Royaume-Uni - Politique culturelle

Londres veut couper dans son budget de la culture

Le Parti travailliste veut remettre en cause les financements de projets culturels promis par les conservateurs.

Royaume-Uni. Pour équilibrer ses finances, le gouvernement travailliste pourrait s’en prendre à la culture. Seize subventions pour des projets de développement culturel risquent d’être annulées dans le cadre du budget publié fin octobre. Ces programmes avaient été annoncés au printemps 2024 par le précédent gouvernement. Une enveloppe de 100 millions de livres (120 M€) avait été « mise de côté » par les conservateurs, avec pour objectif de développer le secteur culturel dans des lieux à fort potentiel dans tout le pays. Mais une fois au pouvoir, le gouvernement travailliste a conclu que cette enveloppe n’avait pas été financée et qu’elle devait être supprimée.

Néanmoins, le ministère du Logement, des Communautés et du Gouvernement local, en charge de la décentralisation, a lancé une période de consultation avec les bénéficiaires potentiels pour comprendre « les impacts financiers, stratégiques et communautaires » du retrait de ces financements. Les institutions concernées sont aussi en dialogue avec les responsables du ministère de la Culture, des Médias et des Sports, qui surveille la plupart de ces projets.

Outre neuf villes qui devaient recevoir chacune 5 millions de livres (6 M€), six institutions culturelles avaient été sélectionnées. 15 millions de livres (18 M€) étaient prévus pour la transformation du Musée national du Rail à York (nord de l’Angleterre), dans le cadre d’un projet d’un coût total de 95 millions de livres (114 M€). 10 millions de livres (12 M€) avaient été alloués au redéveloppement du Musée de l’esclavage et du Musée maritime de Liverpool (voir ill.), un projet qui fait partie de la transformation plus large des quais de la ville. Lancé en 2021 par National Museums Liverpool (NML), ce plan doit s‘étendre sur une dizaine d’années pour un budget total de 81 millions de livres (97 M€).

Dans la ville de Leeds, une annexe de la British Library pour le nord de l’Angleterre devait recevoir 10 millions de livres (12 M€), en complément d’un autre financement de 25 millions de livres (30 M€) accordé par le ministère de la décentralisation. Toujours à Leeds, 5 millions de livres (6 M€) avaient été prévus pour la création du premier Centre de la poésie du pays. En Écosse, 2,6 millions de livres (3,12 M€) avaient été alloués au Musée Victoria and Albert de Dundee, dans le but de réaménager les galeries dédiées au design écossais. Enfin, au Pays de Galles, 10 millions de livres (12 M€) avaient été attribués à la transformation du théâtre Venue Cymru.

Les négociations avec le gouvernement pourraient s’étendre sur une période de douze à treize semaines, selon certaines de ses institutions. National Museums Liverpool a pour sa part confirmé la fermeture des deux musées concernés par les travaux de transformation début 2025, comme prévu à l’origine. Alors que l’organisme tente de prouver l’intérêt national du projet au gouvernement, il reste discret sur l’impact que pourrait avoir la suppression des fonds supplémentaires en termes de retard dans les délais construction, de réduction de l’envergure du projet ou de conséquences sur les communautés locales. En l’état, les travaux prévoient de donner au Musée international de l’esclavage son propre bâtiment, alors qu’il se trouve actuellement au troisième étage du Musée maritime. Un pont de fer et de verre devait aussi relier ce bâtiment, appelé Dr Martin Luther King Jr, au reste des galeries du musée.

En revanche, le retrait de ces subventions pourrait mettre en péril la création même du Centre national de la poésie, qui devrait recevoir jusqu’à 100 000 visiteurs par an. « Pour l’instant, nous pouvons faire face à une interruption du financement sans effets majeurs sur notre projet », estime Nick Barley, le directeur. Mais, si cette subvention était annulée, il estime que le projet pourrait perdre les 15 millions de livres (18 M€) du fonds de la Loterie nationale et de donateurs privés qui se sont ajoutés aux 5 millions de livres (6 M€) du gouvernement. « Ce serait catastrophique », conclut-il.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°644 du 29 novembre 2024, avec le titre suivant : Londres veut couper dans son budget de la culture

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