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Les musées de Paris en 2020

Paris Musées vient de signer avec la Ville son deuxième contrat d’objectifs et de performances, dessinant en une centaine de points le visage des 14 musées municipaux en 2020.

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 11 octobre 2016 - 1204 mots

PARIS

L’établissement public qui regroupe depuis 2012 les 14 musées de la Ville de Paris vient de signer son deuxième contrat d’objectifs et de performances avec la municipalité pour la période 2016-2020. Ce document stratégique définit en une centaine d’objectifs précis, répartis en cinq axes, un projet ambitieux pour des lieux qui souffrent encore d’un déficit de notoriété.

PARIS - Parfois critiqués pour leur lourdeur, les établissements publics, lorsqu’ils regroupent plusieurs musées présentent pourtant de nombreux avantages, dont celui d’offrir un front uni et un seul interlocuteur à la tutelle. C’est particulièrement vrai pour les quatorze musées de la Ville de Paris réunis depuis 2012 dans une structure commune dirigée par Delphine Lévy et qui jouit d’une proximité plus forte que par le passé avec les élus décideurs. Après avoir conclu un premier contrat d’objectifs et de performances, celle-ci vient de signer un nouveau contrat pour la période 2016-2020 qui lui permet de mieux plaider la cause des quatorze musées tout en disposant d’une méthode commune pour atteindre la centaine d’objectifs répartis en cinq axes. « Nous sommes heureux d’avoir cette feuille de route, signée par Anne Hidalgo et Bruno Julliard, président de Paris Musées, qui témoigne ainsi de la place importante que la municipalité accorde à ses musées », se réjouit la présidente. Dans le passé on a souvent reproché à Bertrand Delanoë un intérêt plus grand pour les nouveaux équipements tels que le 104 ou la Gaîté lyrique que pour « ses » musées.

L’objectif le plus spectaculaire, sinon le plus coûteux, de ce contrat qui est calé sur la mandature d’Anne Hidalgo, est le plan de rénovation des musées d’un montant d’environ 100 millions d’euros. Un montant comparable aux travaux menés sur la dernière mandature Jean Tiberi et le premier mandat de Bertrand Delanoë (Petit Palais, Cernuschi). Une dizaine d’opérations seront menées, dont les plus importantes sont la rénovation du Musée Carnavalet qui a fermé le 2 octobre dernier pour une réouverture en 2020, le déménagement du confidentiel Musée Jean Moulin, si mal installé sur la dalle de la gare Montparnasse, et qui s’installera le 25 août 2019 (anniversaire de la libération de Paris) dans l’un des pavillons Ledoux de la place Denfert-Rochereau, ainsi que plusieurs travaux réalisés par tranches au Musée d’art moderne. « Ce ne sont pas des chantiers pharaoniques, Anne Hidalgo veut de l’efficacité et de la sobriété dans tous les projets architecturaux de la Ville, il s’agit avant tout d’améliorer la qualité de la visite et la mise en valeur des œuvres pour le public », précise la présidente. Une sobriété également environnementale puisque le contrat prévoit de baisser de 2 % chaque année la consommation des fluides.

Priorité au chantier des collections
Si importants soient-ils, ces travaux ne figurent qu’au quatrième rang dans le contrat, le premier étant occupé par la mise en valeur des collections « c’est une vraie rupture avec le passé, explique Delphine Lévy, avant, [entendez avant l’établissement public], l’inventaire n’avançait pas, les collections n’étaient pas mises en ligne, il y avait peu de réaccrochage des collections, les efforts portaient surtout sur les expositions temporaires ». Aujourd’hui encore sur le million d’œuvres appartenant aux musées, seuls 500 000 ont été inventoriées. Et avec les travaux du Musée Carnavalet il y a urgence : « Nous devons inventorier (seuls 20 % des œuvres l’étaient en 2013), récoler, conditionner, restaurer si nécessaire, informatiser 610 000 œuvres. Une grande partie de ce chantier doit se terminer avant le déménagement qui s’achève début 2017. Certaines opérations se poursuivront jusqu’à la réouverture de Carnavalet. Nous avons par ailleurs pour objectif de mettre 600 000 œuvres des musées de la Ville en ligne d’ici 2020 », explique Delphine Lévy. L’objectif d’achèvement des inventaires et des récolements ont été déclinés musée par musée et conservateur par conservateur, avec des renforts en vacataires et prestataires extérieurs. Éclatés en plusieurs lieux, les réserves aujourd’hui saturées feront l’objet d’une réflexion en 2017 et la solution retenue sera mise en œuvre (et financée !) dans la mandature suivante.

La programmation figure naturellement dans les priorités, d’autant que « c’est un de nos points forts » revendique la présidente. Un récent colloque à l’INHA sur les expositions des musées municipaux parisiens a conclu que « celles-ci ont été dans le passé souvent plus pointues, décalées et portant sur des sujets parfois plus sensibles que celles des musées d’État », précise-t-elle, et d’ajouter : « Nous voulons garder cette identité et cette liberté, mais nous nous sommes donnés également deux priorités : confier  davantage de clefs de compréhension au public et valoriser nos expositions à l’étranger par des coproductions et des itinérances. » Et ce ne sont pas que des clauses de style. Si les musées conservent une certaine indépendance sur le thème de la vingtaine d’expositions annuelles (« dont au moins une grande exposition accueillant plus de 200 000 visiteurs pour les grands musées »), les conservateurs-commissaires sont priés d’indiquer dans la fiche préparatoire de l’exposition les moyens mis en œuvre pour faciliter la compréhension par le public.

Le public au centre des préoccupations
Car le public reste la finalité des objectifs précédents. Quantitativement, même si les musées municipaux sont moins affectés par la chute des entrées après les attentats (seulement -2,5 % de visiteurs en moins de janvier à août) il sera difficile d’augmenter la fréquentation dans les quatre années à venir, compte tenu des fermetures de musée pour travaux. Aussi le contrat ambitionne-t-il simplement de rester au-dessus des 3 millions de visiteurs. Mais il y a des marges de progression pour compenser l’effet périmètre. Par exemple la notoriété : « Nous n’avons pas encore atteint notre plein potentiel, les musées de la Ville ne sont pas assez connus du grand public, et parfois confondus avec d’autres musées parisiens. Il y a encore des actions à développer pour renforcer la notoriété de chacun et faire connaître la qualité de la programmation et la richesse des collections », explique la présidente qui veut poursuivre les efforts de communication à la fois vers les parisiens et les touristes. La gratuité ? « Ce n’est pas un sujet d’actualité, dit-elle, c’est un enjeu politique qui relève de la Ville de Paris, aucune évolution n’est mentionnée dans ce contrat. » Un chiffre montre que la gratuité n’est pas encore acquise dans l’esprit et la pratique du public : en 2015, les visiteurs payants des expositions temporaires sont supérieurs de 22 % aux visiteurs gratuits des collections gratuites. À défaut de dépasser les 3,1 millions de visiteurs de 2015, le contrat se donne comme objectifs de développer l’accès des publics du champ social, et d’augmenter d’un point chaque année le taux de visiteurs, d’ouvriers et employés (aujourd’hui de 13 %).

Sur la centaine d’objectifs que compte le contrat, un bon quart concerne le personnel et la gestion de l’établissement public (formation, autofinancement..) dont des sujets qui ne sont pas toujours pris en compte dans ce type de plan, par exemple l’absentéisme qui est aujourd’hui de 7,6 %. Confiant dans ses réalisations et sa stratégie, Paris Musées se dit maintenant prêt à sortir de son périmètre, comme il le fait en ouvrant la production d’ouvrages à d’autres éditions que celles liées à ses musées, voire à prendre en gestion d’autres lieux.

Légende photo

Le musée Carnavalet. © Photo : François Grunberg.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°465 du 14 octobre 2016, avec le titre suivant : Les musées de Paris en 2020

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