Emmanuel Macron a rendu publiques ses rares propositions pour la culture dont se distingue essentiellement le thème du métavers.
Paris. À quelques jours du premier tour, et à mesure que l’opinion publique et les médias sont moins sidérés par la guerre en Ukraine, les nombreux débats télévisés et interviews des candidats redonnent un peu d’air à une campagne qui ne passionne pas grand monde.
Ce désintérêt s’explique aussi en partie par le sentiment que les jeux sont faits et qu’Emmanuel Macron va être réélu. Malgré ses dénégations, le président lui-même en est convaincu et avance peu de propositions, si ce n’est une méthode transformée en slogan : associer les Français à la mise en œuvre des moyens de l’État (« Avec vous »).
Son programme culturel est particulièrement chiche : il ne comporte que trois engagements. Et encore, deux d’entre eux n’en sont pas réellement. Emmanuel Macron propose ainsi « de nouvelles commandes publiques artistiques à travers la France pour soutenir les jeunes créateurs ». Faut-il comprendre que la grande commande lancée tout récemment (« Mondes nouveaux ») sera dotée d’une nouvelle enveloppe au-delà des 30 millions d’euros déjà alloués ?
La deuxième promesse est déjà réalisée puisqu’il s’agit d’étendre le Pass culture aux plus jeunes. S’il est vrai que cette extension du Pass ne figurait pas dans son programme de 2017, elle a été réalisée en janvier 2022 avec l’ouverture au 14-17 ans dans le cadre du collège et du lycée.
La troisième proposition est plus originale, en tout cas inédite : « Un investissement pour construire des métavers européens et proposer des expériences en réalité virtuelle, autour de nos musées, de notre patrimoine et de nouvelles créations, en protégeant les droits d’auteur et droits voisins. » Alors qu’Éric Zemmour a fait une curieuse incursion – il est le seul – dans les nouvelles technologies (avec la fiscalité des NFT), Emmanuel Macron est le premier à évoquer le métavers, cet univers virtuel pour lequel les Gafam [les cinq firmes américaines du numérique] investissent des milliards de dollars afin d’en établir, et donc contrôler, les normes. Ici, le candidat est cohérent avec son mandat, ayant toujours revendiqué la souveraineté européenne dans bien des domaines, en particulier dans la culture (cinéma et séries).
Il s’agit bien de ne pas laisser aux entreprises américaines le contrôle de l’univers virtuel parallèle car il ne saurait y en avoir plusieurs à l’instar des systèmes d’exploitation dans les smartphones où Apple et Google se partagent le marché occidental. Mettons de côté le débat sur les perspectives – psychologiquement effrayantes – de ce monde virtuel qui permettrait à chacun de se créer un avatar numérique et de jouer à des jeux, converser avec d’autres, acheter des produits numériques et consommer de la culture. Des marques de luxe, des artistes, des maisons de ventes ont déjà mis un pied dans ce monde et il fort probable que dans les prochains mois des musées et lieux patrimoniaux créent aussi leur avatar. Il n’est donc pas incongru qu’un président de la République s’y intéresse, notamment s’agissant des conséquences sur le droit d’auteur. De là en faire un argument de campagne, c’est pour le moins étonnant.
Mais au fond, ce n’est pas surprenant que le président avance si peu de propositions ; son programme culturel, s’il est réélu, ressemblera beaucoup à ses engagements de 2017. Mais le reconnaître, c’est d’une certaine façon laisser penser qu’ils ne sont pas tenus.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
La culture en campagne (7/7)
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°586 du 1 avril 2022, avec le titre suivant : La culture en campagne (7/7)