Art ancien

Les bonnes « recettes » des expos impressionnistes

Par Christine Coste · L'ŒIL

Le 14 décembre 2012 - 1249 mots

PARIS

« L’impressionnisme, cette machine à cash-flow », titrait récemment un quotidien français. Qu’en est-il exactement des recettes financières et de l’apport en termes d’image au regard des coûts et des réinvestissements ?

Lorsque le 24 janvier 2011 à 21 h le Grand Palais ferma les portes de la rétrospective Claude Monet, la Réunion des musées nationaux-Grand Palais et le Musée d’Orsay savaient d’ores et déjà que son succès avait dépassé les attentes. Avec 913 064 entrées, soit 130 000 de plus que pour « Picasso et les maîtres », elle devenait l’exposition de peinture la plus visitée de France. Ailleurs aussi, la manifestation avait porté ses fruits. À la Fondation Claude Monet (Giverny), on constate le « rôle phénoménal qu’elle joua sur la fréquentation » qui connut un record avec 600 000 visiteurs sur sept mois. La programmation du Musée Marmottan-Monet, concomitante de celle du Grand Palais, avait également permis à cette institution, qui détient le plus riche ensemble de Monet au monde, d’accroître, avec 260 000 entrées, le niveau de sa fréquentation annuelle à 305 000 et, aussi, de se faire connaître d’un plus large public.

Le Musée des beaux-arts de Rouen, qui dispose de la plus importante collection impressionniste hors de Paris, sait également l’impact que peut avoir auprès du public une exposition consacrée à l’impressionnisme. En 2010, « Une ville pour l’impressionnisme » a ainsi, « avec 240 000 visiteurs en trois mois, atteint un chiffre de fréquentation équivalent à plus de deux ans et demi de fréquentation du musée en temps normal », souligne Virgil Langlade, responsable Communication & Mécénat des musées de la Ville de Rouen. À Giverny, le Musée de l’art américain, en devenant en 2009 le Musée des impressionnismes, a quant à lui « quasiment doublé sa fréquentation », reconnaît Diego Candil, son directeur.
 
Certains noms d’artistes plus porteurs que d’autres
L’impressionnisme est donc porteur comme le sont tout autant les noms de Cézanne, Monet, Degas, Manet, Renoir, Gauguin ou Seurat. À Orsay, l’exposition en cours « L’impressionnisme et la mode » devrait s’intercaler au regard de son succès entre « Manet, inventeur du Moderne » (470 000 visiteurs en 2011) et « Degas et le nu » (450 000 en 2012), « voire peut-être atteindre les 530 000 entrées de Van Gogh en 1988 », estime Alain Lombard, administrateur général des musées d’Orsay et de l’Orangerie.

Mais, M. Lombard fait remarquer qu’une manifestation dédiée à un impressionniste n’est pas forcément un gage de réussite, certains noms étant plus attractifs que d’autres – Maurice Denis n’avait comptabilisé que 170 000 visiteurs en 2007. Idem cette année pour le Musée des impressionnismes à Giverny dont l’exposition Maurice Denis, avec un peu moins de 83 000 entrées, se situe bien loin de « Bonnard en Normandie » (113 108).

Du côté du volume d’affaires, les sommes battent tout autant des records : 600 000 euros pour les ventes de billets pour Monet au Grand Palais, soit 75 % du montant relevé sur l’ensemble des expositions des Galeries nationales pour l’année 2010. Et le rapport d’activité d’indiquer qu’au niveau des espaces commerciaux, « grâce notamment à l’apport de Turner et de Monet, les Galeries nationales du Grand Palais » ont enregistré « leur record historique de chiffre d’affaires avec plus de 8,5 millions d’euros ». L’exposition Monet au seul Musée d’Orsay a rapporté trois millions d’euros, « somme qui a permis d’acheter en partie en 2011 Le Cercle de la rue Royale de James Tissot, vendu à 4 millions d’euros », comme aime à le rappeler son directeur, Guy Cogeval.

Des recettes d’expositions immédiatement réinvesties « Quand on compare le budget de production aux recettes, les expositions consacrées aux impressionnistes sont effectivement rentables », admet Alain Lombard : « Manet et Degas ont dégagé un million d’euros de bénéfices hors coûts structurels du musée. » Quant aux cinq expositions clefs en mains qui ont circulé à l’étranger entre 2009 et 2010, elles ont produit 10 millions d’euros investis dans les coûts des travaux du nouvel Orsay estimés à 21,10 millions d’euros.

Les recettes engrangées par le Musée des beaux-arts de Rouen lui ont permis d’acquérir de son côté une peinture de Corot et une aquarelle de Pissarro, « achat qui n’aurait pas été possible avec le budget traditionnel du musée », confie Virgil Langlade qui ajoute qu’une telle exposition engendre également pour l’institution d’autres bénéfices, d’image et de notoriété, en France et à l’étranger, et des retombées économiques pour les acteurs du tourisme.

« Ces projets d’expositions d’envergure internationale ne seraient cependant pas réalisables sans la mobilisation des collectivités porteuses du projet et sans le soutien financier de partenaires privés », précise-t-il. Parmi les manifestations dédiées aux mouvements de peinture, celles qui mettent en avant les stars de l’impressionnisme sont certainement celles qui enregistrent des records tant en temps pour réunir les pièces qu’au niveau du coût des assurances et du transport en raison de l’éparpillement des œuvres à travers le monde. « Pour « Le jardin de Monet à Giverny, l’invention d’un paysage », rassemblant vingt-huit toiles du peintre, le montant de l’assurance était de 1,5 milliard d’euros contre 80 millions pour assurer soixante-dix œuvres de Maurice Denis », révèle Diego Candil. D’où l’importance du mécénat.

Autour de l’impressionnisme

- « L’impressionnisme et la mode », jusqu’au 20 janvier 2013. Musée d’Orsay. Ouvert du mardi au dimanche de 9 h 30 à 18 h. Nocturne le jeudi jusqu’à 21 h 45. Tarifs : 12 et 9,5 €. www.musee-orsay.fr

Voir la fiche de l'exposition : L'impressionnisme et la mode, une histoire de goût

- « Une histoire de l’impressionnisme : chefs-d’œuvre de la peinture française du Clark Art Institute », jusqu’au 20 janvier 2013. Musée des beaux-arts de Montréal. Ouvert le mardi de 11 h à 17 h, le mercredi de 11 h à 21 h, le jeudi et le vendredi de 11 h à 19 h et le samedi et le dimanche de 10 h à 17 h. Tarifs : 15 et 10 €. www.mba.qc.ca

Voir la fiche de l'exposition : Une histoire de l'impressionnisme - Chefs-d'oeuvre de la peinture française du Clark

- « Edgar Degas », jusqu’au 27 janvier 2013. Fondation Beyeler. Ouvert tous les jours de 10 h à 18 h et le mercredi jusqu’à 20 h. Tarifs : 20 et 16 €. www.fondationbeyeler.ch

Voir la fiche de l'exposition : Edgar Degas

- « Gauguin et le voyage vers l’exotisme », jusqu’au 13 janvier 2013. Musée Thyssen-Bornemisza à Madrid. Ouvert du mardi au dimanche de 10 h à 19 h. Nocturne le samedi jusqu’à 22 h. Tarifs : 10 et 6 €. www.museothyssen.org

- « Paul Gauguin. Les estampes », jusqu’au 20 janvier 2013. Kunsthaus de Zurich. Ouvert le mardi, samedi et dimanche de 10 h à 18 h et du mercredi au vendredi de 10 h à 20 h. Tarifs : 15 et 10 €. www.kunsthaus.ch

Voir la fiche de l'exposition : Voyage vers l'exotique - Hommage à Gauguin

- « Manet. Portraits », du 26 janvier au 14 avril 2013. Royal Academy of Arts de Londres. Ouvert du lundi au dimanche de 10 h à 18 h sauf le vendredi jusqu’à 22 h. Tarifs : 18,5 et 12,5 e. www.royalacademy.org.uk

- « Vincent. Le musée Van Gogh à l’Hermitage », jusqu’au 25 avril 2013. Musée de l’Hermitage à Amsterdam. Ouvert tous les jours de 9 h à 17 h. Tarif : 15 €. www.vangoghmuseum.nl

Voir la fiche de l'exposition : Vincent - Le musée Van Gogh à l'Hermitage

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°653 du 1 janvier 2013, avec le titre suivant : Les bonnes « recettes » des expos impressionnistes

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