L’office américain considère qu’une image générée par de seules instructions textuelles ne peut être protégée au titre du droit d’auteur.

Washington D.C. Dans un rapport publié le 29 janvier, l’office américain du droit d’auteur (US Copyright Office, ou « USCO ») s’est intéressé à la protection par le copyright des résultats générés à l’aide de systèmes d’intelligence artificielle (IA) générative. Il examine ainsi les contenus générés en aval par un système d’IA générative et non les données moissonnées en amont pour entraîner les modèles d’IA, dont l’étude est annoncée pour les prochains mois.
L’USCO considère en premier lieu que la législation américaine existante est suffisante pour traiter les créations générées par l’IA, de sorte qu’il n’est pas nécessaire de modifier la loi. Il examine ensuite le degré de « contributions humaines » nécessaires pour que les œuvres générées par l’IA soient considérées comme des œuvres protégées au titre du droit d’auteur. Quatre recommandations principales sont énoncées, suivant un raisonnement progressif. D’abord, un contenu entièrement généré par un système d’IA ne peut être protégé par le copyright. Ensuite, l’utilisation de l’IA pour assister la créativité humaine n’affecte pas l’éligibilité à la protection par le copyright, sous réserve toutefois que les résultats soient « suffisamment » contrôlés par l’humain. Troisième point, la question de savoir si la contribution humaine aux résultats est « suffisante » relève de la casuistique et doit, par conséquent, être analysée au cas par cas.
Enfin, le rapport se prononce sur la protection de contenus générés à l’aide de prompts (« instructions »). Bien que non définitive car donnée « en l’état de la technique », sa quatrième recommandation n’en est pas moins clairement énoncée. L’office américain observe, sur la base du fonctionnement actuel de l’IA générative, que les prompts ne fournissent pas à eux seuls un contrôle suffisant pour que l’on puisse dissocier ce que l’artiste a créé de ce qui a été généré automatiquement. Deux raisons sont avancées : la première tient au fait que techniquement il serait à ce jour impossible de comprendre l’influence d’un prompt ou d’une série de prompts sur les résultats générés par les IA génératives qui reposent sur des systèmes complexes et dont les modèles comportent des milliards de paramètres. À cette complexité s’ajoute l’imprévisibilité des résultats dès lors que, dans de nombreux systèmes d’IA, les contenus générés peuvent varier d’une requête à l’autre, avec un prompt pourtant identique. L’office conclut ainsi que, compte tenu de l’état actuel de la technologie de l’IA générative, les prompts ne fournissent pas à eux seuls un contrôle humain suffisant pour faire des utilisateurs les auteurs des résultats. Et d’ajouter que l’absence de protection par le copyright s’étend aux prompts très détaillés et contenant les éléments expressifs souhaités par l’utilisateur. Rien n’empêche en revanche le bénéfice de la protection aux auteurs qui ont sélectionné, coordonné et arrangé le matériel généré par l’IA d’une manière créative, la part créative intervenant alors en amont et/ou en aval du prompt.
Les solutions de l’office américain sont transposables en France. Aucune décision judiciaire n’a encore été rendue. Le débat est donc ouvert. Une certitude toutefois : au regard de la loi française, l’auteur d’une œuvre de l’esprit au sens du droit d’auteur ne peut être qu’une personne physique, seule capable de concevoir une création intellectuelle qui lui est propre, reflétant sa personnalité, par la manifestation de choix libres et créatifs. Un contenu, quel qu’il soit (texte, image, vidéo, musique, etc.), généré par une intelligence artificielle ne saurait par conséquent en lui-même être protégé au titre du droit d’auteur.
Ce qui devrait en revanche être discuté, c’est la question de savoir si, par une série de prompts exprimant des choix libres et créatifs, un auteur peut, dans le cadre d’un dialogue itératif actif avec la machine, concevoir une œuvre singulière portant l’empreinte de sa personnalité. Ce faisant, l’auteur limiterait les résultats probabilistes proposés par l’IA pour réduire celle-ci au statut de simple exécutant matériel de ses directives et bénéficierait, ainsi, de la protection du droit d’auteur. À notre sens, une réponse positive s’impose.
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Une décision importante de l’US copyright office pour les œuvres produites par l’IA
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°649 du 14 février 2025, avec le titre suivant : L’US copyright office face aux œuvres produites par l’IA