L’Espagne et la France célébreront conjointement en 2023 le cinquantenaire de la mort de Pablo Picasso.
Paris, Madrid. Picasso est né en Espagne en 1881 et mort en France en 1973. Entre ces deux dates, il aura vécu plus de soixante-dix ans en France et seulement vingt en Espagne. Quelle place l’Espagne doit-elle lui accorder dans les célébrations du cinquantenaire de sa mort ? Pour le ministère de la Culture espagnol, interrogé, les choses sont claires, le choix d’une « Célébration Picasso » binationale s’est imposé d’elle-même car « l’Espagne considère Picasso comme étant autant espagnol que français ». De fait, l’artiste « est né en Espagne, y a vécu et y a été formé, et s’est considéré comme espagnol jusqu’à sa mort, sans que cela implique une contradiction avec sa vie française. Une période importante concernant son hispanité est la guerre civile, au cours de laquelle il est nommé directeur du Musée du Prado et collabore à la présentation du pavillon espagnol de 1937 en peignant Guernica. À partir de ce moment, il y a une constante dans sa vie, qui est son implication dans tous les mouvements d’opposition à Franco », précise le ministère. Un citoyen franco-espagnol en somme. Mais le Picasso artiste, lui, « appartient à tout le monde et son écho est global », affirme Jose Lebrero Stals.
Célébrer la mort de Picasso n’est pas un choix anodin, car il « ne rigolait pas du tout quand on parlait de “mort” en sa présence », rappelle le directeur du Musée Picasso-Málaga. « Les Mexicains, au contraire, la fréquentent, jouent avec. Pour cette raison, si l’on accepte le culte de la mort comme le culte de la vie elle-même, cette “Célébration” pourrait être une excellente occasion de découvrir de quelle manière le fascinant héritage de Picasso peut être projeté vers l’avenir. Pour nous, c’est une occasion précieuse d’en savoir plus, de manière plus critique, sur son caractère et sa sensibilité andalouse et espagnole », explique-t-il.
Quid des controverses attachées à la vie de l’homme derrière la notoriété de l’artiste ? Jose Lebrero Stals est prudent, estimant que « la vie et l’œuvre de Picasso commencent au XIXe siècle. Ni les conditions esthétiques ni les urgences sociales d’alors ne sont celles d’aujourd’hui. À une époque où “l’identité” fait l’objet de toutes sortes de débats et d’explorations, revoir non pas l’œuvre, mais la personne et son comportement est à l’ordre du jour ».
Pas moins de quarante-deux expositions sont programmées jusqu’en 2024, dont seize en Espagne et douze en France, les autres étant réparties dans différents musées d’Europe et des États-Unis (Solomon R. Guggenheim Museum, Cincinnati Art Museum, Brooklyn Museum…). Parmi les premières en date, le Musée Picasso de Barcelone reviendra, à partir du 18 novembre, sur la relation de Picasso et de son galeriste, Daniel-Henry Kahnweiler (1884-1879), tandis qu’à Paris le Musée de l’Homme-Muséum national d’histoire naturelle dévoilera, en février 2023, les influences de l’art préhistorique sur l’œuvre du peintre avec l’exposition « Picasso et la préhistoire ».
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°595 du 23 septembre 2022, avec le titre suivant : Cinquantenaire Picasso : l’Espagne entend tenir sa place