Très attendue, cette 10e édition sera révélatrice de l’attractivité de Hongkong après la longue parenthèse pandémique, et face à la concurrence accrue des autres places du marché asiatique.
Hongkong. Le nombre d’exposants, 177 galeries venues de 32 pays et territoires, est en nette hausse par rapport aux éditions d’Art Basel Hong Kong (ABHK) de 2021 (109 galeries) et 2022 (130 galeries). Cependant, la foire ne retrouve pas sa taille de 2019 (242 galeries) qui s’approchait de celle d’Art Basel en Suisse (285 participants confirmés pour juin 2023). Avec ses 70 galeries, la foire satellite Art Central (The Art Assembly) comblera opportunément l’espace du 3e étage du Hong Kong Convention & Exhibition Centre (HKCEC) qu’elle occupe depuis 2021.
Les deux tiers des galeries d’ABHK (120 sur 177) sont asiatiques. Les plus gros contingents viennent de Chine (39 galeries dont 17 hongkongaises), du Japon (24) et de Corée du Sud (12). Parmi elles, 22 sont des succursales de galeries occidentales implantées en Asie, à l’instar de Perrotin qui compte désormais plus d’espaces sur le continent (Dubaï, Hongkong, Shanghaï, Séoul et Tokyo) qu’en Europe (Paris) et aux États-Unis (New York, Las Vegas et Los Angeles).
Alors que les galeries asiatiques ne représentaient que la moitié des exposants avant la pandémie, cette proportion accrue reflète la volonté du groupe MCH d’opérer une segmentation plus nette entre ses quatre foires (Bâle, Paris, Miami et Hongkong) pour qu’elles puissent se suivre sans (trop) se ressembler, tout en offrant une expérience pertinente à ses collectionneurs internationaux.
Outre Perrotin, on dénombre une quinzaine de galeries françaises, parmi lesquelles Almine Rech, Ceysson & Bénétière, Jocelyn Wolff, Mennour et Mitterrand. Comme vingt autres galeries, Christophe Gaillard et Loevenbruck participent pour la première fois. À noter par ailleurs que six galeries se sont ajoutées à la liste officielle publiée en novembre 2022 par la foire : Chantal Crousel, Nathalie Obadia, Sadie Coles HQ, Gladstone, Gray et Union Pacific. Toutes sont des habituées d’Art Basel.
Cette participation s’explique aussi par la levée des restrictions sanitaires pour tous les voyageurs, tandis que l’obligation du port du masque vient d’être levée après 945 jours d’application ininterrompue. Autre fait marquant, Hongkong offre 500 000 billets d’avion gratuits depuis le 1er mars et pendant six mois afin de relancer son tourisme (quota disponible pour les voyageurs européens à partir de mai 2023).
Alors que les grandes maisons de ventes de Hongkong affichent d’excellentes performances, la reprise économique des galeries semble prendre plus de temps. Le bilan commercial d’ABHK permettra ainsi de statuer sur l’état actuel du premier marché.
Hongkong peut toujours compter sur sa fiscalité très avantageuse (absence de TVA et de taxes à l’importation sur les œuvres d’art), ses infrastructures (port franc, excellence logistique) et ses institutions culturelles (musée d’art M+, centres d’art Tai Kwun et Para Site, entre autres). Toutefois, cette nouvelle foire s’inscrit dans un environnement concurrentiel en mutation avec la montée en puissance de Séoul et le lancement réussi d’Art SG en janvier 2023 à Singapour. À cet égard, l’itinérance des galeries qui ont exposé lors de l’édition 2019 sans revenir en 2023 est révélatrice : certaines ont préféré miser sur Frieze Seoul (Kurimanzutto, Blum & Poe), d’autres sur Art SG (Goodman [Johannesburg], Templon), voire sur les deux (Esther Schipper, Skarstedt). Le groupe MCH a anticipé en partie ces mouvements en redevenant actionnaire minoritaire d’Art SG en 2022 (à hauteur de 15 %) tout en sponsorisant les événements satellites S.E.A. Focus (Singapour) et Tokyo Art Week (Japon).
Même le marché de l’art numérique et des NFT, pourtant très chahuté, reste convoité avec le lancement de « Kiaf Plus » à Séoul en septembre 2022 et la 2e édition de la Digital Art Fair organisée en octobre de la même année à Hongkong.
Le multilatéralisme de la foire se reflète également dans ses partenariats variés : avec la foire émiratie Art Dubaï (forum sur les cryptomonnaies) ou le festival thaïlandais d’art vidéo et de performance Ghost 2565 (section Film). Cette ouverture se ressent de même dans l’intérêt porté à d’autres formes artistiques avec la projection de Memoria, dernier film d’Apichatpong Weerasethakul (Prix du jury à Cannes en 2021), et l’exposition d’œuvres de l’ancien couturier Martin Margiela (Zeno X, Anvers), dans la foulée de son exposition au Lotte Museum de Séoul.
Malgré l’absence de la galerie Goodman, habituée de la foire, le travail d’artistes africains tel le Nigérian Victor Ehikhamenor (Retro Africa) sera mis en valeur et accompagné d’une table ronde sur l’exposition de l’art africain à Hongkong. La dimension géo-stratégique est ici évidente dans la mesure où la Chine est devenue un investisseur-clé sur tout le continent. Enfin, l’invitation des détracteurs du monde de l’art (Jerry Gogosian, Freeze Magazine et The White Pube) ajoute au pluralisme décomplexé de la foire.
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Art Basel Hong Kong : l’épicentre du marché de l’art asiatique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°607 du 17 mars 2023, avec le titre suivant : Art Basel Hong Kong : l’épicentre du marché de l’art asiatique