Conflits internationaux

L'IMA à l'épreuve de la guerre entre le Hamas et Israël

Par Olympe Lemut · lejournaldesarts.fr

Le 10 octobre 2023 - 594 mots

PARIS

L’Institut du monde arabe annule les manifestations et conférences organisées dans le cadre de sa saison Palestine en cours.

Amer Nasser, Cinema for survival (Gaza Red Carpet Film Festival), 2015, photographie présentée dans l'exposition de l'IMA Ce que la Palestine apporte au monde. © Amer Nasser
Amer Nasser, Cinema for survival (Gaza Red Carpet Film Festival), 2015, photographie présentée dans l'exposition de l'IMA « Ce que la Palestine apporte au monde ».
© Amer Nasser

La Palestine, qui est membre de la Ligue arabe et donc financeur de l'Institut du monde arabe (IMA), occupe une place importante dans l'institution qui organise régulièrement des conférences et des débats sur le sujet. Le site web de l'IMA rappelle ainsi que « l’IMA est à ce jour la seule institution au monde à accorder une telle importance à la scène culturelle et artistique palestinienne », une tendance qui s'est accentuée depuis l'arrivée de Jack Lang à la présidence de l’IMA.

Mais la programmation actuelle prend une dimension politique délicate après l’attaque de grande ampleur du Hamas autour de Gaza et la riposte israélienne. L'IMA accueille en effet une « saison Palestine » qui se déploie en trois expositions et de nombreux rendez-vous culturels. Comme expliqué lors du vernissage en juin dernier, cette saison marque le soixante-quinzième anniversaire de la Nakba (catastrophe en arabe), expression utilisée par les Palestiniens pour désigner la création de l'État d'Israël en 1948 : c'est donc un choix politique. Le commissaire général de la saison est Elias Sanbar, diplomate et ambassadeur de Palestine à l'Unesco et directeur du futur Musée d'art moderne et contemporain de Palestine. Parmi les événements culturels d'octobre un débat était prévu le 12 octobre prochain précisément sur la « Nakba », avec la participation d'Elias Sanbar.

Alors que les victimes se comptent par milliers en Israël et à Gaza, il semblait impossible de maintenir cette programmation. Selon une source officielle de l’IMA, les concerts et conférences dans le cadre de la saison Palestine sont annulés, mais aucune mesure particulière de sécurité n’a été prise.

Il est vrai que l'IMA n'a jamais subi d'attaques physiques depuis sa création même s'il s'est souvent retrouvé au cœur de violentes polémiques politiques, souvent en lien avec Israël. Ainsi l'exposition « Juifs d'Orient » de 2021 avait-elle suscité des protestations d'intellectuels arabes et musulmans et des appels au boycott, car plusieurs objets exposés provenaient d'institutions israéliennes. Adossé dès l'origine à la Ligue arabe, l'IMA doit donc chercher en permanence un équilibre diplomatique, d'autant que sa tutelle est le Quai d'Orsay.

Cette position risque de devenir encore plus difficile au vu des réactions en Europe. Lundi 9 octobre le commissaire européen Olivér Varhélyi a annoncé la suspension de toutes les aides européennes au développement à destination des Territoires palestiniens, soit une enveloppe de 691 millions d'euros. Il appelait également à « évaluer de près les projets financés, et suspendre toute nouvelle proposition budgétaire ». L'Europe est le premier contributeur à l'aide au développement pour les Palestiniens, et il était prévu d'y consacrer 1,17 milliard d'euros entre 2021 et 2024 dont une grande partie pour payer les salaires des membres de l'Autorité palestinienne. En Allemagne et en Autriche les gouvernements ont annoncé réfléchir à suspendre leur participation financière au développement, la ministre allemande du développement a ainsi indiqué que l'Allemagne allait « revoir l'ensemble de son engagement dans les Territoires palestiniens » soit 72 millions d'euros annuels.

La France, dont la position est perçue comme pro Palestine par les pays européens, ne s'est pas encore prononcée sur le sujet de l'aide humanitaire. Une réunion des ministres européens des Affaires étrangères doit se tenir aujourd’hui mardi 10 octobre pour tenter de trouver une position commune.

Outre la violence des attaques du Hamas et de ses alliés, ce qui pousse les pays européens à réduire l'aide au développement est le doute récurrent sur les destinataires. En 2014 un rapport de la Cour des comptes européenne suggérait que l'aide humanitaire pouvait être détournée par des ONG fantômes.

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