Une tribune propalestinienne publiée dans le magazine « Artforum » a provoqué une réaction en chaîne.
Tel Aviv, New York. Dans un communiqué publié en ligne le 25 octobre, l’Icom (Conseil international des musées, rattaché à l’Unesco) exprime son soutien aux populations civiles en Israël et à Gaza, appelle à un cessez-le-feu et rappelle les règles du droit international concernant la protection du patrimoine en zone de guerre. Le texte, assez court, ne mentionne pas le Hamas et ne condamne pas les attaques du 7 octobre ou la prise d’otages.
Il semble que ce soit l’Icom Israël qui ait insisté pour qu’un communiqué soit publié, alors que l’organisme restait silencieux depuis le début du conflit. En effet, le 22 octobre, plusieurs directeurs de musées israéliens ont écrit directement à l’Icom pour exiger une réaction. La lettre affirme qu’il ne s’agit pas d’un « nouvel épisode du conflit Israël-Palestine », et compare le Hamas et le Jihad islamique palestinien aux talibans et à l’État islamique. Les signataires soulignent que les valeurs défendues par l’Icom et par la démocratie israélienne sont « attaquées par le Hamas ». Ils ajoutent que, depuis le 7 octobre, les musées en Israël ont protégé leurs collections et renforcé leur sécurité selon les recommandations de l’Icom (les musées israéliens restent fermés jusqu’à nouvel ordre). Enfin, les signataires exhortent l’Icom à « condamner le massacre par le Hamas de citoyens sans défense ». Le communiqué de l’Icom ne répond donc pas vraiment aux attentes des membres du comité israélien.
La lettre de l’Icom Israël trouve son origine dans une polémique interne au monde de l’art : le 19 octobre, le magazine américain Artforum a publié une tribune signée par plus de deux mille personnalités du milieu. Ce texte, assez long, ne mentionne ni le Hamas ni les victimes israéliennes, mais appelle à soutenir les civils palestiniens et dénonce la colonisation israélienne ainsi que « le génocide » à Gaza. Parmi les signataires se trouvent des artistes du monde arabe (Taysir Batniji, Joana Hadjithomas et Khalil Joreige), des artistes américains et européens (Nan Goldin, Laure Prouvost), des commissaires d’expositions et quelques galeristes. Côté français, on note qu’Éric Baudelaire, Françoise Vergès, Élisabeth Lebovici, Rebecca Lamarche-Vadel, Claude Lemand et Elias Sanbar ont signé le texte.
Cette tribune, dont l’auteur est inconnu, a suscité l’indignation en Israël, non seulement pour son contenu mais aussi parce que certains signataires ont travaillé avec des institutions israéliennes. La présidente de l’Icom Israël, Raz Samira, par ailleurs directrice adjointe du Musée Eretz Israël, a donc écrit cette lettre ouverte à l’Icom, soutenue par les directeurs des grands musées israéliens.
À la même date, une lettre ouverte appelant à l’unité du milieu de l’art et condamnant les attaques du Hamas a été signée par plusieurs galeristes et artistes (Paula Cooper, Dominique Lévy, Emmanuel Perrotin, Marina Abramovic). Sous la pression, Artforum a ajouté un addenda à la tribune, où les victimes du 7 octobre et les otages sont mentionnés. Plusieurs signataires ont par ailleurs affirmé avoir subi des pressions de collectionneurs américains ou israéliens pour retirer leur nom de la tribune, ce que certains ont fait (Tomás Saraceno). Le rédacteur en chef d’Artforum, David Velasco, a rapidement été désavoué par sa hiérarchie et licencié le 27 octobre.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Le numéro d’équilibriste de l'Icom dans la guerre Hamas-Israël
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°620 du 3 novembre 2023, avec le titre suivant : Guerre Hamas-Israël, le numéro d’équilibriste du Conseil international des musées