ELNE
"C'est une catastrophe pour la municipalité", Yves Barniol le maire d'Elne, une petite commune située à une dizaine de kilomètres au sud de Perpignan, ne décolère pas depuis la découverte de l'escroquerie qui a ébranlé le musée de la ville.
La collection, entièrement consacrée à l'enfant du pays, le peintre "méditerranéiste" Etienne Terrus, était composée à 60 % par de faux tableaux, dessins ou aquarelles. Vendredi, c'est à bas bruit que ce village de 8.000 âmes a inauguré son musée entièrement rénové et désormais amputé de plus de la moitié de ses oeuvres. "Etienne Terrus est le grand peintre d'Elne, il fait partie de la commune, c'est le peintre de chez nous", lance le maire. Contrit, il ajoute: "de savoir que des gens sont venus dans ce musée et ont vu plus de la majorité de faux, je le vis très mal".
C'est presque par hasard que le pot aux roses a été découvert. Depuis cinq ans, quelque 80 pièces ont été achetées pour enrichir la collection. "En 2013, la précédente équipe municipale avait acheté 16 oeuvres. En 2015 des associations locales ont acquis 47 oeuvres en lançant une souscription, auxquelles s'ajoute un leg de 13 pièces provenant de la collection privée d'Odette Traby, au décès de la fondatrice du musée", explique l'historien d'art et commissaire d'expositions, Eric Forcada. Il a été missionné l'été dernier par la mairie pour réorganiser l'institution autour de ces nouvelles acquisitions qui proviennent "majoritairement de chez des antiquaires" de la région. Dès le premier coup d'oeil, il se rend compte que la plupart de ces oeuvres sont des faux. "Sur un tableau, la signature à l'encre s'effaçait lorsque je passais dessus avec mon gant blanc". Il alerte l'adjointe à la culture et demande la réunion d'un collège d'experts pour confirmer ces dires. "Au niveau stylistique c'est grossier, des supports en coton ne correspondent pas aux toiles utilisées par Terrus et il y a parfois des anachronismes", explique Eric Forcada. Bilan, 82 oeuvres sur les 140 de la collection sont des faux.
Un marché de l'art gangréné
"J'espère que l'enquête ira au bout. Nous, nous ne lâcherons pas. On va rechercher tous les éléments, les délibérations, les certificats qui nous permettront de remonter jusqu'aux faussaires", lâche le maire. Début avril, la municipalité a décidé de porter plainte notamment pour faux, usage de faux, contrefaçons et escroqueries. Pour Eric Forcada, "tout le marché de l'art au niveau local est gangréné. Du vendeur à la sauvette qui démarche les collectionneurs privés jusqu'aux antiquaires, en passant par les salles des ventes", affirme-t-il.
Même si cette constatation vaut en dehors du département, l'historien d'art relève un "particularisme local" : "Il y a dans les Pyrénées-Orientales énormément de collectionneurs privés, avec un « narcissisme local » poussé et qui sont extrêmement attachés aux artistes locaux". Selon lui, les oeuvres d'Etienne Terrus pouvaient atteindre avant cette affaire, "entre 6.000 et 15.000 euros pour les tableaux et de 2.000 à 3.000 euros pour les dessins et aquarelles".
La brigade de recherche de Perpignan a été chargée des investigations pour débusquer les faussaires et les intermédiaires peu scrupuleux qui ont écoulé toutes ces contrefaçons. "Ces dernières années, on a vu passer en salle des ventes des oeuvres hallucinantes, dont des « Terrus »", affirme encore M. Forcada, expliquant que le "défaut d'authentification" est souvent lié à l'absence d'ayants droit.
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Le musée d'Elne décimé après la découverte de 82 faux tableaux
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