FIGEAC
La maison natale du déchiffreur des hiéroglyphes sera agrandie et transformée en Musée de l’écriture, et sa demeure familiale, en Isère, entièrement rénovée.
FIGEAC - C’est à Figeac, deuxième ville du Lot avec ses 10 000 habitants, que naquit il y a plus de deux siècles, en 1790, Jean-François Champollion, le déchiffreur des hiéroglyphes. Sa maison natale abrite depuis 1986 le Musée Champollion, qui devrait faire peau neuve d’ici à l’été 2006. Prévus dès le début 2005, les travaux, d’un coût total de 2,8 millions d’euros, permettront, grâce à l’acquisition par la ville d’un immeuble adjacent, d’agrandir l’établissement, mais aussi de le transformer en Musée de l’écriture, une première en France. Un musée qui « ne sera pas conçu comme un lieu dédié à la mémoire de Champollion mais autour de son travail d’égyptologue, précise Marie-Hélène Pottier, directrice de l’institution depuis 1991. L’essentiel des objets personnels étant conservés à Vif [Isère], dans la demeure familiale des Champollion [lire l’encadré] et la Bibliothèque nationale de France abritant la quasi-totalité de ses écrits, il fallait imaginer autre chose ». L’architecte en charge du projet, Alain Moatti – à qui l’on doit l’extension du Musée Dapper, à Paris – a prévu une double façade capable de s’intégrer à l’architecture médiévale traditionnelle des bâtisses : une sorte de mur-rideau en verre et cuivre percé de caractères d’écritures du monde entier. Cet élément attractif offrira une excellente visibilité du musée depuis l’extérieur. Le scénographe Pascal Payeur – qui a travaillé sur des expositions telle « Confucius » au Musée Guimet, à Paris – a, pour sa part, fait preuve d’imagination pour présenter de manière vivante les manuscrits médiévaux, tablettes sumériennes et autres pièces difficiles à exposer. Des cimaises modulables, des vitrines verticales destinées aux pièces imposantes, des tables centrales et des surfaces horizontales pour les documents écrits, le tout ponctué de discrètes bornes multimédia, devraient créer un parcours original et ludique. Celui-ci s’articulera autour de trois grandes parties, à commencer par « La naissance de l’écriture ». Tablettes et stèles nous plongeront dans la Mésopotamie (Irak actuel) du quatrième millénaire avant notre ère, époque où fut inventée l’écriture cunéiforme. Développant une politique d’acquisition importante confortée par plusieurs donations, le musée va bénéficier de prêts importants provenant du Musée du Louvre, du Centre archéologique sous-marin de Marseille ou du Muséum d’histoire naturelle de Toulouse.
« Alphabet du monde »
À la présentation des écritures fondatrices (cunéiforme, hiéroglyphique, chinoise…), succéderont les vestiges de l’« Alphabet du monde ». Issu du phénicien et de l’araméen et apparu au Proche-Orient (Irak, Israël, Palestine, Syrie) au deuxième millénaire avant notre ère, cet alphabet donna naissance à l’arabe, au grec, au latin ou au cyrillique.
Le musée rendra également compte des développements les plus récents de la recherche puisqu’il fera place aux écritures en cours de déchiffrement tel le Maya. Les derniers espaces seront dévolus aux rapports qu’entretient l’homme avec le livre et l’écrit en général, depuis le Moyen Âge jusqu’à l’ère du numérique en passant par les débuts de l’imprimerie. « Nous nous intéressons à l’écriture comme fait de société : comment elle a été utilisée pour communiquer, pour informer, pour asseoir le pouvoir en place, ou dans un but strictement personnel. Nous cherchons à comprendre le rôle qu’a tenu l’écrit dans l’évolution du monde », explique Marie-Hélène Pottier. À échéance plus lointaine, un bâtiment situé en face du musée devrait accueillir des expositions temporaires. L’ensemble du projet s’inscrit dans un plan global d’urbanisme visant à restaurer le centre-ville et à réhabiliter l’habitat de Figeac.
En 2001, le département de l’Isère s’est porté acquéreur à Vif (non loin de Grenoble) de la propriété familiale des Champollion avec ses précieuses archives (décors préservés en l’état depuis le XIXe siècle, souvenirs personnels, intérieurs meublés, ouvrages annotés…). Dans l’attente de travaux de rénovation et d’une nouvelle muséographie, un premier parcours témoignant du cadre dans lequel Jean-François Champollion et son frère ont vécu et travaillé y est proposé au public. Le rez-de-chaussée dévoile des boiseries du XVIIIe siècle, où meubles et portraits de famille se côtoient, tandis que le premier étage évoque la vie politique et sociale à Grenoble au XIXe siècle. Mais ce sont les combles, aménagées par l’égyptologue, qui rendent compte de son univers à partir de ses documents de travail – notamment la copie de la célèbre pierre de Rosette annotée de sa main –, et aussi de ses dessins, croquis et inscriptions hiéroglyphiques gravées sur la poutre de sa chambre... - « La grande aventure égyptienne », Maison Champollion, jusqu’au 5 mai 2005, 45, rue Champollion, 38450 Vif, tél. 04 76 72 45 98, www.maison-champollion-isere.com, tlj sauf mardi 10h-17h, fermée le 25 décembre, 1er janvier et 1er mai.
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Sous le signe de Champollion
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Abonnez-vous dès 1 €Dès 1806, le jeune Jean-François Champollion (1790-1832) commence à étudier l’écriture égyptienne. Le texte d’un obélisque mis au jour à Philae, en 1821, la pierre de Rosette, lui permet de comprendre le système graphique complexe auquel répondent les hiéroglyphes. Après cette découverte majeure, Champollion est nommé conservateur du département d’Égyptologie au Musée du Louvre, en 1826. De 1828 à 1830, il mène avec Ippolito Rossellini une expédition scientifique en Égypte. À son retour, il publie Monuments de l’Égypte et de la Nubie. Nommé membre de l’Académie des inscriptions en 1830, il reçoit l’année suivante la chaire d’égyptologie créée spécialement à son intention à l’Institut de France. Il meurt en 1832 laissant inachevé la Grammaire égyptienne et le Dictionnaire égyptien, finalement publiés par son frère en 1836 et 1841.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°203 du 19 novembre 2004, avec le titre suivant : Sous le signe de Champollion