PARIS
Le musée de la Banque de France veut faire découvrir l’économie au plus grand nombre à travers une scénographie ludique et interactive.
Paris. Un musée de l’économie, piloté par la Banque de France, dans un bâtiment patrimonial. Avec un tel pedigree, on pourrait s’attendre à un lieu très institutionnel et ennuyeux. Il n’en est rien, la nouvelle « Citéco », ou « Cité de l’économie », qui ouvre au public le 14 juin se veut justement très ouverte au public, surtout celui des jeunes. Va-t-elle y parvenir ? Elle s’en donne en tout cas les moyens et penche plus du côté de la Cité des sciences que du Musée de la monnaie. Son directeur, Philippe Gineste, n’est d’ailleurs pas issu de la filière conservation du patrimoine, mais a dirigé des centres de culture scientifique.
La scénographie repose en grande partie sur des installations interactives où l’on joue à plusieurs et qui se présentent comme autant de dispositifs permettant d’appréhender de manière ludique la loi de l’offre et de la demande, le mécanisme des échanges… Citéco n’est donc pas centrée sur la finance, mais couvre toute l’économie, abordée à travers six séquences : les échanges, les acteurs, les marchés, les instabilités, les régulations et les trésors – seule séquence qui ramène à la banque. Des vidéos et panneaux de texte sont présentés – difficile de s’en passer pour une matière abstraite –, mais très peu d’objets anciens ou actuels matérialisent l’économie. La parole est donnée à des économistes, universitaires, syndicalistes, qui expliquent en quelques mots « les effets de la mondialisation sur l’emploi » et « comment limiter les excès sur les marchés financiers ». Tous les sujets sont abordés, y compris les plus sensibles (les inégalités et la redistribution des richesses), et les positions se veulent équilibrées.
« La Banque de France a une mission d’éducation à l’économie », explique Emmanuel Constans, le président délégué de l’association qui gère Citéco, une structure distincte de la banque mais qui reste étroitement liée à l’établissement public. C’est d’ailleurs la banque qui finance la totalité des 97 millions d’euros que coûte le projet en fonctionnement et en investissement, selon un rapport récent de la Cour des comptes.
Un montant important et dont le visiteur pourra mesurer les effets. Tout paraît « costaud ». Le bâtiment a été restauré, désamianté, mis aux normes et restructuré avec soin. Les vingt-six jeux multimédia et les quinze installations interactives (40 000 € par machine) ont été conçus pour résister aux assauts d’une classe de lycéens. « Il ne doit pas y avoir plus de 3 % de panne, sinon les visiteurs sont frustrés », explique Philippe Gineste. Les dispositifs sont parfois si imposants qu’ils en deviennent des objets spectaculaires, tels « le cylindre des turbulences » qui plonge le public dans les crises ou « la salle du conseil » constituée de plusieurs consoles pour un jeu de négociation collective.
Citéco dispose également d’un auditorium et de plusieurs salles qui vont lui permettre d’animer les lieux par le biais de conférences, de soirées, de concerts. L’objectif est d’attirer 130 000 visiteurs dont 30 000 scolaires.
Trois styles distincts
Architecture. La façade homogène du bâtiment principal – aujourd’hui classé – masque trois époques différentes. Cet hôtel particulier du banquier Émile Gaillard (1821-1902) est construit dans le nouveau quartier de la Plaine-Monceau par Jules Février (1842-1937) dans un style néo-Renaissance en vogue dans le dernier tiers du XIXe siècle. Celui-ci avait également fait bâtir deux immeubles de rapport faisant un « U » avec le corps historique. Après plusieurs années de déshérence, l’ensemble est racheté en 1919 par la Banque de France qui y installe jusqu’en 2006 une de ses succursales. Alphonse Defrasse (1860-1960) réaménage les lieux, transforme les pièces d’habitation de Gaillard en bureaux, ouvre un grand hall d’accueil et crée une impressionnante salle des coffres en sous-sol. Au style néo-Renaissance s’ajoute le style Art déco de l’époque. « Gaillard III », réalisée par les Ateliers Lion associés, est moins une nouvelle strate architecturale et décorative qu’une adaptation aux contraintes d’un lieu ouvert au public s’efforçant de conserver le meilleur et l’esprit des époques précédentes. Des volumes et des voies de circulation ont été dégagés permettant de libérer 2 400 m² sur trois niveaux pour le parcours permanent, d’aménager le toit-terrasse pour des réceptions et de créer un espace de 430 m² pour des expositions temporaires. « Gaillard III », c’est aussi un matériel scénographique très présent (c’est ce qui est montré aux visiteurs alors que, dans un musée d’art, la scénographie est au service des œuvres). Un matériel très « XXIe siècle » dont le contraste avec le décor Renaissance n’est pas la moindre des singularités du lieu.
Jean-Christophe Castelain
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Citéco, une Cité des sciences pour l’économie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°525 du 7 juin 2019, avec le titre suivant : Citéco, une Cité des sciences pour l’économie