PARIS
La Fiac suit la tendance en s’ouvrant aux nouvelles scènes artistiques. Pourtant, un rapide examen de sa liste d’exposants montre que la foire est loin d’être représentative de la mondialisation.
Longtemps, la scène internationale de l’art contemporain s’est cantonnée à un axe unique, exclusivement occidental, dominé par les jeux de relations entre l’Europe et le continent américain, exception faite du Japon qui s’y est inscrit dès les années 1950. Depuis lors, le monde artistique a changé à grande vitesse pour s’ouvrir à toutes sortes de nouvelles scènes artistiques et s’enrichir de tout un ensemble de productions inédites. Les institutions puis le marché de l’art n’ont pas tardé à s’en faire l’écho, entraînant dans leur foulée les grandes foires internationales. Paris, New York, Londres, Berlin, etc. se sont imposées au fil du temps et de l’histoire comme les capitales incontournables de l’art contemporain puis sont arrivées des scènes nationales telles l’Amérique du Sud, la Chine, l’Inde, l’Europe de l’Est, les Émirats arabes unis, etc., voire certains foyers urbains comme Pékin, Dubaï, Los Angeles, Mexico ou Singapour.
Chine, Inde, États-Unis… un savant déséquilibre
De ces mouvements, de cette circulation, de ce déploiement à l’échelle planétaire, les foires internationales d’art contemporain sont les sismographes. À l’instar de ses semblables, la Fiac en est un. Aussi l’analyse de la liste de ses participants est-elle révélatrice de sa volonté à l’ouverture en direction des scènes émergentes. Une brève étude permet de relever que c’est surtout à partir de la fin des années 2000, en quête d’une redéfinition de ses choix sélectifs, qu’elle s’est de plus en plus ouverte vers ces dernières. Ainsi, la Chine est l’un des pays dont la présence à la Fiac est la plus régulière ces huit dernières années, ce qui est le parfait miroir de l’éveil de cette nation, comme on le sait. En revanche, tel n’est pas le cas de l’Inde qui connaît pourtant un développement similaire à la Chine et a déjà bénéficié, par ailleurs, d’une certaine reconnaissance du monde de l’art tant institutionnel que privé. Par ailleurs, on observe que depuis 2009 la Fiac s’est surtout tournée vers la côte ouest américaine – Los Angeles quasi exclusivement –, Mexico et São Paulo. Si, ponctuellement, elle a accueilli des galeries originaires d’horizons aussi divers qu’Istanbul, Séoul, Johannesburg, Cluj-Napoca (Roumanie), Dubaï ou Djeddah (Arabie saoudite), ce n’est jamais qu’à une ou deux unités près.
Des 23 pays que compte le cru 2015 de la Fiac, l’Europe domine haut la main la foire avec 121 galeries sur 175, suivie des Amériques du Nord et du Sud avec 45 galeries, dont 35 des États-Unis. Viennent beaucoup plus loin l’Asie avec 7 galeries et l’Afrique avec seulement 2. Il est donc bien difficile de parler d’ouverture particulière à une scène émergente, sinon à considérer que la scène de Los Angeles est avantageusement représentée non seulement par quelques galeries qui en viennent directement mais par un certain nombre d’artistes représentés par des galeries d’autres pays. La côte ouest des États-Unis connaît de fait depuis plusieurs années un vrai regain de vitalité. Comme le dit Anne de Conninck, « une nouvelle concentration d’artistes, de jeunes collectionneurs et de galeries revitalise la ville et en fait une porte ouverte vers l’Asie. » De plus, l’active effervescence des institutions et la grande visibilité d’artistes phares tels que Baldessari, McCarthy, Mike Kelley, Allen Ruppersberg, Martha Rosler, etc., y contribuent efficacement. Cela rebondit en énergie sur la production artistique, toutes pratiques confondues, comme on peut le voir à la Fiac sur les stands des galeries Cherry and Martin, François Ghebaly, Matthews Marks, Overduin & Co. et Regen Projects.
À voir absolument Chen Xiaoyun
Photographe et vidéaste, Chen Xiaoyun (né en 1971) réalise des œuvres qui puisent leurs sources dans des anecdotes du quotidien dont il transcende les éléments narratifs pour faire valoir leur dimension universelle. Elles procèdent d’une grande économie de moyens et d’une poétique raffinée et abstraite qui ne manque pas parfois d’humour [Galerie Shangart, Shanghai].
À voir absolument Rana Begum
Les sculptures de Rana Begum (née en 1977), originaire du Bangladesh, se déclinent à l’ordre de formes géométriques qui jouent volontiers de couleurs pastel. Les unes sont faites du pliage de plaques d’acier doux, peintes et vernissées ; les autres, de modules en relief peints sur aluminium thermolaqué. Une poésie minimaliste [Galerie The Third Line, Dubaï, EAU].
À voir absolument Sayre Gomez
Les peintures de Sayre Gomez (née en 1982) sont soit nimbées d’une couleur monochrome, tel un bleu façon Yves Klein, soit produites de la superposition de deux ou trois tons différents. Ces variations chromatiques noient leurs motifs paysagers ou objectifs dans une troublante luminosité qui les immatérialise [Galerie François Ghebaly].
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Une vraie fausse ouverture aux nouvelles scènes
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°683 du 1 octobre 2015, avec le titre suivant : Une vraie fausse ouverture aux nouvelles scènes