Le designer industriel transpose dans un langage artistique son vocabulaire fait de formes géométriques élémentaires.
Saint-Paul-de-Vence (Alpes-Maritimes). C’est la première exposition d’Ora-ïto (né en 1977) en galerie en tant qu’artiste, lui qui est avant tout connu comme designer. Lorsqu’on lui demande l’origine de cette nouvelle démarche, sa réponse fuse comme une évidence : « Elle s’inscrit à la fois dans la continuité et constitue un redémarrage. » La continuité saute aux yeux tant ses nouvelles œuvres perpétuent son vocabulaire, sa grammaire, son « langage volumique » selon ses propres termes. L’exposition de la Podgorny Gallery est d’ailleurs explicitement intitulée « Grammatology, part one ».
Dans ces reliefs muraux, composés de plaques en aluminium peintes comme une carrosserie et fixées sur des supports en résine minérale, on retrouve les formes arrondies, bombées qui ont toujours caractérisé son travail. Ora-ïto n’a en effet jamais parlé l’angle droit. « J’ai toujours pensé que ces formes rondes viennent du souvenir du temps passé dans le ventre de ma mère, elles perpétuent une sorte de plénitude », précise-t-il. Se retrouve également son attirance pour la monochromie, pour l’intensité et l’énergie de la couleur, pour ses variations et ses subtilités. « J’ai une obsession pour le cercle chromatique. C’est la première chose que j’ai apprise, comme un passage de flambeau d’une couleur à l’autre. »
Quant au « redémarrage », Ora-ïto indique : « Au bout de vingt-cinq ans de production dans tous les domaines du design, vélo, avion, train, téléphone portable, etc., tous les objets dans toutes les typologies possibles, j’ai eu besoin de me calmer. » Il a sans doute ressenti aussi le désir de créer des formes pour une fois détachées de toute fonctionnalité et de passer d’une création par le biais d’outils numériques, dont il fut l’un des pionniers, à la conception en direct d’une œuvre.
Aux termes « continuité » et « redémarrage » employés par l’artiste, on pourrait ajouter celui de « perspective » tant cette nouvelle pratique lui ouvre des voies inédites. Là en effet, il est libre, exempté des contraintes et de la pesanteur inhérentes à ses réalisations en design, notamment le tramway de la ville de Nice, le métro de celle de Marseille ou encore, dans un registre différent, de la responsabilité du MaMo, l’immense toit-terrasse de la Cité radieuse de Le Corbusier à Marseille où il invite des artistes (Daniel Buren, Jean Pierre Raynaud…) à proposer des installations à grande échelle.
Avec ses œuvres en relief, Ora-ïto a pris goût à l’apesanteur ; libérés de leur poids, ses objets peuvent être accrochés à la hauteur qu’il désire. Il joue avec l’évanescence de leurs ombres. Il peut aussi, selon l’accrochage choisi, les faire tourner sur eux-mêmes, comme des hélices asymétriques. Sans orientation particulière ni position prédéterminée, ces reliefs sont comme suspendus, aériens.
Entre 20 000 et 50 000 euros, le prix des œuvres est lui aussi aérien et même relativement élevé. Il peut s’expliquer par des coûts de production importants et parce qu’elles sont signées… « Ora-ïto ». Une marque.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Ora-ïto versant art
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°635 du 7 juin 2024, avec le titre suivant : Ora-ïto versant art