Galeries et visiteurs ont bien accueilli la première édition belge de la foire parisienne.
Bruxelles. Pari réussi pour Laure d’Hauteville, fondatrice de Menart Fair, qui cherchait à créer une édition de sa foire hors de France : la Villa Empain a séduit les galeristes et les visiteurs lors de cette première édition bruxelloise qui s’est tenue du 3 au 5 février. Déjà familières de Menart Paris ou de la Beirut Art Fair (également créée par Laure d’Hauteville), les galeries reconnaissent que le choix de Bruxelles a joué sur leur décision d’y participer. Pour Antoine Laurent, directeur d’In Situ-Fabienne Leclerc (Romainville), « c’est quand même important de venir voir les collectionneurs belges sur place ». Ghada Kunash (galerie Fann À Porter, Dubaï) se dit quant à elle « ravie de l’intérêt montré par les nombreux collectionneurs belges présents dès le vernissage, ainsi que par les collectionneurs français et même allemands ».
L’installation de la foire dans la Villa Empain, superbe bâtiment Art déco à l’histoire mouvementée, ne doit rien au hasard puisque c’est un centre d’art abritant la Fondation Boghossian, qui expose surtout des artistes de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (Mena). Pour l’anecdote, la directrice artistique du lieu est Louma Salamé, fille de l’ancien ministre libanais Ghassan Salamé et sœur de la journaliste Léa Salamé. La Villa combine donc une identité culturelle forte avec un décor raffiné. Ce qui a convaincu la galeriste Françoise Livinec (Paris), qui dit « être très sensible aux salons qui se tiennent dans des lieux historiques ». La fondatrice de la galerie Bessières, Norma Bessières, confirme que la Villa fournit « un cadre exceptionnel » pour les œuvres lumineuses de Serge Najjar (photographies de 4700 à 5200 €, édition de 5) et les toiles de Hala Schoukair (de 6 500 à 19 000 €).
L’architecture de la Villa implique cependant des stands très variables en surface et en luminosité. L’espace le plus original reste l’ancienne salle de bains à l’étage, aux murs carrelés de mosaïques vertes. La jeune galerie parisienne Hunna Art (« elles » en français) a su en tirer parti : sa fondatrice, Océane Sailly, précise avoir choisi « des œuvres de petit format sur des thèmes aquatiques ». Elle présentait d’étranges coquillages en céramique de la Koweïtienne Alymamah Rashed (1 100 € pièce), ainsi que des peintures sur le même thème, dont plusieurs ont été vendues (3600 à 3 900 €). Toujours à l’étage, la galerie La La Lande créée en 2018 à Paris proposait entre autres une grande tenture (10 x 1,30 m) d’Aïcha Snoussi (Tunisie) saturée de signes calligraphiques. Cette pièce exceptionnelle affichée à 25 000 euros a été vendue rapidement, la galerie se félicitant de « nombreux contacts avec des collectionneurs belges ». Malgré la disparité des stands entre les galeries « poids lourds » (Nathalie Obadia, Baronian) et les petites galeries étrangères comme Zawyeh Gallery (Ramallah, Territoires palestiniens), la foire fait montre d’une certaine cohérence. La présélection par la directrice artistique Joanna Chevalier y est pour beaucoup, comme le confirme Yusef Hussein de Zawyeh : « Nous avons fait la sélection en accord avec Joanna Chevalier. » Œuvres classiques et artistes émergents cohabitaient donc, et les visiteurs croisaient par exemple des toiles de Georges H. Sabbagh (Françoise Livinec), une sculpture de Simone Fattal (Tanit, Beirouth, Munich) et des collages contemporains de Yazan Abu Salameh (Zawyeh). Parmi les classiques, la galerie Dar D’art (Tanger) proposait une belle sélection d’artistes de l’École de Casablanca (Mohamed Melehi, Farid Belkahia).
Au-delà du monde arabe
Cette foire donne aussi à voir les courants artistiques au-delà du monde arabe. Chez In Situ-Fabienne Leclerc, plusieurs œuvres des frères iraniens Haerizadeh et de Hesam Rahmanian également iranien (8 500 à 50 000 €) côtoyaient les dessins mélancoliques de la jeune Libanaise Daniele Genadry (2 100 à 12 000 €) et deux belles tapisseries de Joana Hadjithomas & Khalil Joreige (40 000 et 50 000 €, édition de 5).
Le contexte politique régional s’est invité à la foire, avec la plateforme de promotion d’artistes iraniens Simine, qui montrait des dessins de nus féminins inspirés par la révolte populaire actuelle. « Quasiment tous les dessins ont été vendus » (2 000 euros pièce), signalait la directrice de la plateforme. Au vu des longues discussions qui s’engageaient sur les stands, l’intérêt pour les artistes de la région Mena est réel chez les collectionneurs belges, ce que confirment les chiffres. Laure d’Hauteville annonce ainsi « 2 700 visiteurs, et de très belles ventes pour vingt et une des vingt-quatre galeries, dont un sold out sur le stand commun de Simine Paris et Amenor Contemporary ». Ghada Kunash (Fann À Porter) se dit enchantée des ventes réalisées, dont deux toiles à 19 000 euros. Elle a décidé de revenir en 2024, comme d’autres galeries. Laure d’Hauteville précise enfin que des ventes se sont conclues dans les jours suivant la foire, un signe que « les Belges ont adopté Menart ».
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Menart Fair réussit son examen de passage à Bruxelles
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°605 du 17 février 2023, avec le titre suivant : Menart Fair réussit son examen de passage à Bruxelles