Les colonnes de Buren, le Pont-Neuf par Christo... La commande publique est tantôt saluée, tantôt décriée. Alors celle-ci a-t-elle démocratisé l’art ? En diversifiant ses expressions au détriment du monumental, ne risque-t-elle pas de perdre sa visibilité ? Enquête.
La commande artistique a toujours entretenu des rapports, plus ou moins étroits, avec le pouvoir politique. De la cité grecque à l’Empire, de la monarchie à la république, les grands de ce monde ont cherché à asseoir leur pouvoir grâce aux artistes : statues ou peintures les représentant en buste ou en pied, mais aussi monuments symboliques, fresques, plafonds ornementaux, etc. Pourtant, la commande publique a été progressivement réinventée au cours du xxe siècle afin de viser un autre objectif, démocratiser l’art en le diffusant là où il n’était pas attendu : dans l’espace public, le long d’une ligne de tramway, dans les stations de métro ou les gares, dans les tunnels, les parkings…
Au cours de ces vingt-cinq dernières années, le ministère de la Culture et ses services ont passé plus de 700 commandes auprès de 400 artistes différents, menant ainsi une politique unique en Europe. Les expressions se sont à leur tour diversifiées, de la sculpture au design, des métiers d’art aux nouveaux médias, de la photo au graphisme, sans oublier le paysage, la lumière, la vidéo… Certaines œuvres sont désormais « fonctionnelles » alors que d’autres sont éphémères. « La commande publique est un axe majeur de notre politique ; il est capital que l’art existe dans le tissu urbain en dehors des lieux qui lui sont dédiés. Une société ne peut vivre sans imaginaire, sans esthétique », souligne Olivier Kaeppelin, délégué aux arts plastiques au ministère de la Culture.
« Il faut laisser à l’œil le temps de s’habituer »
Aujourd’hui l’État, qui a consacré 3,68 millions d’euros en 2008 à la commande publique – un budget réparti à peu près à égalité entre crédits centraux et financements déconcentrés en région – se repose de plus en plus sur les collectivités territoriales. À l’occasion du développement de leurs transports urbains ou lors de grand-messes festives, ces dernières se lancent dans des commandes ambitieuses en s’appuyant sur les conseils d’un petit noyau d’experts.
Mais quel bilan faut-il dresser de ces initiatives ? Ces musées sans murs ont-ils rencontré leur public ou sont-ils encore considérés comme les coûteuses danseuses des élus ? « Certaines œuvres les plus contestées lors de leur édification, tels Les Deux Plateaux de Buren au Palais-Royal, sont aujourd’hui considérées comme les plus réussies », observe François Barré, aujourd’hui directeur artistique de nombreuses commandes publiques, hier à la tête du Centre Pompidou ou de la Direction de l’architecture et du patrimoine au ministère de la Culture. « Il faut laisser le temps à l’œil de s’habituer », poursuit David Caméo, directeur de la Manufacture nationale de Sèvres, qui a suivi ces questions Rue de Valois.
La commande publique doit-elle donc bousculer, anticiper sous peine d’être rapidement démodée, au risque de déplaire ? Une évidence : la commande publique est une équation complexe à résoudre, exigeant beaucoup de courage politique et de volontarisme.
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Les rouages de la commande publique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°610 du 1 février 2009, avec le titre suivant : Les rouages de la commande publique