Le sculpteur bénéficie enfin à Paris dans son musée-atelier d’un parcours permanent chronologique sur sa vie et son œuvre.
Paris - Le réaménagement récent des collections permanentes du Musée Bourdelle est plus qu’un simple lifting, c’est un acte de foi. Amélie Simier, la directrice des lieux depuis janvier 2011, a voulu marquer une rupture avec les visées de son prédécesseur Juliette Laffon et réinstaller Antoine Bourdelle dans sa demeure. Assisté de Colin Lemoine, attaché de conservation, elle a créé un parcours permanent sur la vie et l’œuvre du sculpteur, dans des espaces jusqu’alors sans affectation fixe. En cinq salles et un couloir, le visiteur peut enfin appréhender toute la richesse d’une œuvre qui ne se résume pas à Héraklès archer et Centaure mourant, comme on pouvait en avoir l’impression en entrant dans le grand hall des plâtres. Ces espaces occupent d’anciens ateliers de Bourdelle qui ont pour l’occasion bénéficié d’un rafraîchissement. Mais les amateurs de reconstitution peuvent être rassurés, le vieil atelier du maître est toujours là, « dans son jus ».
Ce lieu est en effet l’un des rares musées à occuper le site où l’artiste a vécu et travaillé pendant 44 ans. De 1885, date de son installation au 16, impasse du Maine (aujourd’hui rue Antoine Bourdelle) jusqu’à sa mort en 1929, le Montalbanais a plusieurs fois étendu son atelier d’origine. Un effort particulier a été porté sur la pédagogie : cartels, panneaux explicatifs, scénographie ont été créés ou revus permettant de mieux connaître la biographie du sculpteur et de comprendre les techniques mises en œuvre en sculpture. Même si l’accrochage précédent le laissait deviner, notamment dans les variations sur la tête de Beethoven, les figures que constituent La Nonne (1888, bois), Le Jour et la Nuit (1904 marbre), ou Le Baiser craquelé (1907, porcelaine) révèlent un Bourdelle symboliste, encore proche de Rodin dont il fut le praticien, mais très différent du Bourdelle marqué par l’archaïsme grec.
Affirmation d’une identité
C’est donc une nouvelle étape pour un musée atypique. Si dès 1920, Bourdelle songeait à léguer tout son fonds à l’État et imaginait un nouveau bâtiment pour un musée qui lui serait dédié, c’est finalement sa seconde femme et ancienne élève, Cléopâtre Sevastos, qui inaugure en 1949 ce lieu. Administré par leur fille Rhodia Dufet-Bourdelle jusqu’à son décès en 2002, ce n’est qu’avec la nomination de Juliette Laffon en 2003 que ce musée de la Ville de Paris se réveille ; non sans garder son charme désuet qui séduit les visiteurs étrangers, en dépit de la construction en 1992 d’une extension très minérale signée Christian de Portzamparc. Juliette Laffon joue résolument la carte art contemporain, au risque, assumé, de heurter le public habituel. La fréquentation augmente plus ou moins selon la programmation, pour atteindre 68 000 visiteurs en 2011. Le Musée Bourdelle occupe le 96e rang du dernier Palmarès des musées du Journal des Arts et dispose d’une marge de progression s’il réussit à augmenter sa notoriété et bâtir une identité capable d’attirer un large public tout en restant cohérente avec la vocation des lieux. Plusieurs pistes se présentent à Amélie Simier, qui dirige également le Musée Zadkine : un musée de la sculpture du XXe et du XXIe comme l’envisageait Juliette Laffon, un site dédié à Bourdelle et son époque, un centre d’art contemporain
Mais quelle que soit la solution retenue, il lui faudra dégager un espace d’exposition temporaire plus étendu que l’actuel.
18 rue Antoine Bourdelle, 75015 Paris, tel 01 49 54 73 74, mardi-dimanche 10h-18h, entrée 7 euros
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Bourdelle revient chez lui
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Abonnez-vous dès 1 €Vue du nouveau parcours des collections du Musée Bourdelle, juillet 2012 - © Photo : Pierre Antoine
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°374 du 7 septembre 2012, avec le titre suivant : Bourdelle revient chez lui