À la notation, ces deux concurrents du « Guide Vert » ont jusqu’ici préféré miser sur l’expression des professionnels des musées concernés tout en récoltant l’avis du public.
« Au début, nous n’étions pas vraiment en faveur de la notation », reconnaît Stéphan Szeremeta, directeur éditorial du Petit Futé. « Mais nous avons cédé lors du lancement de la nouvelle formule, dans un souci de hiérarchisation. » Depuis 2020, les étoiles ne sont donc plus l’apanage du Guide Vert. Cependant, au Petit Futé, on fait attention à ce qu’elles ne deviennent pas seulement un jugement sans appel. « Ce qui peut être important pour quelqu’un ne l’est pas forcément pour une autre personne », indique Stéphan Szeremeta. À la notation systématique, l’éditeur préfère donc un descriptif précis, grâce auquel chacun peut identifier l’expérience lui correspondant le mieux. « Il est normal que la majorité des lieux n’aient pas d’étoiles : c’est simplement une façon de distinguer un établissement au milieu d’un parcours », insiste-t-il. L’objectif est de montrer qu’outre les grandes villes, chaque destination possède un point d’intérêt particulier, sans pour autant attribuer quatre étoiles à un musée parce qu’il est le seul de son territoire. La recherche du juste équilibre est constante, mais guidée par un système fonctionnant sans critères déterminés.
Du côté du Routard, où l’on n’a pas encore franchi l’étape des étoiles, les recommandations reposent également sur des critères qui ne sont pas gravés dans le marbre. Pour éviter que les comptes rendus ne soient trop biaisés, les visites se font souvent en plusieurs fois. « Pour le Musée [national de l’histoire] de l’immigration, par exemple, je vais y aller, mais nous enverrons certainement un deuxième collaborateur : il écrira son texte et nous confronterons nos points de vue », explique Philippe Gloaguen, cofondateur et directeur du guide Le Routard. Afin d’être le plus précis possible, la soixantaine d’employés du Routard compte même quelques experts : « tout le monde écrit sur les musées, mais certaines personnes sont dévolues à des courants artistiques en particulier », détaille Philippe Gloaguen. Au Petit Futé, la répartition des sites s’opère plutôt en fonction des aires géographiques occupées par les salariés.
Pour les deux publications, les pratiques de notation – ou de non-notation – diffèrent donc fondamentalement de celles du Guide Vert, mais cela n’empêche en rien les professionnels de la culture de leur accorder la même attention. « Les conservateurs et les directeurs et directrices de communication ont un rôle très important, confirme Philippe Gloaguen. Ils nous avertissent tout de suite en cas de changements au sein des musées. » Relectures des textes, corrections d’informations, suggestions de modifications sur le fond, apport d’anecdotes… Les équipes muséales enrichissent les textes à l’aide de tout élément nécessaire à leur rédaction.
L’information du public, c’est bien ce qui prime pour les directeurs éditoriaux, plus encore qu’une notation pouvant facilement prendre une teinte critique. L’anonymat n’est donc pas automatique lors des enquêtes. « Si nos rédacteurs sont identifiés comme appartenant au Petit Futé, ce n’est pas un drame, lance Stéphan Szeremeta. Quand un musée est mal organisé, avec des cartels aux caractères trop petits et un éclairage mauvais, le fait que notre rédacteur soit anonyme n’y changera rien ! » Bien sûr, devant un problème caractérisé, les publications concurrentes s’accordent tout de même à dire qu’il vaut mieux écrire un texte négatif plutôt que ne rien dire. « Ne pas parler d’un musée, c’est rare, affirme le père du Routard. Et si on réalise que nous sommes face à un piège à touristes, on écrira trois lignes pour le critiquer. »
Face à des critères fluctuants, et à une sélection subjective parfois dictée par une pagination réduite, Petit Futé comme Le Routard ont tous deux imaginé une option complémentaire : celle du recueil des avis du grand public, sur leur site Internet. L’expérience des professionnels est ainsi complétée par les impressions des touristes, pour aboutir à des recommandations toujours plus précises et personnalisées.
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« Le Routard » et « Petit Futé », une autre façon de classer les musées
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°615 du 7 juillet 2023, avec le titre suivant : « Le Routard » et « Petit Futé », une autre façon de classer les musées