PARIS [20.01.12] - Le célèbre galeriste Larry Gagosian expose le non moins médiatique Damien Hirst. La série complète de ses « Spot Paintings » est présentée dans les onze galeries que possède Gagosian, de Los Angeles à Hongkong… Soit une surface totale de 15 000 mètres carrés pour l’un des artistes contemporains les plus chers du marché.
Si Larry Gagosian est régulièrement considéré comme le galeriste le plus important au monde, il n’est toutefois pas réputé pour sa discrétion. Cela tombe bien, Damien Hirst non plus, qui est l’un des artistes phares de son empire. Le premier (66 ans) est en effet aujourd’hui à la tête de pas moins de onze galeries dans le monde, à Los Angeles (où il se lance en 1980), New York (quatre aujourd’hui, dont celle du 980 Madison Avenue), Rome, Athènes, Genève, Hongkong et enfin Paris, inaugurée en septembre 2010. Damien Hirst, de son côté, n’a jamais fait dans la dentelle. À cette dernière, il a depuis longtemps préféré les ors et les diamants, à l’exemple de sa vanité : For the Love of God, un crâne humain en platine incrusté de 8 601 diamants. Ou, de façon moins glamour – quoique ! –, les animaux plongés dans des aquariums remplis de formol, tel ce requin ou cette vache coupée en deux.
Hirst (né en 1965 à Bristol, vivant entre Londres et Devon, en Angleterre) a également beaucoup fait parler de lui en 2008. Les 15 et 16 septembre de cette année-là, il a organisé lui-même, sans passer par une galerie, la mise en vente de ses propres œuvres chez Sotheby’s à Londres. Au-delà d’une réflexion certes inédite sur les lois du marché et de la provocation que représente le court-circuitage des galeries, l’événement fit date par l’avalanche de records établis : dépassement dès le premier jour de l’estimation globale (à 65 millions de livres soit 81 millions d’euros) avec une somme atteignant 70,5 millions de livres (88,5 millions d’euros) ; au final, les 218 œuvres porteront le chiffre d’affaires total à 111 millions de livres (139,5 millions d’euros), ce qui constitue toujours le record pour une vente publique d’un seul artiste (même si on apprit après coup que certaines œuvres n’auraient pas trouvé preneur ou pas été payées) ; record encore lors de cette cession pour une œuvre de Hirst avec 13 millions d’euros pour le bien nommé Veau d’or. N’en jetez plus, la coupe est pleine. Aussi lorsque Gagosian et Hirst s’accordent pour mettre un projet sur pied, cela ne peut que faire du bruit, de l’éclat et des couleurs. Un feu d’artifice en somme. C’est ce à quoi l’on assiste avec l’actuel événement qui voit l’artiste exposer « The Complete Spot Paintings 1986-2011 » dans les onze galeries simultanément, soit une surface d’un peu plus de 15 000 m2. Là encore du jamais vu et une belle occasion de réfléchir au mode d’exposition qui, avec la vie et la mort, est l’un de ses grands sujets.
Maître du monde de l’art
L’idée germait depuis un certain temps dans la tête de Hirst, qui réfléchissait à une rétrospective. En 2009, à l’occasion de son exposition à la galerie de Madison Avenue, il découvre, accrochée en vitrine, comme le fait toujours Larry Gagosian dans sa maison mère, la liste de toutes les expositions de ses autres espaces dans le monde. Pas mégalo pour deux sous, l’artiste s’imagine alors son nom figurer en face de chacun des lieux. Hirst maître du monde… de l’art contemporain.
Les « Spot Paintings » donc : car Hirst, ce n’est pas qu’une question d’argent. C’est aussi une histoire de ronds et plus précisément de cercles de toutes les tailles et de toutes les couleurs. Une histoire de peinture, de concept et de hasard. Sur les quelque 1 400 « Spot Paintings » qu’il a réalisées et surtout fait réaliser par ses assistants, (il n’a en effet peint lui-même que les premières), environ 300 ont été sélectionnées pour l’occasion. Les œuvres, qui proviennent pour une bonne part de collections privées ou publiques, ont été respectivement choisies en fonction des lieux où elles sont habituellement accrochées. Comme une cartographie mondiale de leur domicile. Ainsi les vingt-trois tableaux montrés à Paris, datés de 1991 à 2011, ont-ils été collectionnés principalement en France mais aussi en Belgique, Espagne ou à Monaco.
Seul un tiers d’entre elles environ sont en vente. Mais il est impossible de connaître la fourchette de prix puisque, selon son principe revendiqué, « la galerie Gagosian ne communique jamais publiquement le prix des œuvres ». Curieux pour une entreprise qui a précisément fait des records de prix son image de marque, mais qui, pour redorer celle-ci, soutient qu’en présentant des expositions de qualité muséale elle ne se positionne pas seulement sur le plan commercial. Ce n’est un secret pour personne, la cote de Hirst ne cesse de baisser depuis 2008. Il reste néanmoins l’un des artistes les plus chers du monde.
Nombre d’œuvres : 23
Jusqu’au 18 février, Gagosian Gallery, 4, rue de Ponthieu, 75008 Paris, tél. 01 75 00 05 92, du mardi au samedi 11h-19h.
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Hirst et Gagosian, une histoire de ronds
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Abonnez-vous dès 1 €Damien Hirst, 5-Bromogramine, 2005, gloss ménager sur toile, 152,4 x 152,4 cm. © Damien Hirst and Science Ltd., courtesy Gagosian Gallery. Photo : Prudence Cuming Associates.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°361 du 20 janvier 2012, avec le titre suivant : Hirst et Gagosian, une histoire de ronds