Les rangs des éditeurs d’art francophones se dépeuplent au rythme des faillites. Le livre d’art est un luxe qui repose sur un trop faible public pour survivre.
Le premier éditeur d’art de Belgique reste à ce jour le Crédit communal. Sa collection des "Maîtres de l’art moderne" constitue l’ultime lieu de diffusion d’un patrimoine longtemps laissé en friche. Ses publications de qualité font la part belle à l’art belge, sans se limiter aux seuls événements que constituent désormais les expositions.
Des maisons renommées telles que Duculot ou les Ateliers Vokaer ont fait faillite, et les nouveaux venus, comme Racine, peinent à s’imposer en dehors de la catégorie "beaux livres". La Renaissance du Livre, pour sa part, a opéré quelques jolis coups en publiant le Dictionnaire des peintres belges du XIVe siècle à nos jours et le Dictionnaire des peintres belges du XVIIe siècle. Ces titres représentent des investissements lourds qui ne laissent pas grand place pour d’autres publications. Il convient encore de mentionner La Lettre Volée, pour ses essais de grande qualité et de belle facture.
Une volonté politique
Les raisons de cette situation sont multiples : d’une part, le public belge est trop limité et déjà fortement sollicité par les parutions mieux diffusées et davantage médiatisées des grandes maisons françaises. Hors du champ privilégié des expositions, le public se révèle trop étroit pour permettre ne serait-ce qu’une opération équilibrée. Dès lors, la plupart des éditeurs rognent sur la promotion et sur la diffusion afin de faire des économies qui limitent encore les ventes. Cette situation éditoriale résiste à l’effondrement grâce à la politique de subvention menée par les pouvoirs publics, qui assure à quelques éditeurs une relative marge de manœuvre.
Sans doute est-ce de là que viendra la solution. L’essor de la littérature d’expression française en Belgique est redevable d’une volonté politique qui, en privilégiant par exemple les Éditions Labor, a permis la création d’un catalogue conséquent qui rend crédible un patrimoine diffusé jusque dans les écoles : rééditions, essais, et désormais traductions, épaulent la création littéraire. Un plan éditorial comparable devrait être mis en œuvre selon des lignes directrices cohérentes si l’on veut voir renaître une édition d’art de qualité en Belgique et, surtout, si l’on souhaite tirer de l’oubli un patrimoine de plus en plus relégué aux seules publications scientifiques.
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L’édition d’art sinistrée
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°22 du 1 février 1996, avec le titre suivant : L’édition d’art sinistrée