Si les projets de musées à Abou Dhabi n’en sont pour l’heure qu’au stade de maquette, le pays voisin du Qatar a inauguré tambour battant son musée d’Art islamique en novembre 2008.
Initialement programmée pour ouvrir en mai 2006, cette institution n’est pas la première du genre dans la région. Le Koweït avait donné le « la » voilà quelques années avec le Dar al athar al Islamiyyah, mais le musée créé par le cheikh Nasser fut pillé lors de l’invasion par l’Irak en 1990, les objets n’ayant été rendus que péniblement par la suite.
Le Qatar s’est alloué les services d’une griffe de l’architecture, I.M. Pei. Le résultat laisse néanmoins aussi perplexe qu’au Mudam à Luxembourg. Si l’emboîtement de cubes extérieurs n’est pas trop choquant, la vue intérieure se trouve, elle, parasitée par une succession d’effets qui ne permettent guère de porter le regard haut.
Autant l’architecture laisse à désirer, autant la scénographie de Jean-Michel Wilmotte combinant pierres sciées et bois précieux brille par son élégance raffinée. Certes des cartels plus étoffés n’auraient pas été inutiles dans un pays où la pédagogie n’en est qu’à ses balbutiements. De même, le côté taupinière à grands effets de lumière tamisée convient davantage aux lycanthropes qu’aux arpenteurs de musée. Mais la fabuleuse richesse des collections balaie les bémols.
Alors qu’Abou Dhabi importe une culture clés en main, le Qatar a lui-même construit sa collection de plus de quatre mille objets depuis une vingtaine d’années, grâce notamment au très controversé cheick Saoud Al-Thani, désavoué puis réhabilité par son cousin l’émir. Alors que le premier étage déploie les pièces majeures de la collection, les deux autres niveaux dévident un parcours chronologique dominé par les textiles et les arts du livre. On reste ainsi pantois devant plusieurs pages du manuscrit du Livre des rois commandé par Shah Tahmasp. La section des bijoux n’a guère à rougir avec notamment un pendentif en jade moghol ayant appartenu à Shah Jahan. Le visiteur va de découverte en diversion, s’attarde sur la pureté minimale d’un bol en céramique calligraphiée du ixe siècle avant de se perdre dans les ciselures d’un sublime chandelier.
En revanche l’exposition inaugurale, « Beyond boundaries: islamic Art across cultures », dédiée aux liens Est-Ouest fait figure de tarte à la crème en mettant l’accent sur l’ouverture d’esprit du Qatar. Certes le pays, adoubé capitale culturelle du Moyen-Orient en 2010, s’initie aux impératifs de la communication. Mais le chemin pour une tolérance sans étau est encore long…
Musée des Arts islamiques, Baie ouest, Doha (Qatar), , ouvert en novembre 2008.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Doha, nouvelle destination culturelle
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°610 du 1 février 2009, avec le titre suivant : Doha, nouvelle destination culturelle