PARIS
Un rapport parlementaire propose notamment une adaptation des normes du diagnostic de performance énergétique pour le patrimoine ancien.
Paris. Le compte à rebours a commencé : dès 2025, les logements classés G dans leur diagnostic de performance énergétique (DPE) seront interdits à la location. Pour le bâti ancien, cette course à l’amélioration de la performance énergétique pourrait se révéler problématique : les normes proposées par la loi « Climat et résilience » apparaissent en effet inadaptées au bâti construit avant 1948. Le rapport produit par la sénatrice du Haut-Rhin Sabine Drexler (LR) sur cet épineux problème rappelle par ailleurs que le bâti patrimonial représente 34 % des habitats individuels, 29 % des habitats collectifs, et une proportion plus grande des consommations d’énergie (39 % pour l’individuel, 35 % pour le collectif).
Au vu de ces chiffres, la transition écologique en France ne peut se passer d’une réhabilitation énergétique du bâti ancien. Mais celui-ci doit-il répondre aux mêmes exigences que les constructions récentes ? Le rapport de la sénatrice formule dix recommandations pour concilier enjeux climatiques et préservation du patrimoine. Souvent qualifiés de « passoires énergétiques », les 10 millions de logements construits avant 1948 présentent également des avantages : ils sont construits dans des matériaux dits « naturels », « respirants », et procurent un confort d’été plus avantageux que les logements récents. Le rapport met ici le doigt sur l’une des carences de la campagne de rénovation énergétique en cours, entièrement focalisée sur la déperdition thermique, au détriment de l’adaptation des logements aux températures estivales, de plus en plus élevées.
La mise en œuvre des solutions classiques de rénovation thermique (comme l’isolation par l’extérieur) pourrait nuire à ces qualités naturelles du bâti ancien, tout en portant atteinte à son caractère patrimonial. Pire, le rapport note que les solutions d’imperméabilisation par l’extérieur peuvent déclencher des pathologies : humidité et moisissures en tête. Quand aux critères très figés du DPE, ils ne prennent pas en compte ces qualités intrinsèques : l’inertie, mais aussi l’analyse de cycle de vie très positif des logements anciens (le « bilan carbone » incluant les émissions liées à la construction et à la pérennité de l’usage).
Le rapport recommande ainsi de revenir à des calculs plus souples, tenant compte de la réalité des matériaux, pour le DPE du bâti ancien. Il préconise également de durcir les exigences lors des travaux de rénovation thermique, notamment en matière d’impact environnemental et de durabilité des interventions : la sénatrice pointe ici le risque d’un gaspillage d’argent public dans des travaux inefficaces à long terme. Parmi les recommandations, la formation des diagnostiqueurs comme des architectes est présentée comme une priorité, tout comme l’accompagnement des collectivités dans l’identification de leur patrimoine.
Un volet fiscal, avec notamment une réforme du dispositif Denormandie, figure en outre dans le rapport. La sénatrice souhaite aussi que la recherche sur les matériaux anciens (au centre d’études et d’expertise Cerema) soit mieux financée. Enfin, elle appelle à une implication du ministère de la Culture, absent du dossier, sur ces questions. Pour l’heure, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, semble avoir pris la mesure du problème : « Il faut une forme de transition, mais en l’adaptant à la réalité du patrimoine », déclarait-il devant l’Assemblée nationale le 21 juin.
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Le Sénat veut réconcilier patrimoine et rénovation énergétique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°615 du 7 juillet 2023, avec le titre suivant : Le Sénat veut réconcilier patrimoine et rénovation énergétique