Un millier de photos aux enchères

Grâce au succès grandissant de Paris Photo depuis quelques années et notamment l’année dernière, pour sa première édition sous la verrière du Grand Palais, la ville lumière a été proclamée capitale de la photographie. C’est à Paris que le marché de la photographie est le plus dynamique en Europe. Londres, l’autre berceau historique du médium, ne fait plus le poids. Devant cette constatation, Christie’s et Sotheby’s ont promptement déménagé leur département européen de photographies de Londres vers Paris au printemps 2011. Un mouvement qui n’a pu être suivi par Phillips de Pury, une maison très installée sur le marché de la photographie haut de gamme, mais qui n’a pas d’antenne parisienne. C’est donc, depuis Londres, que la maison de ventes espère tirer bénéfice de l’effervescence parisienne pour sa vacation du 8 novembre : « Nous programmons la vente avant le salon pour que les amateurs puissent s’arrêter sur leur chemin vers Paris. Nous avons désormais un spécialiste de la photographie présent sur place et nous avons l’intention d’organiser un cocktail pour marquer le début d’une plus grande présence à Paris, même si nous restons concentrés principalement sur Londres », explique Louise Proud, directrice du département Photographies chez Phillips de Pury & Co.

Depuis deux ans, les ventes que Sotheby’s et Christie’s organisent au moment de Paris Photo, offrant pêle-mêle des photographies anciennes, modernes ou contemporaines, s’installent avec des résultats aux alentours de 2 millions d’euros. Cela est sans compter les succès de Christie’s avec ses ventes monographiques de Richard Avedon en 2010, puis Henri Cartier-Bresson et Irving Penn, en 2011. Cette année, il n’y aura pas de vente consacrée à un seul artiste, mais les vacations, aux catalogues fournis en œuvres de tous styles et provenances, maintiennent le niveau avec des estimations globales allant de 1,4 à 3 millions d’euros.

Kertész et Man Ray sous les projecteurs
Le lot phare chez Sotheby’s est un tirage grand format d’André Kertész (est. 80 000-120 000 euros), offrant une vue en plongée de « travaux des câbles » dans les sous-sols parisiens. La maison de ventes met également en avant un coffret contenant soixante-cinq photographies par soixante-cinq photographes de l’agence Magnum, sur le thème du nu, mis en vente au profit du fonds de dotation de la future Fondation Magnum (est. 100 000-200 000 euros). Se distinguent aussi un daguerréotype des années 1840 montrant une vue très picturale de Pierrefonds en pleine plaque (30 000-40 000 euros) ou des portraits d’August Sander à Peter Lindbergh, en passant par Diane Arbus, qui a bénéficié d’une rétrospective au Jeu de paume l’année dernière. Chez Christie’s, deux collections particulières dominent la proposition. La collection Berman, qui fait l’objet d’une vacation particulière, rassemble une cinquantaine de photographies américaines avec des tirages de Walker Evans, Dorothea Lange, Weegee, William Eggleston ou Alec Soth, estimées en moyenne 2 000-3 000 euros. Tandis que le lendemain, la photographie de la première moitié du XXe siècle sera mise à l’honneur avec quarant-deux images provenant d’une collection japonaise. Parmi celles-ci se trouvent un photomontage d’El Lissitzky (80 000-120 000 euros), une Distorsion de Kertész (30 000-50 000 euros), mais surtout, le lot phare de la vente : un tirage argentique solarisé de 1929, chef-d’œuvre de Man Ray intitulé Le primat de la matière sur la pensée (est. 180 000-220 000 euros). Pour sa part, Phillips propose entre autres, une Constellation de Thomas Demand (est. 40 000-75 000 euros) ou pour le même prix, une voie de chemin de fer se perdant dans l’horizon californien de Robert Misrach. Mais la vente fait surtout la part belle à la photographie de mode avec des tirages de William Klein, Horst P. Horst ou Helmut Newton, dont un portrait en grand format de Charlotte Rampling à l’hôtel Nord-Pinus à Arles, estimé 180 000-220 000 euros. Dès le 26 octobre, l’étude Piasa ouvre le bal avec une quarantaine de vues de monuments ou paysages, éditées par Louis Désiré Blanquart-Evrard et son Imprimerie photographique, au milieu du XIXe siècle. Le 9 novembre, Viviane Esders a rassemblé un bel ensemble de tirages, des années 1930 à 1970 pour la majorité, avec en vedette, une vue par Constantin Brancusi, de son marbre blanc Léda (est. 15 000-20 000 euros) et des images des grands photographes de mode que sont Irving Penn et Richard Avedon. Chez Millon & Associés, le 13 novembre, Christophe Goeury présentera cinq épreuves de Jacques-Henri Lartigue, estimées entre 10 000 et 30 000 euros, une partie du fonds de la photojournaliste et portraitiste Gisèle Freund avec trois cents épreuves estimées entre 300 et 4 000 euros, ou encore cinq tirages d’Eva Besnyö dont l’exposition vient de se terminer au Jeu de paume. Enfin, Tajan propose le 27 novembre, une vente dans laquelle s’illustrent aussi bien Eugène Atget, Cindy Sherman ou Helmut Newton.