PARIS
En gestation depuis une dizaine d’années et deux mois après son inauguration, le Musée des plans-reliefs vient, enfin, d’ouvrir ses portes au public. Y sont présentées 28 maquettes de sites français. Outils de stratégie et d’enseignement militaires, leur construction s’est étalée sur plus de deux siècles (1668-1870).
PARIS. Une douce lumière inonde la rade de Toulon et la campagne toute proche. Quelques éléments des fortifications qui défendent la cité et le port se détachent, comme le fort Lamalgue ou celui d’Artigues. Ainsi apparaît sous nos yeux, sur 28 m2 et en trois dimensions, la ville de Toulon telle que la vît un certain capitaine Bonaparte, lors du siège de 1793 contre les Anglais. Exécutée entre 1796 et 1800, cette reproduction minutieuse est l’une des 28 maquettes présentées dans le nouveau Musée des plans-reliefs, qui s’installe dans les combles de l’Hôtel des Invalides. Dans la pénombre de la galerie d’Arçon émerge une collection d’îlots, reconstitutions de villes ou d’édifices. Ils retracent l’histoire des places fortes de la Manche, de l’Atlantique, des Pyrénées et de la Méditerranée. Le plan-relief de Belle-Île, par exemple, montre les derniers travaux (1680-1705) réalisés par Vauban pour compléter la défense du golfe du Morbihan. Plus loin, les forts de la Rade (île d’Aix) ou de La Conchée (rade de Saint-Malo) sont reproduits avec moults détails. Le Château-Trompette (Bordeaux), démoli sous la Restauration en vue de l’édification de la place des Quinconces, est même démontable. Quant au Mont-Saint-Michel, un judicieux système permet de l’ouvrir jusqu’à dévoiler le retable. Le visiteur peut évoluer autour de ces étonnants fragments d’architecture et d’urbanisme. Le parcours se veut pédagogique, "sans être assommant", assure le conservateur, Max Polonovski. Quelques informations – situation, historique et vue aérienne récente – suffisent à une bonne compréhension. D’un seul coup d’œil, on peut comparer les sites d’hier et d’aujourd’hui. À Oléron, les marais salants actuels ont pratiquement gardé leur emprise du XVIIIe siècle. En revanche, la ville a poussé sur les terrains jadis réservés aux vignobles.
Nomination d’un directeur financier
Conçue par l’architecte Christian Germanaz, la muséographie est sobre. La fragilité des plans-reliefs en a guidé les grandes lignes. Ainsi, pour d’évidentes raisons de conservation, la lumière naturelle a été proscrite au profit d’un éclairage par fibre optique. À l’intérieur des vitrines, un air neuf pulsé évite l’empoussiérage et maintient une humidité et une température (18°) stables. Trop grandes pour la galerie d’Arçon, les maquettes de Brest (130 m2) et Cherbourg (150 m2) seront présentées dans la salle Dantzig, réservée aux expositions temporaires. L’ouverture du Musée des plans-reliefs met provisoirement un terme à plusieurs années mouvementées pour la collection, dues notamment aux alternances politiques. En 1984, Pierre Mauroy, maire de Lille, décide de récupérer le plan-relief de sa ville. La collection, qui avait été classée monument historique dès 1927, est indivisible. Invoquant la décentralisation, l’édile obtient de la transférer dans la métropole lilloise. Mais ce déménagement sera interrompu en 1987, lors de la première cohabitation, par le nouveau ministre de la Culture, François Léotard. Ne pourront alors demeurer au Musée des beaux-arts de Lille que les maquettes qui concernent la région du Nord. Les autres seront rapatriées aux Invalides. En parallèle, une mission est chargée d’étudier la création d’un futur Musée des plans-reliefs. Un an plus tard, des architectes sont choisis pour réaliser le projet. Mais, en 1990, le coût des travaux – 100 millions de francs – est jugé trop élevé par le directeur du Patrimoine, Christian Dupavillon. Une seconde esquisse, revue à la baisse, sera élaborée. Retardés cette fois pour des problèmes de coordination (avec le ministère de la Défense) et de sécurité, les travaux, dont le montant total est estimé à 85 millions de francs, ne démarreront finalement qu’en 1995. À terme, en 2001, le Musée des plans-reliefs occupera les quatre ailes entourant la cour d’Honneur des Invalides. Or, ce redéploiement ne prévoit aucune place pour les maquettes restées à Lille... Au détriment de la cohérence de la collection.
Musée des plans-reliefs, Hôtel des Invalides, 75007 Paris, tél. 01 45 51 95 05, tlj sauf 1er janvier, 1er novembre et 25 décembre, 10h-12h30 et 14h-17h (du 1er octobre au 31 mars), 10h-12h30 et 14h-18h (du 1er avril au 30 septembre). Billet d’accès commun avec le Musée de l’Armée, entrée : 37 F (tarif réduit : 27 F). Catalogue par Isabelle Warmoes, éditions du Patrimoine, 72 p., 72 F.
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L’art militaire mis en relief
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°43 du 12 septembre 1997, avec le titre suivant : L’art militaire mis en relief