LONDRES / ROYAUME-UNI
La nomination d’un partisan de l’austérité à « la reprise et au renouveau de la culture » ne laisse pas beaucoup d’espoir.
Le ministre du numérique, de la culture, des médias et du sport Oliver Downden a chargé Neil Mendoza de fournir « une voix experte et indépendante » à son administration afin de gérer l’impact du Covid-19 sur le secteur artistique. La création de ce poste est louable au regard des bouleversements attendus pour le monde culturel. A un détail près : le nom de l’heureux élu a jeté un froid dans le milieu culturel britannique.
Neil Mendoza n’y est en effet pas un inconnu. Impliqué dans de nombreuses institutions culturelles avant de devenir en janvier 2016 membre non exécutif du conseil d’administration du ministère, il avait été chargé d’une enquête pour répondre à la question : « que peut faire le gouvernement pour aider à la création et au maintien d’un secteur des musées actif, durable et efficace ? » Or, dès l’entame de son rapport, publié en novembre 2017, il avait écarté un soutien financier accru de la part des autorités, estimant que le secteur avait déjà largement bénéficié des aides publiques : « L’axe principal de nos recommandations est dès lors de s’assurer que nous utilisons les subventions de la meilleure manière possible ». En clair, faire mieux avec des moyens financiers similaires, voire même en baisse en prenant en compte l’inflation.
Le choix de sa nomination indique ainsi clairement la direction voulue par le ministre Oliver Downden, le neuvième à ce poste depuis l’arrivée au pouvoir des conservateurs il y a dix ans. Certes, il s’est félicité de l’aide exceptionnelle de 160 millions de livres (177 millions d’euros) annoncée fin mars par l’Arts Council England : 20 millions de livres destinés aux indépendants, avec un maximum de 2 500 livres par personne et 140 millions de livres pour les organisations culturelles.
Mais aucun soutien supplémentaire n’est pour le moment prévu alors que le secteur est en péril : les musées et les salles de spectacles ont fermé en mars et ne rouvriront pas leurs portes avant début juillet, et devront alors subir la quasi-fermeture du pays aux touristes étrangers.
Une partie non négligeable des quelques 3 000 musées britanniques, principalement des musées locaux et indépendants, survivent en grande partie grâce aux revenus de leur billetterie. Leur avenir s’annonce d’autant plus sombre qu’une enquête publiée par l’Association of Leading Visitor Attractions (l’association des principaux lieux touristiques) montre que 29 % du public n’entend pas retourner aux musées « pendant longtemps après la réouverture » et 54 % « retarderont leur visite pendant un moment ». Des musées pourraient ainsi être tentés par la vente d’une partie de leur collection pour faire face à leurs difficultés budgétaires. Si tant est que cela soit suffisant pour leur survie.
Même les institutions les plus prestigieuses devront revoir leurs ambitions à la baisse. Comme l’explique Tristram Hunt, le directeur du V&A, « le modèle économique des grandes expositions temporaires qui nécessitent la venue de nombreux visiteurs pour être rentable sera sous pression. Nous allons donc devoir repenser notre manière de financer nos musées ». Ancien député du parti travailliste, il entend en attendant utiliser ses liens avec le monde politique pour discuter avec le gouvernement « du type de soutien qu’ils accepteront de nous accorder ».
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Le monde culturel britannique inquiet pour son avenir
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €