Les antiquaires et les marchands de tableaux d’Anvers ou de Bruxelles peinent aujourd’hui à trouver des œuvres et des objets de qualité – surtout dans le domaine des arts décoratifs et du mobilier des XVIIIe et XIXe siècles. Nombre d’entre eux se voient obligés de s’approvisionner en Allemagne, aux Pays-Bas, et surtout en France. Du côté des acheteurs, les marchés américain et européen offrent des perspectives intéressantes, notamment pour la peinture belge impressionniste, symboliste ou moderne.
À Anvers, Bruxelles, Liège ou Gand, ces derniers mois auront vu fleurir des journées "portes ouvertes" étalées sur un ou deux week-ends, qui connaissent chaque fois un succès considérable. C’est, pour les galeries, une façon de contrebalancer le rôle grandissant des salons, même si plusieurs spécialistes pensent que cette abondance de rendez-vous assèche le marché et diminue l’appétit des amateurs. Bernard Blondeel, grand spécialiste en tapisseries anciennes installé à Anvers, y voit au contraire une complémentarité et estime "que la première partie de 1995 a été excellente, amplifiée par les retombées de la Foire de Maastricht.
La seconde période aura en revanche été plus terne, sans empêcher le chiffre d’affaires de croître de 15 % pour atteindre 90 millions de francs belges environ (15 millions de francs)." Les tentures représentent encore les trois-quarts de son activité, mais l’antiquaire possède deux autres cordes à son arc, à savoir les arts du Moyen Âge et ceux de l’Antiquité. Selon lui, les Belges sont les acheteurs les plus réguliers, mais les Américains sont toujours les amateurs les plus solides, devant les Allemands et les Hollandais, alors que les Français et les Italiens se font plus discrets : "En fait, la part de chacun de ces pays dans le chiffre d’affaires varie en fonction du nombre de nos participations aux grandes foires internationales."
Les jeunes n’achètent plus autant que leurs parents
Pour Jenny Zeberg, qui possède à Anvers une galerie spécialisée dans le mobilier flamand de haute époque, "la qualité continue à se vendre comme jadis, mais les gens sont de plus en plus attentifs à ce qu’ils achètent." Même son de cloche chez Pierre-Hubert de Formanoir, spécialiste en meubles français de la fin du XVIIIe siècle, installé au Sablon, à Bruxelles : "Il y a de moins en moins de marchandises, elle est de plus en plus chère et la clientèle se raréfie : les jeunes n’achètent plus autant que leurs parents. Les Belges préfèrent, pour l’heure, acheter peu et à bas prix." Mais pour Patrick Derom,"les tableaux, dessins et gravures d’artistes belges modernes et impressionnistes ont profité d’une nette reprise depuis l’été dernier, de l’ordre de 30 %, autant en valeur qu’en nombre de transactions.
De plus, les conservateurs des musées américains semblent particulièrement sensibles à l’art belge de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Des expositions récentes, comme celle de la Royal Academy à Londres – "Du Réalisme au Symbolisme, l’Avant-garde belge 1880-1900" –, ont joué un rôle déterminant, et ils veulent étoffer leurs collections de peintures et de dessins impressionnistes non-français."
L’art africain
D’après Jan De Maere, marchand de tableaux et de dessins anciens,"le marché belge est ainsi fait que les amateurs de tableaux et de dessins flamands préfèrent les compositions décoratives plutôt que les œuvres difficiles : la peinture d’histoire n’est guère en vogue, alors que les bouquets de fleurs sont très demandés ! Sur le plan commercial, 70 % de mes ventes se concluent avec l’étranger. Les États-Unis et l’Angleterre dominent, mais l’Extrême-Orient n’est pas inactif dans mon domaine."
Enfin, Bruxelles est un haut lieu pour l’art primitif, avec des marchands comme Lin et Émile Deletaille, Grusenmeyer, Art Premier… "La très belle exposition des trésors cachés d’art africain du musée de Tervuren a suscité un engouement extraordinaire", constate Bernard de Grunne, qui avec Philippe Guimiot a ouvert une seconde galerie l’été dernier au Zoute (Knokke).
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L’appel de l’étranger
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°22 du 1 février 1996, avec le titre suivant : L’appel de l’étranger