BÂLE / SUISSE
À Bâle, le label Art Basel garantit des œuvres historiques, inédites et « validées » par les institutions. Elles sont proposées par une sélection de galeries du monde entier.
Bâle (Suisse). Les occasions d’admirer des tableaux de Pierre Bonnard en dehors des musées ne sont pas si fréquentes. Acquavella Galleries en présentera deux à Art Basel. Femme à sa toilette (le Peignoir), vers 1923, et La Chevelure d’or, 1924. Tous deux proviennent d’une collection privée et ont été présentés ce printemps par la galerie new-yorkaise dans une exposition réunissant des prêts du Guggenheim, de l’Art Institute of Chicago et de particuliers (« Bonnard : The Experience of Seeing »). Le stand d’Acquavella comportera également des peintures récentes de Damian Loeb, de Miquel Barceló et de Nicole Wittenberg, mais aussi des œuvres d’Eva Hesse, d’Ellsworth Kelly, de Picasso, de Warhol… dans un déploiement emblématique du spectre historique que la foire entend couvrir, des maîtres modernes aux artistes les plus actuels. Sans autre intention explicite que celle de proposer à un public averti des pièces importantes, voire majeures, susceptibles de constituer un bon investissement.
Ainsi les valeurs sûres ne manquent-elles pas sur la foire, depuis ces figures de l’art conceptuel ou minimal que sont Marcel Broodthaers ou Donald Judd (Peter Freeman, New York) jusqu’aux peintres de premier plan tels Georg Baselitz (Thaddaeus Ropac) ou Nicolas de Staël (Applicat-Prazan, Paris)… Sans surprise, la peinture est prédominante. La foire fait également la part belle à la sculpture et au dessin, tout en laissant un peu de place à la photographie, aux installations, aux vidéos et aux œuvres numériques, ces dernières ne cessant de progresser dans les ventes en galeries si l’on en croit le dernier rapport Art Market publié par Art Basel/UBS (de 1 % en 2021 contre 5 % l’an dernier).
Art Basel est une grande foire parce qu’elle est très internationale : tandis que les 21 nouvelles galeries admises en 2023 viennent d’Europe, d’Afrique, d’Asie, des États-Unis et d’Amérique du Sud, et que trois d’entre elles, Blank Projects (Le Cap, Afrique du Sud), Empty Gallery (Hongkong) et Offer Waterman (Londres) rentrent directement sur le secteur principal, les artistes exposés sont originaires du monde entier. Kaloki Nyamai, qui représentait le Kenya lors de la 59e Biennale de Venise en 2022, est ainsi montré pour la première fois à Bâle, par la galerie Barbara Thumm (Berlin), et il participera à la table ronde « Artist-Led Spaces : Learning from the African Continent » (espaces gérés par des artistes : apprendre du continent africain).
Les collectionneurs ont aussi l’assurance de voir des pièces inédites sur la foire suisse. La toute nouvelle série de porcelaines de Jeff Koons, aboutissement d’un processus de sept ans, est mise en avant par Pace, avec de grandes sculptures miroitantes reproduisant des figures de porcelaine et des ready-made de l’artiste. On pourra voir sur le stand de Konrad Fischer (Düsseldorf) les dernières productions de Tony Cragg, d’Edith Dekyndt, de Thomas Ruff…
Art Basel entend également offrir le meilleur de l’art contemporain. Les compositions textiles sur châssis en aluminium d’Eric N. Mack (Paula Cooper, New York), les grandes peintures d’Aaron Garber-Maikovska (Clearing, NewYork, Bruxelles), une nouvelle toile de Victor Man (Gladstone, Bruxelles)… Plus que l’émergence, c’est la caution institutionnelle qui est privilégiée, les galeries ne manquant pas de faire valoir les expositions, en cours ou à venir, de leurs artistes dans les musées. Ainsi Shirley Jaffe (1923-2016), défendue par Nathalie Obadia (Paris, Bruxelles), dont l’œuvre ne cesse de gagner en reconnaissance, comme en témoigne l’itération de son exposition personnelle au Kunstmuseum de Bâle (vue en 2022 au Centre Pompidou). Ou María Magdelena Campos-Pons, dont le grand portrait à voir sur le stand de Barbara Thumm fait partie d’une série actuellement montrée à la Biennale de Sharjah, et qui bénéficiera en septembre d’une rétrospective au Brooklyn Museum, à New York.
Deux galeries françaises se distinguent sur le secteur « Feature », désormais voué aux présentations historiques d’artistes. Christophe Gaillard vient ainsi avec des pièces de Richard Nonas (1936-2021) jamais sorties de l’atelier, des sculptures dont l’aspect usé, patiné, s’éloigne délibérément de l’esthétique minimaliste aseptisée. Tandis que la Galerie Zlotowski se concentre pour l’occasion sur la pionnière de l’abstraction Sonia Delaunay, et en particulier ses œuvres sur textile. Pour la première fois, les focus des galeries du secteur principal sont également valorisés par le label « Kabinett » : ainsi de la série des « Map/Species » (2018-2022) d’Anri Sala chez Esther Schipper ou des céramiques de Genesis Belanger chez Perrotin. On ne sera pas surpris des prix avoisinant ou dépassant le million d’euros chez plusieurs marchands, mais peut-être faut-il davantage s’étonner de trouver aussi des galeries pratiquant des tarifs plus raisonnables. Balice Hertling (Paris), qui a fait ses débuts sur « Statements » en 2019 et expose à présent dans le secteur principal, affiche des prix allant de 8 000 à 50 000 euros. Elle promeut des artistes aussi passionnantes que Ser Serpas, avec notamment une très grande encre sur textile. Et si parfois on aura une impression de déjà-vu, celle-ci pourra être compensée par une dimension à tous points de vue exceptionnelle, tel le théâtral pavillon de Markus Schinwald Panorama (2022), dévoilé à la dernière Biennale de Lyon, présenté sur « Unlimited » par Thaddaeus Ropac.
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Art Basel, un aperçu de l’édition 2023
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°613 du 9 juin 2023, avec le titre suivant : Art Basel, un aperçu de l’édition 2023