NANCY
Durant toute une saison, les institutions culturelles nancéennes remontent le temps pour se mettre à l’heure de la Renaissance. À l’initiative du projet, le Musée des beaux-arts et le Musée Lorrain révèlent, chacun de manière passionnante, ce que fut cette période de grand foisonnement artistique en Lorraine.
NANCY - Après l’Art nouveau, le siècle des Lumières et, dernièrement, Jean Prouvé, Nancy met à l’honneur son patrimoine artistique à travers une nouvelle période de l’histoire : la Renaissance. Repris à leur compte par pléthore d’établissements culturels nancéens, le projet, à l’origine, a été porté par le Musée des beaux-arts de Nancy et le Musée lorrain qui, chacun de manière singulière, évoquent ce que fut, en Lorraine et en Europe, cette époque de grand foisonnement artistique, littéraire et scientifique.
Au Musée lorrain, Olivier Christin, professeur d’histoire moderne à l’Université de Neuchâtel, a créé un parcours pluridisciplinaire associant peinture, sculpture, livres, gravures, tapisserie, vitraux, pièces de mobilier et objets archéologiques. « Dans les territoires de la Lorraine, la Renaissance n’est pas la fille tardive et modeste, provinciale, de l’expérience italienne », souligne-t-il, « elle importe, transporte, réexporte des solutions, des idées, des motifs, des grammaires visuelles, en un mot elle invente. » Démonstration est aujourd’hui faite sur les cimaises du musée situé au sein même de l’ancien palais des ducs de Lorraine qui firent des arts un véritable instrument de propagande célébrant leurs victoires et leurs vertus. Les globes terrestre et céleste conçus par le mathématicien et ingénieur Jean L’Hoste, une Tête de Christ en souffrance, seul vestige d’un calvaire de Ligier Richier, le fameux trésor de Pouilly de Pouilly-sur-Meuse découvert en 2006 dans le cadre de fouilles préventives, le Gisant de Philippe de Gueldre, reine de Sicile et duchesse de Lorraine, entièrement restauré pour l’occasion : toutes ces œuvres révélées au public dans une scénographie vivante et audacieuse racontent la richesse et la modernité de ce territoire situé entre la France et l’Empire. L’exposition est d’autant plus importante pour le musée qu’elle préfigure son futur parcours permanent. Le Musée lorrain doit, en effet, faire peau neuve aux termes d’une rénovation, étalée sur une dizaine d’années.
Du maniérisme tardif au baroque
Le Musée des beaux-arts de Nancy s’intéresse, lui, à « l’automne de la Renaissance », ce moment de transition avec le XVIIe siècle souvent qualifié de maniérisme tardif ou européen. De 1570 à 1615, de nombreux artistes originaires du nord et formés en Italie mettent leurs talents au service des puissants. L’accrochage met en exergue ces artistes de la seconde école de Fontainebleau, ceux de l’école de Prague, qui travaillèrent pour l’empereur Rodolphe II, et ceux des ateliers de Haarlem ou Utrecht, sans oublier deux grandes figures nancéennes, Jacques Bellange et de Jacques Callot. Après avoir souligné l’influence essentielle des grands maîtres tels Michel-Ange, Titien, Dürer, et Primatice (dont est présentée Ulysse et Pénélope conservé au Toledo Museum of Art), le parcours montre comment le portrait gagne en liberté avec Baroche, Bartholomäus Spranger, Hans von Aachen, Jérôme Francken ou Cornelis Ketel dont les personnages se jaugent ou s’ignorent dans un amusant jeu de regards. Les sections suivantes relatent le développement des grands genres que sont le paysage et la nature morte, à travers des peintures de Roclandt Savery et Paul Bril ou encore Joos De Momper. Pour la peinture d’histoire, les commissaires, Flore Collette, conservatrice au musée, et l’historien d’art Guillaume Kazerouni, ont convié au musée Bartholomäus Spranger – dont sont présentés Angélique et Médor ainsi que Ulysse et Circé –, Dirck de Quade Van Ravestey, l’auteur de cette raffinée Femme nue endormie qui sert d’emblème à l’exposition, Toussaint Dubreuil, présent avec deux pendants conservés au Louvre, Angélique et Médor, et Léda et le Cygne, acquises en 2010. Citons encore la présence d’une Madeleine pénitente d’Abraham Bloemaert et cette Conversion de Saint Paul de Denys Calvaert. Le cabinet de curiosité, « microcosme qui représente le macrocosme ,» comme le résume Flore Collette, témoigne du goût pour l’étrange et le merveilleux. Perdu au milieu d’œuvres en tout genre dans un grand cabinet de curiosités imaginaires, l’Automne d’Arcimboldo résume à lui seul le propos. Cette évocation de la Renaissance tardive s’achève dans les espaces permanents du musée, où sont présents L’annonciation de Caravage et la Transfiguration de Rubens. Le parcours se poursuit au Palais du Gouverneur, qui raconte ainsi le développement urbain de Nancy ou comment le duc Charles III fit ériger, par des ingénieurs italiens, la Ville Neuve à côté de la Ville ancienne, entourées ensemble d’une vaste fortification. Le Muséum-Aquarium aborde, lui, les progrès de la médecine et de la chirurgie, tandis que le Musée de l’histoire du fer se penche sur les inventions des ingénieurs français et italiens.
Anonyme - La Nancéide. La bataille de Nancy (1518), enluminure, Musée Lorrain, Nancy - © Photo G. Mangin.
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Nancy en pleine Renaissance
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 4 août, www.renaissancenancy2013.com, Musée des beaux-arts, 3, place Stanislas, tlj sauf mardi 10-18h, tél. 03 83 85 30 72, Musée Lorrain, 64, Grande Rue, tlj sauf lundi 10h-12h30 et 14h-18h, tél. 03 83 32 18 74.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°392 du 24 mai 2013, avec le titre suivant : Nancy en pleine Renaissance