Art contemporain

L’art du MENA

Par Olympe Lemut · L'ŒIL

Le 20 décembre 2021 - 683 mots

Retour sur le terme MENA, sa définition et les spécificités du marché de l’art qu’il englobe.

Collectionner -  MENA signifie « Middle East and North Africa » soit Moyen-Orient et Afrique du Nord. L’acronyme s’est diffusé dans les pays anglo-saxons dès 2010 selon le commissaire d’expositions Morad Montazami, qui fut le premier curateur pour le MENA à la Tate Modern (Londres). Cette appellation cache des nuances : « Cela regroupe le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, mais selon les usages l’Iran, voire l’Afghanistan peuvent y être intégrés », analyse le curateur, qui ajoute que, depuis le Printemps arabe de 2011, les productions artistiques de la région ont gagné en visibilité et en cohérence.

Du Maroc à l’Iran en passant par Israël, l’art du MENA se caractérise, entre autres, par la géométrie et les motifs issus des arts traditionnels islamiques. Mais les artistes actuels présentent une grande diversité de pratiques artistiques, jusqu’à la vidéo et les installations, là où la génération précédente privilégiait la peinture. Souvent formées à l’étranger, les artistes du MENA sont aussi marqués par l’exil et les tensions géopolitiques.

Fondatrice de Menart Fair, foire spécialisée dans l’art de la région, Laure d’Hauteville distingue les artistes du Maghreb, nourris des « influences culturelles euro-méditerranéennes, africaines et arabes », de ceux du Proche-Orient, « confrontés aux enjeux de mémoire ».

Fort du soutien de certains pays (Maroc, Émirats arabes unis, Liban), le MENA connaît aujourd’hui un boom sur le marché de l’art et dans les collections muséales françaises. Laure d’Hauteville souligne d’ailleurs le retard pris en France en la matière, aujourd’hui presque comblé : « En France, il y a des foires dites “de niche”, spécialisées sur l’Afrique ou l’Asie, mais rien n’avait encore été fait sur le Moyen-Orient. Voilà pourquoi j’ai créé Menart Fair en mai dernier à Paris, dédiée aux artistes du MENA représentés par leurs galeries. »

5 000 à 7 000 €

1. KHALED BEN SLIMANE
Après des études d’art à Tunis, l’artiste (né en 1951) commence à produire des œuvres imprégnées de spiritualité soufie, la branche mystique de l’islam. Il intègre souvent des citations calligraphiées du Coran dans ses dessins et ses céramiques. Son travail tout en finesse s’appuie sur les traditions artistiques arabes combinées à des influences méditerranéennes antiques et asiatiques. La céramique reste son support de prédilection et lui a valu une reconnaissance internationale jusqu’au Japon, où il expose régulièrement.


12 000 €

2. MOHAMED LEKLETI
Installé depuis 1987 à Montpellier, Mohamed Lekleti est né en 1965 à Taza (Maroc). Son œuvre se caractérise par une combinaison d’éléments figuratifs, voire narratifs, avec des symboles et formes abstraites, non sans humour. Situations absurdes et distorsions de l’espace créent dans ses dessins et peintures un récit proche de la mythologie. Son travail bénéficie d’une large reconnaissance en France (Cnap, IMA, foire AKAA) et à l’international, notamment au Maroc (Maacal).


104 000 €

3. HUGUETTE CALAND
Fille du premier président du Liban après l’indépendance, Huguette Caland (1931-2019) commence à peindre dès l’adolescence. Elle quitte son mari en 1970 pour venir à Paris où elle réalise des séries de peintures érotiques. En 1987, elle émigre aux États-Unis, où elle expose régulièrement ses toiles et dessins à la limite de l’abstraction. Entre paysage et figuration, elle explore toute une palette de tonalités chaudes. Découverte sur le tard en Europe, elle a été exposée à la Biennale de Venise en 2017.


Environ 32 000 €

4. SHIRIN NESHAT
Née en 1957, à Qazvin (Iran), dans un milieu intellectuel, Shirin Neshat étudie à l’université de Berkeley en 1975. Elle rentre en Iran en 1990 et c’est un déclic pour sa créativité : à travers la vidéo et la photographie retouchée, elle explore les archétypes de la société iranienne (relations hommes-femmes, poids de la religion). La calligraphie occupe une grande place dans son travail, alliée à une esthétique où domine le noir et blanc. Ses œuvres ont soulevé de vives polémiques en Iran et l’artiste a dû retourner vivre aux États-Unis. Elle a remporté de nombreux prix, notamment en 1999 à la Biennale de Venise et, en 2017, le Praemium Imperiale au Japon. Des œuvres équivalentes sont adjugées environ 40 000 € en ventes publiques.

Menart Fair,
du 21 au 23 janvier 2022. Cornette de Saint Cyr, chaussée de Charleroi 89, Bruxelles (Belgique), menart-fair.com

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°750 du 1 janvier 2022, avec le titre suivant : L’art du MENA

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