BERLIN / ALLEMAGNE
Selon le président de la Fondation du patrimoine culturel de Prusse, qui gère les Musées d’État de Berlin, les problèmes budgétaires devraient perdurer dans les années à venir.
BERLIN - En 2016, 5 millions d’euros manquent à l’appel, et la situation empirera en 2017, a déclaré Hermann Parzinger, président de la Fondation du patrimoine culturel de Prusse (Stiftung Preußischer Kulturbesitz, SPK) lors de sa conférence de presse annuelle. La Fondation gère la Bibliothèque d’État (Staatsbibliothek), mais aussi les quinze musées d’État de Berlin, parmi lesquels ceux de l’Île aux Musées et de la Nationalgalerie.
La fondation a prévu pour 2016 un budget de 289 millions d’euros au total, qui se décompose en deux parties distinctes. La SPK dispose d’un budget substantiel pour la construction et la rénovation des bâtiments, doté de 106 millions d’euros, issus du budget fédéral. Le budget de fonctionnement s’élève quant à lui à 183 millions. Il est financé en majeure partie par les contributions de la Fédération (118 millions d’euros) et des Länder (39 millions), ce qui représente en 2016 une augmentation de 7 millions. « Ce n’est pas une petite somme et nous en sommes reconnaissants », déclare Hermann Parzinger. Mais il ajoute qu’il manque cette année 5 millions, et que la situation empirera en 2017 : 15 à 17 millions d’euros pourraient à terme faire défaut. « Il en résulte un sous-financement structurel », conclut-il.
Coûts de personnels
Comment cette crise financière s’explique-t-elle ? Elle résulte de plusieurs facteurs. Tout d’abord, la SPK doit faire face à la mise en place du salaire minimum en Allemagne, ce qui augmente considérablement le coût des personnels de surveillance. Ce service est externalisé à une entreprise privée. Parallèlement, les coûts de personnels de la fondation ont également augmenté à la suite d’une renégociation des accords de branche qui régissent les salaires. La Fondation subit aussi les conséquences du gel de son budget entre 2000 et 2009. Elle est ainsi confrontée à un système informatique désuet. Le Bundestag allemand a dû allouer en urgence dans son correctif budgétaire 3 millions d’euros supplémentaires pour la mise à jour de l’infrastructure informatique.
Par ailleurs, corollaire de l’important budget alloué à la construction, les conséquences financières de la création de nouveaux bâtiments sont souvent sous-évaluées. Par exemple, d’ici à 2019, 24 000 artefacts des musées d’ethnologie et d’art asiatique déménageront dans le Humboldt-Forum, le centre culturel du « château de Berlin », en cours de reconstruction. La fondation évalue le coût de ce déménagement à 32 millions d’euros, somme qui n’est ni financée, ni programmée. De nouveau, le Bundestag a débloqué 2 millions d’euros dans la loi de correctif budgétaire pour 2016, afin de préparer le déménagement, y compris la restauration des artefacts.
Au-delà de 2017, « la situation reste critique », prévient Hermann Parzinger. En effet, l’inauguration d’une nouvelle galerie d’accueil du public, la création d’une nouvelle aile dans le Musée de Pergame, la construction du « musée d’art du XXe siècle » entraîneront mathématiquement une hausse des coûts de fonctionnement. Le président serait déjà en négociation avec les autorités. Mais il ne compte pas seulement sur les politiques. Depuis plus d’une décennie, la part des recettes commerciales de la SPK est en constante augmentation, se réjouit Hermann Parzinger. En 2015, les revenus se sont élevés à 29 millions, grâce aux recettes découlant de l’utilisation de la bibliothèque, de la billetterie, des visites guidées et du merchandising. Les Musées d’État de Berlin sont en effet parvenus à stabiliser leur fréquentation en 2015, en accueillant près de 4 millions de visiteurs. « Une surprise », s’est réjoui le directeur général des musées, Michael Eissenhauer, « malgré cette période où jamais autant de musées n’ont été fermés ». Une programmation de qualité, avec par exemple les expositions consacrées à l’impressionnisme et l’expressionnisme (« ImEX », Alte Nationalgalerie) et à « La Renaissance de Botticelli » (Gemäldegalerie), a pu compenser la baisse drastique du nombre de visiteurs induite par la fermeture de la Neue Nationalgalerie et celle partielle du Musée de Pergame.
Suppression de postes
La SPK est confrontée à un délicat numéro d’équilibriste : si la crise financière suppose une réduction de la programmation, celle-ci est nécessaire pour maintenir le niveau de ses revenus. Par ailleurs, la Fondation « économise brutalement ». La Bibliothèque d’État a dû diminuer ses coûts de personnels en 2015, et ce sera au tour des musées cette année. Ainsi, pour pouvoir financer un poste de conservateur chargé des peintures hollandaises, le poste de directeur de la Gemäldegalerie ne sera pas remplacé, mais ses fonctions seront assurées pour une durée de trois ans par Michael Eissenhauer, en sus de ses fonctions de directeur des Musées d’État de Berlin.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Les musées de Berlin en difficulté financière
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Projection de la future Ile aux musées de Berlin, avec le parcours imaginé pour la promenade archéologique. © SPK / ART COM, 2015.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°451 du 19 février 2016, avec le titre suivant : Les musées de Berlin en difficulté financière