États-Unis - Musée

Nombreuses critiques après le report d’une exposition d’art islamique aux États-Unis

Par Louise Wagon · lejournaldesarts.fr

Le 9 novembre 2023 - 538 mots

Le Musée Frick Pittsburgh s’est finalement excusé d’avoir reporté une exposition d’art islamique.

Tesson de mosaïque islamique présenté dans l'exposition Treasured Ornament au Frick Pittsburgh Museum. Courtesy Frick Pittsburgh
Tesson de mosaïque islamique présenté dans l'exposition Treasured Ornament au Frick Pittsburgh Museum.
© Frick Pittsburgh

La guerre Hamas-Israël ne divise pas forcément le monde culturel comme en témoignent les réactions après le report d’une exposition d’art islamique aux Etats-Unis. Le Musée Frick Pittsburgh (Pennsylvanie) devait accueillir du 4 au 25 février 2024 l’exposition « Ornement précieux : 10 siècles d’art islamique ». Cette exposition, qui rassemble des œuvres d’art diverses, comme de la verrerie, de la céramique, de la ferronnerie, de la peinture et des armes, avait déjà été reportée une première fois pour des raisons de calendrier. 

Mais le 17 octobre, soit dix jours après le début des hostilités à Gaza, le musée a annoncé discrètement que l’exposition était de nouveau reportée, cette fois-ci à août 2024. La directrice du musée, Elizabeth Barker, a justifié cette décision par le souci de ne pas heurter la sensibilité des visiteurs dans le contexte actuel. 

Cette décision a provoqué la réaction indignée de plusieurs organisations musulmanes et aussi juives, qui ont dénoncé une confusion entre l’art islamique et le terrorisme. Christine Mohamed, directrice du Conseil des relations américano-islamiques (CAIR) de Pittsburgh, un groupe musulman de défense des droits civiques, a exprimé sa déception dans un communiqué : « La décision de reporter l’exposition sous prétexte de nuire potentiellement à la communauté juive perpétue le stéréotype néfaste selon lequel les musulmans ou l’art islamique sont synonymes de terrorisme ou d’antisémitisme. » 

Christine Mohamed a également rappelé le traumatisme et les souffrances vécus par le peuple palestinien, et a appelé à plus d’empathie et d’humanité. Selon des chiffres de 2017 et 2019 de l’Institut arabo-américain, les Etats-Unis comptent 3,6 millions d’Arabes, dont 6 % de Palestinien. La communauté de confession juive rassemble, elle, entre 6 et 7 millions de personnes. 

Adam Hertzmann, le porte-parole d’une Fédération juive à Pittsburgh, a également critiqué le report de l’exposition. Il a affirmé que l’art islamique pouvait être une source de dialogue et de compréhension entre les cultures, et que le report était une occasion manquée de promouvoir la paix et la tolérance. Il a également souligné, lui aussi, que l’art islamique n’avait rien à voir avec le conflit actuel, et qu’il était regrettable de l’associer à la violence : « Assimiler l’art islamique et les musulmans en général au Hamas est certainement biaisé et c’est certainement quelque chose contre lequel nous sommes opposés. » Il a ajouté qu’il pensait que « peu de gens dans la communauté juive auraient été préoccupés par une exposition sur l’art islamique parce que nous comprenons que cela n’a rien à voir avec le Hamas, qui est une organisation terroriste ».

Face à la polémique, le musée a changé de discours et a présenté ses excuses dans une nouvelle déclaration. Il a affirmé que l’exposition avait été reportée parce que le Frick n’avait pas consulté la communauté musulmane locale, ce qu’il a reconnu comme une erreur. « Le Frick est désolé d’avoir blessé des voisins que nous respectons profondément avec notre communication peu claire sur le report de cette exposition présentant 10 siècles d’art islamique. Nous travaillerons sérieusement pour réparer nos relations avec la communauté musulmane », peut-on lire dans le communiqué. Il a promis de travailler avec la communauté musulmane pour présenter l’exposition dans le futur, avec plus de contexte historique et culturel.

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