Foire & Salon

DESSIN CONTEMPORAIN

Drawing Now s’aventure aussi dans le monde virtuel

Par Anne-Cécile Sanchez · Le Journal des Arts

Le 27 mai 2022 - 707 mots

PARIS

Le Salon du dessin contemporain 2022 a apporté la preuve de la bonne santé du médium, exploré au-delà de ses limites par des artistes qui ne cessent de le renouveler.

Vue de l'édition 2022 de Drawing Now au Carreau du Temple à Paris. © Grégoire Avenel / Agence Coolhunt Paris
Vue de l'édition 2022 de Drawing Now au Carreau du Temple à Paris.
© Grégoire Avenel / Agence Coolhunt Paris

Du 19 au 22 mai, on a enfin retrouvé Drawing Now Art Fair dans son format habituel, de retour au Carreau du Temple comme en 2019. La chaleur était estivale sous la verrière et la bonne humeur de rigueur pour cette 15e édition dont la qualité a été unanimement saluée. « Nous avons fait un très bon démarrage dès mercredi avec une vente d’un collage de Kiki Smith et une autre d’un dessin de Jan Voss, suivies d’une dizaine de ventes d’autres artistes exposés : David Nash, Alechinsky, Fabienne Verdier, Marc Desgrandchamps… Les prix variant de 1 900 à 15 000 euros », assurait-on ainsi sur le stand de la galerie Lelong & Co (Paris et New York). D’autres marchands se montraient plus réservés, chacun s’accordant cependant à dire que l’essentiel était d’être là, à la rencontre des collectionneurs, des institutions et d’un public curieux.

Lauréate radieuse du 11e prix Drawing Now (doté cette année d’une bourse de création de 5 000 euros et de 10 000 euros d’aide à la production pour une exposition de trois mois au Drawing Lab, accompagnée d’un catalogue monographique), Karine Rougier (galerie Espace à vendre, Nice) incarnait par son travail la permanence de l’aquarelle sur cette édition où l’on a cependant vu aussi beaucoup d’œuvres utilisant la gouache. Ainsi de Kubra Khademi (galerie Éric Mouchet, Paris) qui l’associe à la feuille d’or dans ses magnifiques dessins au trait délié, inspirés des mythes et traditions d’Asie centrale. Mais aussi de Claire Trotignon (galerie 8+4, Paris) qui coupe, colle et dessine des espaces diffractés à même la feuille. Ou de Guillaume Dégé, dont les hybridations absurdes et poétiques, formes acidulées posées sur des papiers du XVIIIe siècle, préfigurent un livre splendide à paraître bientôt (galerie Semiose, Paris). Ou d’Isabelle Ferreira, dont les paysages labiles sont faits de papiers gouachés tels des Pétales de couleur (galerie Maubert, Paris). Ou encore des Hawaiians Ghost de Gilles Barbier, tout en drapés fleuris (galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois, Paris).

L’inventivité déployée par des artistes de toutes générations dans un domaine, le dessin contemporain, aux contours vastes et très poreux est réjouissante et les expérimentations ne manquaient pas sur cette édition. Du même Gilles Barbier, on pouvait ainsi découvrir la série caustique des « Winter Drawing », silhouettes exposées au soleil habillées de caches laissant, une fois retirés, une marque blanche bien visible. Flirtant avec la sculpture, les retables narratifs de Patrice Killoffer, qui y insère ses images à l’encre de Chine et à la mine plomb (galerie Anne Barrault, Paris) faisaient écho à celui, spectaculaire et psychédélique, de Neal Fox (galerie Suzanne Tarasieve, Paris).

Incursion des NFT

La toute nouvelle galerie Miyu [lire page 30], extension du label français éponyme spécialisé dans le cinéma d’animation, faisait son entrée sur la foire où son stand était situé au sous-sol, plus frais et sensiblement plus calme. Sur les murs de son espace, pas d’œuvres encadrées mais des écrans de différents formats présentant des vidéos numériques aux esthétiques très diverses, des panoramas sombres et mouvants de Vergine Keaton à l’érotisme régressif de Sawako Kabuki en passant par les portraits crypto-kinographiés de Sébastien Laudenbach. « Chaque fichier est une pièce unique accompagnée d’un certificat d’authenticité digital NFT, expliquait Emmanuel-Alain Raynal, le fondateur de la galerie. Les techniques d’animation intéressent de plus en plus les artistes contemporains qui ne les maîtrisent pas forcément : nous avons aussi vocation à les accompagner. » Une petite révolution à venir ?

Sur le stand de la Patinoire royale – galerie Valérie Bach (Saint-Gilles, Belgique), la révolution avait déjà eu lieu. Il fallait en effet coiffer un casque de réalité virtuelle (proposé sous forme de coffret en édition de dix) pour s’immerger dans l’univers visuel et sonore de Jeanne Suspluglas, inspiré des jeux vidéo – les « pensées actives » du regardeur déclenchant au gré de ses mouvements oculaires une trentaine de scénarios. Voyage mental dans une galaxie peuplée d’objets et de créatures en gravitation (caddy, drapeau, dragons, joggeuse, pilules multicolores…), I will sleep when I’m dead ouvre une porte sur une vertigineuse illusion d’infini, autant que sur une nouvelle forme de création artistique.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°590 du 27 mai 2022, avec le titre suivant : Drawing Now s’aventure aussi dans le monde virtuel

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