MONDE
Alors que la Russie envoie ses troupes dans le Donbass, la diplomatie d’influence tend à s’exercer partout, sans états d’âme.
Diplomatie d’influence. Qui s’intéresse à la géopolitique trouvera passionnante la lecture de la « Feuille de route de l’influence de la diplomatie française » publiée en décembre dernier par le Quai d’Orsay. Ce texte constitue, selon ses auteurs, la première doctrine consolidée en la matière. Il prend acte d’un monde brutal où la diplomatie d’influence est utilisée par certains États comme une forme de continuité de la guerre. De sorte que le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères et surtout Emmanuel Macron (on sent bien la patte du président dans cette doctrine) sont décidés « à être beaucoup plus offensifs en assumant ce que l’on est ».
Le monde de la culture relèvera avec amertume son déclin relatif dans la palette des outils d’influence. Ne nous méprenons pas, la culture a toute sa place dans le soft power et cela est rappelé à plusieurs reprises, mais elle n’est plus la seule, comme dans le passé, à « créer le désir de France ». La diplomatie d’influence s’exerce maintenant presque partout : à travers la promotion de la langue, de nos établissements scolaires à l’étranger, de nos industries créatives, des médias, du sport…
Cela ne doit pas conduire nos artistes et auteurs à se retirer sur l’Aventin ; bien au contraire, il faut s’ouvrir davantage au monde, rencontrer d’autres cultures, pour prendre la mesure de la compétition car il s’agit bien d’une compétition, n’en déplaise aux doux rêveurs.
Mais cette feuille de route a une limite : par réalisme économique, elle passe sous silence le voile pudique que l’on jette sur nos valeurs quand il s’agit de commercer avec des pays qui bafouent honteusement les droits humains. Plus encore, malgré le vocabulaire volontairement guerrier (« la course à l’armement des diplomaties d’influence »), les diplomates font abstraction du rapport de force militaire. Au Mali, la présence de la force Barkhane n’a pas dissuadé la junte de faire un nouveau putsch et de faire appel aux mercenaires russes de Wagner en guise de garde prétorienne. À un niveau infiniment moins important, inutile de dire que, dans ce contexte, les Rencontres photographiques de Bamako, soutenues par la France (elles ont aujourd’hui disparu du calendrier), pèsent autant qu’un insecte sur le dos d’un éléphant dans la diplomatie d’influence au Sahel. Oui décidément, « il n’y a plus que du hard power ».
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« Il n’y a plus que du hard power »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°583 du 18 février 2022, avec le titre suivant : « Il n’y a plus que du hard power »