PIERREFONDS
Le site, géré par le Centre des monuments nationaux, a bien besoin de cette restauration d’un montant de 7 millions d’euros, dont le financement vient en partie du plan de relance. Les travaux commenceront en janvier 2022.
Pierrefonds. Dans l’Oise, la petite ville de Pierrefonds et ses habitations pittoresques s’étendent en contrebas de l’imposant château, dont la silhouette suffit à attiser l’imagination. Véritable décor de film propre à recréer une atmosphère médiévale sublimée, cette forteresse fut construite à la toute fin du XIVe siècle pour le duc Louis d’Orléans, frère de Charles VI, dans un contexte de « défi permanent » avec ses rivaux, explique Xavier Bailly, l’administrateur du site, qui dépend du Centre des monuments nationaux (CMN). Démantelé sous Louis XIII, l’édifice est un temps abandonné avant d’être acquis par Napoléon Ier en 1810. L’esthétique de la ruine, prisée à l’époque romantique, participe de sa redécouverte. Louis-Philippe y organise notamment les noces de sa fille Louise avec Léopold Ier de Belgique en 1832, tandis que les années 1840 constituent un tournant pour le village dont les eaux ferrugineuses et sulfureuses en font une station thermale réputée.
Situées non loin de Compiègne, siège de la résidence impériale sous le Second Empire, les ruines de Pierrefonds gagnent en intérêt. En 1857, sur sa cassette personnelle, « Napoléon III confie à Eugène Viollet-le-Duc la création d’un palais impérial dans le donjon du château », raconte Xavier Bailly. L’architecte – qui fut également responsable, entre autres, de la restauration de la Sainte-Chapelle et de Notre-Dame de Paris – s’attelle donc à rebâtir ce château qui tient pour beaucoup de ses propres théories architecturales visant à recréer un château médiéval idéal.
Le projet de résidence impériale n’aboutit pas et le château ouvre finalement en tant que musée en 1867, et notamment la vaste salle des Preuses (féminin de « preux ») qui tire son nom de sa cheminée représentant neuf figures féminines aux attributs chevaleresques – dont l’impératrice Eugénie au centre. Décédé en 1879, Eugène Viollet-le-Duc ne verra pas la fin du chantier, repris par son gendre jusqu’en 1885.
Viollet-le-Duc, architecte et théoricien, n’hésitait pas à avoir recours à des matériaux et techniques modernes, tels que les châssis de fenêtre et charpentes métalliques mais aussi les crochets en cuivre pour fixer les ardoises de la toiture. Autant d’éléments aujourd’hui usés et oxydés, qui nuisent à l’intégrité de la toiture et de la maçonnerie. « Nous assurons une veille permanente et effectuons un signalement dès que nous voyons qu’une ardoise a glissé », explique Xavier Bailly. Un bilan établi en 2019 a révélé les nombreuses altérations notamment dans le système d’écoulement des eaux, abîmant les pierres et provoquant, en interne, des décrochements de l’enduit peint sur la voûte de la salle des Preuses.
Les travaux étaient donc incontournables, pour un coût estimé autour de 17 millions d’euros. Mais le CMN ayant déjà engagé pour 20,6 millions d’euros de travaux pour ses autres sites, il lui était difficile de disposer de cette somme à ce moment-là.
Le chantier devait de fait être priorisé et fragmenté. L’enveloppe de 7 millions d’euros – dont 2 millions accordés dans le cadre du plan de relance (sur les 140 millions dont le CMN a bénéficié) et 5 millions d’euros de fonds propres – servira donc dans un premier temps à la restauration de la façade et de la toiture de l’aile des Preuses, de ses tours attenantes – la tour Alexandre et la tour Godefroy de Bouillon –, ainsi que du décor de la voûte de la salle des Preuses.
Le chantier, qui débutera en janvier 2022, « nécessitera un échafaudage assez spectaculaire » selon l’administrateur du site. Sur les 57 mètres de long de cette façade richement ornée, les altérations sont bien visibles. « Des compagnons du devoir travailleront sur le chantier », ajoute Xavier Bailly. Le plan de relance, dans son volet culturel, accorde une place à la valorisation des métiers et des savoir-faire qui se retrouvent sur un tel chantier. « Il y aura indéniablement quelque chose à faire du point de vue de la médiation, nous en étudions les modalités. »
Une telle campagne de travaux peut aussi devenir l’occasion de redynamiser la fréquentation. En 2019, le château accueillait quelque 150 000 visiteurs. « On est en deçà du potentiel réel du château », estime Xavier Bailly, qui ne cache pas son ambition pour ce site.« Cette restauration est une opportunité triple : premièrement, elle participe de la conservation et du sauvetage du patrimoine ; deuxièmement, elle est l’occasion d’un enrichissement de la connaissance scientifique du monument, puisqu’elle permet de le documenter ; et enfin, elle permet de nourrir le projet culturel. »
« La programmation 2022 s’appuie sur ce chantier dans toutes ses dimensions, et notamment les professionnels qui œuvreront à la restauration du monument », conclut-il. En attendant, l’exposition « Eugénie, Impératrice de la mode » se tient prête à ouvrir ses portes dès que la situation sanitaire le permettra.
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Le château de Pierrefonds au seuil d’une grande restauration
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°566 du 30 avril 2021, avec le titre suivant : Le château de Pierrefonds au seuil d’une grande restauration