PARIS
Le Sénat a regretté mercredi des restitutions de biens culturels camouflées sous forme de « cadeaux diplomatiques » et réclamé à l'exécutif un programme scientifique pour évaluer les objets des collections publiques françaises qui pourront être ou non restitués.
La loi sur les restitutions de 26 statues au Bénin et d'un sabre au Sénégal doit être adoptée jeudi définitivement. Les sénateurs, qui ne sont pas hostiles à des restitutions justifiées en cas de vols et de pillages, craignent que cette loi n'ouvre la voie à quantités d'autres à chaque réclamation.
En commission paritaire, ils ont vu leurs propositions rejetées : celle de remplacer le terme « restitution » par celui plus neutre de « retour » et d'instaurer un « conseil national de réflexion ». Lors d'une conférence de presse, le président de la commission de la culture, Laurent Lafon (Union Centriste) s'est inquiété que « les enjeux diplomatiques priment sur les enjeux scientifiques ».
L'envoi discret début novembre à Madagascar, sous forme de dépôt, d'une couronne surmontant un dais de la reine Ranavalona, conservée au Musée de l'armée, a été très mal perçu par les sénateurs. La mission d'information du Sénat, qui a rendu mercredi son rapport sur les restitutions, s'inquiète notamment que la pratique des dépôts, ensuite validés par une loi, se multiplie.
Catherine Morin-Desailly (Union Centriste), présidente de cette mission, a fustigé une « méthode » contestable : « On écoute l'importance des enjeux diplomatiques et on valide derrière. Le ministère de la Culture est sous coupe réglée de la cellule diplomatique de l'Elysée. Si, au gré des déplacements du chef de l'Etat (...) on sort des objets des collections comme cadeaux diplomatiques, où est-ce qu'on va ? », a-t-elle demandé. « Nous sommes pour la recherche de provenance. Il s'agit d'instaurer une méthode démocratique transparente, scientifique, qui permette d'éclairer le politique », a-t-elle ajouté.
Le rapport formule quinze propositions, dont l'association des scientifiques des pays demandeurs à l'inventaire des collections publiques françaises. Il réclame pour les musées des moyens humains et financiers pour lancer un vaste travail sur la recherche des provenances. Il les incite à « contextualiser les collections extra-occidentales en collaborant avec les pays dont les œuvres sont originaires » et à conserver une trace des pièces restituées, par des copies et la numérisation massive.
« Dès janvier, nous travaillons au dépôt d'un texte », a annoncé Mme Morin-Desailly. Selon le rapport, depuis 2019, outre le Bénin, six pays (Sénégal, Côte d'Ivoire, Ethiopie, Tchad, Mali, Madagascar) ont soumis des demandes de restitutions.
Cet article a été publié par l'AFP le 16 décembre 2020.
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Arts africains : le Sénat déplore les restitutions sous forme de « cadeaux diplomatiques »
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