Reconnaissant son importance dans le financement de la vie culturelle, un rapport du Sénat suggère quelques modifications du texte, à la marge.
Paris. La loi Aillagon sur le mécénat est un bon outil mais, quinze ans après sa promulgation (le 1er août 2003), des questions et inquiétudes se font jour. C’est ce qui ressort d’un rapport présenté en juillet dernier devant la commission de la culture du Sénat, rapport issu d’une mission d’information présidée par Maryvonne Blondin, sénatrice (PS) du Finistère. Alain Schmitz, le rapporteur (LR) a expliqué à ses collègues « combien cette manne financière était particulièrement utile pour les acteurs culturels dans la période actuelle marquée par une baisse des financements publics ».
Pour autant, le rapport ne cesse de balancer entre satisfecit et doutes. Ainsi, après avoir rappelé que ce dispositif particulièrement avantageux pour les donateurs – au point de représenter 930 millions d’euros de dépenses fiscales en 2016 –, il relève, s’appuyant sur les estimations de l’Admical (Association pour le développement du mécénat industriel et commercial), que la culture est passé au second rang des donations derrière celles effectuées dans le champ social. Il s’agace d’ailleurs que l’on ne dispose pas de chiffres plus précis. Au passage, on apprend que la Cour des comptes doit prochainement remettre un rapport sur ce sujet. Plus encore, le rapport évoque de possibles dérives de la part de fondations qui portent le nom du groupe industriel qui les ont créées, à l’image de la maison Louis Vuitton, qui profite de ces déductions fiscales : « Cette pratique interpelle […], au regard tant des moyens financiers de ces grands groupes que des gains qu’ils en retirent en termes d’image de marque. » Tout en soulignant avec beaucoup de prudence – afin de pas se fâcher avec ces groupes – qu’« il faut néanmoins reconnaître que l’action de ces fondations culturelles est bénéfique tant pour l’offre culturelle que pour le rayonnement culturel de la France ».
Les sénateurs s’inquiètent également de la diminution de l’assiette de l’ISF (impôt de solidarité sur la fortune), transformé en impôt sur la fortune immobilière (IFI), qui a provoqué une diminution des dons déductibles de cet impôt. Selon le rapport, les premières analyses effectuées en juillet font apparaître une baisse de 60 %. Les sénateurs se demandent même si la mise en place du prélèvement à la source ne va pas ralentir les dons. Ils en profitent pour regretter la disparition de la « réserve parlementaire », qui permettait à chaque élu de distribuer de l’argent à des associations culturelles locales.
Les parlementaires vont cependant au-delà de constatations au demeurant connues et formulent quelques propositions, elles aussi parfois envisagées. Traditionnellement proches des régions, les sénateurs relèvent qu’il existe un réservoir important de donateurs potentiels dans les entreprises situées hors de Paris et les petites et moyennes entreprises. Ils recommandent de développer les clubs de mécènes sous l’égide des collectivités territoriales, car ceux-ci permettent aux entreprises participantes de se créer un réseau. Enfin ils proposent de mieux faire connaître le mécénat de compétence, une alternative parfois pertinente au don en argent.
Dans sa grande sagesse, le rapporteur conclut qu’« à titre personnel, [il] en vien[t] presque à penser qu’il vaudrait mieux ne rien toucher, en l’état actuel, à la loi Aillagon, fût-ce d’une main tremblante, mais juste à veiller à son maintien, tant elle est fondamentale dans le paysage culturel français ». Tout est dit.
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Les sénateurs font le bilan des 15 ans de la loi Aillagon
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°507 du 21 septembre 2018, avec le titre suivant : Les sénateurs font le bilan des 15 ans de la loi Aillagon