PARIS
La sculpture qui orne une tombe au cimetière du Montparnasse est actuellement protégée par un coffrage en bois. Pour combien de temps encore ?
Nombreux sont les visiteurs qui se rendaient au cimetière du Montparnasse pour admirer Le Baiser de Constantin Brancusi, la sculpture en pierre qui orne la sépulture de Tatiana Rachewskaia, jeune femme russe décédée en 1910. Mais depuis 2018, l’œuvre est recouverte d’un grand coffrage en bois la rendant invisible [voir ill.]. Un panneau, posé sur la tombe, souligne l’« interdiction absolue de s’approcher et de toucher la sépulture » tandis qu’un second, vissé au mur du cimetière, indique que la sculpture est placée sous vidéosurveillance. Trois caméras veillent sur elle jour et nuit.
Ces nombreuses mesures de sécurité visent à protéger la sculpture des risques de dégradation causés par les éléments naturels mais aussi du vol et du vandalisme. Elles ont été mises en place par les ayants droit de Tatiana Rachewskaia, qui, accompagnés du marchand d’art Guillaume Duhamel essaient depuis 2005 d’obtenir l’autorisation de désolidariser la sculpture pour la vendre. On comprend leur intérêt et les mesures de protection prises : l’œuvre du sculpteur roumain Constantin Brancusi vaudrait au moins 50 millions d’euros.
La sculpture et l’intégralité de la tombe ont été inscrites en 2010 sous le régime de la protection des monuments historiques appliquée aux immeubles par nature, ce qui rend impossible sa séparation de la sépulture, une impossibilité récemment confirmée par le Conseil d’État. Cette décision avait été contestée en justice par les ayants droit. D’après Me Isabelle Robert-Védie, leur avocate, ces derniers souhaitaient que la sculpture soit protégée en tant qu’objet mobilier au titre des monuments historiques : cela aurait permis de désolidariser la sculpture de son socle, mais pas de l’exporter. Les ayants droit se seraient rapprochés à plusieurs reprises du ministère de la Culture afin que la sculpture soit placée en lieu sûr – par exemple, dans un musée – mais aucun accord n’aurait abouti.
Selon Guillaume Duhamel, les héritiers n’ont pas les moyens d’entretenir et de protéger la sculpture. Or, selon l’avocate, des experts avaient estimé que la conception même de la sculpture ne lui permettait pas de résister au temps si elle demeurait à l’extérieur. Le bloc sculpté se compose d’arêtes qui risquent de s’émousser au fil du temps, ce qui mènerait, à terme, à la disparition du relief de la sculpture. Un rapport soulignerait la présence de mousse et des signes d’érosion. L’actuelle boîte en bois ne représente ainsi qu’une solution de protection temporaire. À ce jour, aucune indication n’a été donnée par le ministère de la Culture s’agissant d’éventuelles mesures de protection de l’œuvre.
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L’avenir incertain du « Baiser » de Brancusi
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°578 du 26 novembre 2021, avec le titre suivant : L’avenir incertain du « Baiser » de Brancusi