Une année historique pour les enchères

France. Jamais un tel montant n’avait été atteint, même du temps où le Covid-19 n’existait pas. Il marque ainsi une progression de 25 % par rapport à 2019 (et de 77 % par rapport à 2020). Toutes en augmentation (entre 13 et 145 %) par rapport à l’an passé, les maisons de ventes aux enchères en France affichent une bonne santé.

Sotheby’s reprend la première place du classement qu’elle avait perdue l’an dernier avec un volume de ventes de 424 millions d’euros (+ 145,1 %), « une année historique. Paris commence à prendre la place qu’elle mérite sur le marché international ! », s’est réjoui Mario Tavella, le président de Sotheby’s France. Christie’s arrive à la seconde position avec un total de 409,1 millions d’euros (+ 85 %), son meilleur résultat depuis 2009, l’année de la dispersion de la collection Yves Saint Laurent et Pierre Bergé. Elle est suivie d’Artcurial qui atteint 163 millions d’euros. La maison de ventes du rond-point des Champs-Élysées enregistre la plus petite hausse en 2021 (13 %) ; les ventes Rétromobile et Le Mans Classic n’ayant pu se tenir à cause de la pandémie l’ont privée de 40 à 50 millions d’euros. Vient ensuite Aguttes, qui conserve la quatrième place, avec 75 millions d’euros totalisés (+ 64,8 % par rapport à 2020), son meilleur résultat atteint depuis la création de la maison en 1974. Toujours cinquième sur le podium, Millon, avec 72 millions de produit adjugé (+ 67,2 %), enregistre également son plus haut total. Tajan remonte d’une place, avec un chiffre de 44,5 millions d’euros, en augmentation de plus de 80 % par rapport à l’an passé, tandis que Piasa et Ader arrivent ex æquo, avec 38,5 millions d’euros ; Ader enregistrant son montant record d’adjudications. Osenat reste sur la neuvième marche avec 35,2 millions d’euros récoltés quand Cornette de Saint-Cyr ferme la marche avec 31,8 millions d’euros. Toutes deux enregistrent une hausse de 50 %. Quant à Drouot, l’hôtel des ventes affiche aussi une progression de 62,4 % pour atteindre un volume de ventes de 322,4 millions d’euros.

Pourquoi de tels scores malgré le contexte sanitaire actuel ? En premier lieu, un nombre considérable de collections dispersées cette année sont venues alimenter le marché. Chez Christie’s, il y en a eu vingt-quatre. « Si nous en avons eu autant cette année, ceci est le résultat d’un mélange de dossiers qui étaient mûrs, de reports de 2020 et de l’histoire classique du monde des successions », analyse Cécile Verdier, présidente de Christie’s France. En point d’orgue, la collection d’art d’Afrique et d’Océanie de Michel Périnet qui a atteint 66 millions d’euros en juin dernier. Chez Sotheby’s aussi, des collections très prestigieuses ont été dispersées, à l’instar de la collection Dorothée Lalanne qui a atteint 80,9 millions d’euros [voir ill]. Ce score a permis à la maison de ventes de Patrick Drahi d’être leader en France en design, notamment, avec un montant record de 128,7 millions d’euros. Chez Aguttes, ce ne sont pas moins de soixante-huit collections qui ont été mises aux enchères et soixante-dix-huit chez Artcurial (contre cinquante-neuf en 2020).

Autre fait marquant de l’année écoulée, l’augmentation des ventes en ligne. À Drouot, qui regroupe soixante-deux opérateurs, trois cent cinq ventes en ligne ont été comptabilisées contre quatre-vingt-dix-huit en 2019, avant pandémie. Sur la plateforme Interencheres, pour le secteur « Art et objets de collection », 240 millions d’euros ont été adjugés sur Internet, en live, soit une augmentation de 37 % par rapport à 2020. Sotheby’s a même orchestré quarante-huit ventes online only (contre vingt-six en 2020) – du jamais vu. Christie’s en a organisé quinze (contre aucune en 2019) et Artcurial, vingt-six (contre seize l’an passé). Ces chiffres en hausse démontrent qu’alors même que les salles des ventes sont restées ouvertes en 2021 – contrairement au confinement de 2020 –, la plupart des opérateurs ont intégré cette pratique à leur stratégie et l’ont même renforcée. Chez d’autres, cependant, le online only reste très minoritaire. « La part du “online only” est pratiquement inexistante chez nous, moins de 1 % », indique Arnaud Cornette de Saint-Cyr, quand Piasa déclare que ce type de ventes ne représentait que 590 000 euros du résultat final.

L’intensification de la stratégie numérique dans les maisons de ventes – qui s’accompagne d’une habitude d’achat qui commence à se pérenniser chez les enchérisseurs – a également eu pour conséquence de faire entrer de nouveaux acheteurs dans la boucle : 37 % chez Sotheby’s et 35 % chez Christie’s par rapport à l’an dernier (+ 61 % par rapport à 2019). Sur Interencheres, 241 000 nouveaux inscrits ont été enregistrés (+ 18 %).

Corrélativement à cette dématérialisation des ventes aux enchères, le nombre de vacations s’est démultiplié. Ainsi, Millon en a organisé en tout trois cent vingt (contre 285 en 2020), « un record européen », a souligné l’opérateur. Cent quatre ont été recensées chez Artcurial et quatre-vingt-neuf chez Osenat. Sotheby’s, elle, en a organisé soixante-dix (contre quarante-cinq en 2020). « Si nous avons pu organiser autant de vacations, c’est parce que les ventes sur Internet ne mobilisent pas la salle », a expliqué Mario Tavella.