Calais remodèle son parcours permanent

Calais (Pas-de-Calais). Passé au second plan avec l’ouverture en 2009 de la Cité de la dentelle et de la mode, le Musée des beaux-arts de Calais, établissement culturel phare de la Ville, a inauguré le 13 mai un nouveau parcours permanent. « L’enjeu de cette première phase, c’est de prouver au propriétaire du musée [la Ville de Calais] qu’il détient des collections importantes, qui peuvent raconter l’histoire du territoire », explique Anne-Claire Laronde, directrice des musées municipaux. Un pari, puisque le musée a suspendu sa programmation d’expositions temporaires pour financer ce parcours permanent, ceci au risque d’une baisse de sa fréquentation, variable surveillée de près par les tutelles politiques.

L’institution doit se repositionner : à Dunkerque (Nord), le Musée des beaux-arts est fermé depuis 2015, sans réouverture programmée. Arrivée en 2012 à Calais, Anne-Claire Laronde craint que la décision de la grande agglomération voisine ne fasse tache d’huile. Le musée développe alors une politique d’expositions temporaires grand public, de street art ou consacrées à la bande dessinée. Un grand écart avec sa ligne antérieure, proche depuis les années 1980 de celle d’un centre d’art contemporain. Mais le revirement est payant, la fréquentation est en hausse, passant la barre des 20 000 visiteurs par an. « Cette programmation nous a permis d’avoir la confiance de la Ville et de garder nos budgets », estime la directrice, qui mise désormais sur le nouveau parcours pour voir cette confiance se confirmer. « Les prochains mois vont être décisifs », souligne-t-elle.

Les 500 mètres carrés de cette première phase du parcours permanent sont annoncés dès le hall d’entrée, par un « patchwork » d’œuvres disséminées sur une grande cimaise orange. Plusieurs séquences reconstituent ensuite le contexte de la présentation des œuvres : un accrochage « petersbourgeois » pour les œuvres anciennes ; un salon tapissé de velours accueillant le tournant du XXe siècle ; une ambiance de galerie d’avant-garde destiné à l’art moderne puis un white cube pour l’art contemporain. Ce parti pris scénographique anime la visite et présente une vraie cohérence au regard des collections. « C’est un changement d’ambiance nette. Auparavant tout était mélangé : les spécialistes appréciaient, mais la plupart des visiteurs avaient un sentiment de gêne, voire d’animosité », rapporte la directrice.

Ce nouvel accrochage met en valeur la diversité du fonds, et ses belles pièces : un Monticelli, une œuvre MNR (Musées nationaux Récupération) signée Eugène Boudin, des dépôts du Musée Rodin comme le buste de Camille Claudel, un grand Dubuffet face à un Marcel Broodthaers pour l’art contemporain. Le parcours reproduit également l’atelier d’Henri Delcambre (1911-2003), sculpteur de l’école de Paris dont le musée vient de recevoir une belle et importante donation. Ces premières salles sont en phase avec l’objectif d’un musée grand public et axé sur le territoire. Bientôt, ce sont les salles Rodin et l’étage consacré à l’histoire du Calaisis qui devraient être remaniés, si la municipalité accède à ce vœu. Avec pour seul financement son budget de fonctionnement (135 000 €), le musée a déjà réussi un petit miracle : il serait intéressant de voir ce qu’il peut faire avec un budget d’investissement proprement dit.