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Une « nouvelle vision » de John Craven

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 19 février 2021 - 425 mots

PARIS

La Galerie Berthet-Aittouarès expose les tirages d’époque qu’il réalisa dans les années 1950 sur les raffineries de pétrole.

Paris. John Craven n’avait pas été montré depuis 2005, date de l’exposition à la galerie Berthet-Aittouarès de ses photographies des années 1950 sur l’industrie pétrolière en Afrique et en France. À la faveur du festival Photo Saint-Germain, Odile et Michèle Aittouarès ont demandé à Savage, un collectif de cinq commissaires indépendants, de présenter à nouveau cette série réalisée pour le compte d’une compagnie pétrolière, tout en menant l’enquête sur cette personnalité oubliée du monde de l’art qui ne fut pas que photographe.

De l’itinéraire de John Craven, né Louis Conte en 1912 à Digne (Alpes-de-Haute-Provence), mort en 1981, il reste en effet encore des pans entiers à découvrir ou à mieux connaître, y compris dans son travail de photographe ou de caméraman entamé aux États-Unis dans les années 1930. Tour à tour directeur à New York de La Revue de la pensée française, puis résistant sous le nom de « John Craven » et colonel de renseignement pour les services secrets britanniques, le galeriste qu’il fut également à Paris (d’abord au 5, rue des Beaux-Arts, puis rue Kléber et avenue de Messine) a été un ardent défenseur de la nouvelle école de Paris ainsi que d’Émile Gilioli, de Jean Fautrier, Jean Dubuffet et de l’art africain.

L’éventail de ces choix, bien plus large si l’on y incorpore Hans Hartung, Serge Poliakoff, Nicolas de Staël ou Henry Laurens, se retrouve dans la diversité des approches esthétiques de ses reportages. En photographie, John Craven ne s’est jamais cantonné à un seul genre ni à une seule conception. La quarantaine de clichés noir et blanc exposés rue de Seine, tirés par Craven lui-même, témoignent de points de vue formels et picturaux découlant de la Nouvelle Vision ou de l’abstraction plus que de la photographie documentaire, celle qui prévaudra en 1967 dans son livre 200 millions d’Américains (éd. Hachette), récompensé par le prix Nadar, un Lion d’or à la Biennale de Venise et le prix Lénine de Moscou. Le thème de la machinerie de l’industrie pétrolière et ses rouages, de l’extraction à la raffinerie en passant par le transport, domine dans cette série d’images, objet en 1958 d’une exposition intitulée « Le fantastique monde du pétrole » et d’un catalogue préfacé par Jean Giono sous le titre La Beauté terrible. Issus d’une collection privée, ces tirages d’époque, affichés entre 2 800 à 4 000 euros, nous projettent, plus de cinquante ans plus tard, dans un univers étrange, opaque, qui ne pouvait que ravir John Craven.

John Craven, la beauté terrible,
jusqu’au 7 février, Galerie Berthet-Aittouarès, 29, rue de Seine, 75006 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°560 du 5 février 2021, avec le titre suivant : Une « nouvelle vision » de John Craven

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