Raoul Dufy, son éclairante relecture

Peut-être le temps est-il venu d’une nécessaire relecture de l’histoire de l’art moderne telle qu’elle s’écrivait au jour le jour au siècle dernier. Le recul qui tout juste s’amorce permet de porter un regard renouvelé, délivré des scories des modes successives et des émerveillements parfois peu exigeants face aux extraordinaires audaces stylistiques et/ou conceptuelles de nombreux artistes du xxe siècle.

Dufy se prête tout particulièrement à ce réexamen, tant sont nombreux les clichés qui viennent à l’esprit à l’évocation du maître de La Fée électricité réalisée pour le pavillon de la Lumière de l’Exposition universelle de 1937. Fraîcheur, brio, élégance pour les uns, facilité, légèreté et mièvrerie pour d’autres, la fortune critique de Dufy est contrastée.

Cette exposition apporte un éclairage nouveau sur un chercheur et un interrogateur incomparable de formes et de matériaux, doublé d’un coloriste virtuose. À ses années fauves succède une période cézannienne. Il réduit alors sa gamme chromatique et géométrise ses plans. Cela dure peu. Très vite le peintre consacre toute son attention à la lumière et à la fluidité des formes. Une recherche toujours plus libre privilégie alors l’étude de thèmes bien définis : l’atelier, la fenêtre ouverte, les cargos… Un tracé incisif et sinueux scande des plages de couleurs souvent vives, procurant une singulière impression de mouvement aux objets, aux paysages et aux personnages qui peuplent les œuvres sur papier et les toiles. Céramiques et tissus confirment avec superbe l’inventivité de cet artiste protéiforme.