Le documentaire suit l’écrivain et scénariste Jean-Claude Carrière sur les traces de Goya en Espagne dans un voyage plus émouvant que réellement construit.
Le titre, L’Ombre de Goya par Jean-Claude Carrière, est aussi énigmatique que le scénario est confus. D’ailleurs, son réalisateur, José Luis López-Linares, le reconnaît lui-même dans le dossier de presse : « La narration s’est construite […] au montage […] Nous avons commencé à monter et la structure du film a émergé plus tard. » Sauf que le spectateur a bien du mal à saisir la cohérence de ladite structure ; une seule chose est sûre, ce n’est pas un biopic.
L’intention de départ est cependant claire : suivre l’écrivain et scénariste Jean-Claude Carrière dans son périple en Espagne sur les traces de Francisco de Goya (1746-1828). Ces séquences ne manquent pas d’intérêt, Carrière est un merveilleux conteur qui sait mieux que personne exprimer ses émotions face à un tableau du peintre. Mais pour émouvantes qu’elles soient lorsqu’on sait qu’elles ont été enregistrées quelque temps avant sa disparition en février 2021, ces moments de subjectivité n’en disent pas beaucoup sur la vie et l’œuvre de Goya, et il est difficile de faire un film entier sur ce seul matériau. Carrière et le réalisateur en avaient-ils conscience ? La disparition du scénariste a-t-elle bouleversé les plans initiaux ? Toujours est-il que les séquences tournées avec Carrière sont entrecoupées de longs entretiens menés avec des personnalités diverses. Ces entretiens, de même, ne manquent pas d’intérêt lorsque c’est une conservatrice du Louvre qui s’exprime ou un médecin qui raconte la maladie à l’origine de la surdité de Goya ; nettement moins lorsque ce sont des visiteurs de la récente rétrospective du peintre à la Fondation Beyeler en Suisse. Le scénario fait quelques incursions sur l’influence (l’ombre ?) du peintre sur les artistes du XXe siècle, mais pourquoi accorder autant d’importance au cinéaste Luis Buñuel, si ce n’est parce que Carrière en a été le scénariste et à l’occasion son complice ?
On peut cependant faire crédit au film de suivre un ordre chronologique jalonné des grandes étapes de la vie et de la production de Goya : les portraits de cour dont la fameuse duchesse d’Albe, les taureaux, « Les Désastres de la guerre », les fresques de sa maison (« Les peintures noires »)… Et saluer également le réalisateur pour avoir su filmer les œuvres, ce qui permet d’apprécier ce formidable portraitiste qu’était Goya. Doit-on se précipiter dans les salles à partir du 21 septembre et payer 14 euros pour le voir ? Pas sûr.
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Un « Goya » qui manque d’ossature
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°595 du 23 septembre 2022, avec le titre suivant : Un « Goya » qui manque d’ossature