La vague spéculative autour des NFT semble être retombée, constate l’éditorialiste du Journal des Arts.
Art numérique. Les NFT vont-ils disparaître aussi rapidement qu’ils ont fait irruption sur le marché de l’art en 2021 ? Cela en prend le chemin à considérer le silence de leurs divers promoteurs depuis quelques mois. Rappelons que les NFT sont des certificats d’authenticité inscrits sur la blockchain, visant par pure construction intellectuelle à décréter qu’un fichier numérique quelconque (qui peut être copié à l’infini) est « unique ». Il existe trois catégories de fichiers : les « collectibles » qui sont des vignettes (de singes, de marins…), les œuvres d’art numérique et tous les autres. Dans cette troisième catégorie, on trouve par exemple des œuvres d’art réelles que leurs musées propriétaires ont commercialisées sous forme de reproduction numérique.
Le British Museum qui avait ainsi vendu des NFT de gravures de Hokusai ne communique plus du tout sur le sujet. Christie’s qui avait lancé en grande pompe ses ventes aux enchères de NFT « art » et « collectibles » en septembre 2022 a réalisé six vacations, la dernière en juillet 2023, mais n’annonce pas de prochaines ventes. Le Centre Pompidou est le dernier musée important – à notre connaissance – à avoir acquis des NFT, c’était en avril dernier.
De manière très significative, alors qu’au moment de l’euphorie sur les NFT, le web croulait d’analyses dithyrambiques sur les perspectives de gains, il est devenu très difficile de trouver des rapports sur l’évolution du marché des NFT. Le dernier rapport trimestriel du site NonFungible date du troisième trimestre 2022 et il annonçait déjà la décrue, laquelle s’est accélérée depuis. En un an, le nombre de transactions quotidiennes sur les plateformes d’achat et de vente de NFT a été divisé par huit. La valeur des cryptomonnaies Bitcoin et Etherum s’est stabilisée depuis un an, mais elle avait fortement chuté depuis 2021. S’il y a encore des gogos pour acheter 100 000 dollars un CryptoPunks, ils sont de moins en moins nombreux ; le marché est en train de comprendre qu’il repose sur du vent.
Coté œuvres d’art numérique où le pire côtoie le meilleur, risquons une explication. L’irruption des logiciels d’Intelligence Artificielle (IA) qui produisent des images étonnantes, parfois de grande qualité artistique, a peut-être refroidi les acheteurs qui ne sont plus prêts à payer pour des œuvres numériques réalisées par des artistes humains, pour certaines pas assez créatives pour les distinguer des œuvres générées par IA.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°620 du 3 novembre 2023, avec le titre suivant : Où sont passés les NFT ?