°601 du 16 décembre 2022, avec le titre suivant : Le Comité du Patrimoine culturel immatériel étoffe ses listes