Transition écologique. Trois enseignements peuvent être tirés de notre grand dossier sur la décarbonation des musées que nous avons voulu très didactique.
D’abord les chiffres. Les nombreux organismes qui se penchent sur l’état de notre pauvre planète en produisent beaucoup mais ces chiffres entretiennent une telle confusion dans les unités de mesure qu’ils ne veulent rien dire pour les non spécialistes. Les rapports mélangent CO2 et équivalent CO2, émissions brutes et émissions nettes de gaz à effet de serre (GES), approche « inventaire » et approche « empreinte » de sorte qu’il est difficile de faire des rapprochements et donc de s’approprier ces chiffres. C’est comme si on passait indifféremment des anciens francs aux euros en passant par les nouveaux francs (pour les plus de 40 ans).
Deuxième enseignement. Même si les Français retournaient au Néolithique en vivant dans des grottes et se nourrissant de cueillettes ou que l’on remplaçait les musées par des camions électriques et des bateaux à voile avec des écrans alimentés par énergie solaire à la place de vraies œuvres d’art, cela ne changerait strictement rien au réchauffement de la planète si nos amis chinois continuent à utiliser le charbon pour fabriquer leur électricité. La Chine a même mis en chantier la construction de plusieurs nouvelles centrales. En Allemagne, la centrale à charbon de Neurath émet trois fois plus de CO2 que tout le secteur culturel en France : oui trois fois plus !
Troisième enseignement, l’essentiel des émissions de GES des musées provient du transport des visiteurs pour venir en France puis dans le musée : 99 % dans le cas du Louvre. Ce qui veut dire qu’à moins d’interdire aux Chinois et Américains de venir au Louvre, le musée ne peut jouer que sur 1 % de ses émissions.
Entendons-nous bien, il ne s’agit pas d’exonérer la France de ses responsabilités au motif que quels que soient ses efforts, ils n’auront aucun impact sur l’augmentation de la température. La France des Lumières doit donner l’exemple pour être crédible quand, par exemple, elle dispense des leçons de Droit de l’homme. Il ne faut cependant pas habiller d’écologie des enjeux économiques en justifiant ne pas faire venir des prêts d’œuvres par avion ou se féliciter d’avoir réutilisé les cimaises de l’exposition précédente. Cela relève du symbolique (ou de la communication), mais pour que le registre symbolique dont on sait l’importance continue à opérer, il doit être mesuré.
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La décarbonation des musées en trois constats
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°636 du 21 juin 2024, avec le titre suivant : La décarbonation des musées en trois constats