Malgré une édition de qualité et de nombreuses transactions conclues, un défi reste à relever : trouver de nouvelles générations d’acheteurs.
Paris. C’est sous une chaleur écrasante que le Parcours des mondes, la manifestation consacrée aux arts d’Afrique et d’Océanie – qui réunissait cette année 58 exposants au cœur de Paris –, s’est clos le 10 septembre. Tous les participants, dont ceux qui aimeraient que la manifestation se déroule un peu plus tard en septembre, se sont réjouis d’avoir vu beaucoup d’étrangers. « Il y avait notamment plus d’Américains que l’an passé, tandis que les Australiens qui n’étaient pas là l’année dernière étaient bel et bien de retour », a remarqué Julien Flak, précisant avoir très bien vendu (entre 5 000 et 100 000 €), dont ses plus beaux objets Eskimo. De nombreuses institutions avaient fait le déplacement, à l’instar du Metropolitan Museum of Art (MET), du Cleveland Museum of Art, du Detroit Institute of Art, du Musée de Leipzig ou encore du Quai Branly - Jacques Chirac (moins loin).
S’il est toujours difficile de mesurer le niveau des transactions dans ce genre de salon – comme dans tous les salons d’ailleurs –, on constate que ceux qui avaient programmé une exposition thématique, avec de beaux objets et à des prix attractifs, ont été davantage récompensés. Ainsi, la galerie bruxelloise Grusenmeyer Woliner, qui n’avait plus participé au Parcours depuis six ans, a visé juste avec son exposition « Frozen Magic », sur l’art ancien de Sibérie, qui a nécessité dix ans de travail. « Nous avons vendu 40 % des objets présentés, entre 1 500 et plus de 100 000 euros. Les Américains et les Anglais ont beaucoup acheté chez nous », a précisé Damien Woliner. Majoritairement en bronze, les pièces d’une grande fantaisie allaient du VIe au XIIe siècle.
Olivier Castellano a également fait sensation avec son exposition « Nyama [énergie vitale qui existe en chacun des êtres vivants], l’art des savanes d’Afrique de l’Ouest », composée d’une cinquantaine d’objets, du XIIe au XXe siècle, provenant du Mali et des ethnies frontalières, patiemment rassemblés pendant vingt-cinq ans. « L’exposition a été un gros succès avec beaucoup de ventes. Les collectionneurs ne pensaient pas que j’avais rassemblé une telle collection, avec “archaïsme” pour maître-mot », a confié le marchand, sans toutefois vouloir révéler le nombre de transactions, ni les prix « par crainte de jalousies ».
Mention spéciale à Marguerite de Sabran qui participait pour la première fois à la manifestation depuis son installation rive gauche, en 2018, après quinze ans passés chez Sotheby’s. Très discrète – elle officie en chambre (expertise, accompagnement des collectionneurs, enseignement, achat, vente) –, elle avait pris le parti d’exposer peu de pièces mais toutes soigneusement sélectionnées et dotées de pedigrees remarquables. Parmi elles, une statue Janus Sénufo (Côte d’Ivoire) ayant appartenu à André Malraux ; un cimier Bangwa (Cameroun), là aussi Janus, de l’ancienne collection Jacques Kerchache (vendu) ou encore un masque Yaouré (Côte d’Ivoire), provenant de Charles Ratton (vendu).
Satisfaits de cette 22e édition – très peu se sont plaints de ne pas avoir vendu –, les exposants étaient cependant nombreux à déplorer une clientèle vieillissante, qui se renouvelle peu, voire pas du tout. « Les jeunes ne s’intéressent pas à ce marché mais à des choses plus faciles, comme la photographie ou l’art contemporain », expliquait un marchand. De plus, il reste difficile d’attirer les gros collectionneurs, ceux capables d’acheter des pièces aux prix élevés. « Ils préfèrent aller à Tefaf par exemple, ou chez Christie’s et Sotheby’s. C’est plus facile que d’aller de galerie en galerie. Ils n’ont pas le courage de faire 60 boutiques », ajoutait un autre participant. « Il est ainsi compliqué de vendre des objets chers », renchérissait Pablo Touchaleaume qui montrait un ensemble de statues d’ancêtres M’Bembé, dont les prix s’échelonnaient entre 10 000 et 300 000 euros.
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Parcours des mondes, des clients actifs mais vieillissants
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°617 du 22 septembre 2023, avec le titre suivant : Parcours des mondes, des clients actifs mais vieillissants