Traditionnellement tournée vers les arts anciens, la foire bruxelloise a convié cette année un plus grand nombre de galeries dévolues à l’art contemporain.
BRUXELLES - La Brafa (Brussels Art Fair) est quasiment entrée dans l’histoire. Considérée comme l’une des plus anciennes foires d’art et d’antiquités dans le monde, elle entame sa 62e édition, toujours sur le site de Tour & Taxis. Si la Brafa ne subit pas de remaniements aussi profonds qu’elle a connus l’an passé (agrandissement de l’espace, nouveau plan au sol, nombre élargi de participants…), elle comporte une nouveauté de taille : un pôle d’art contemporain y est installé pour la première fois. Il vient renforcer la section qui était sous-représentée jusqu’alors, l’augmentant de 10 %. « Nous avions de plus en plus de sollicitations de la part de ce type de galeries y compris de la part du public », confie le président, Harold t’Kint de Roodenbeke. Aussi, la plupart des enseignes qui participent pour la première fois à la manifestation sont exclusivement rattachées à cette discipline ; elles sont, pour la grande majorité d’entre elles, belges. « Pour une galerie d’art contemporain qui fêtera ses 40 ans en mars, la décision de participer à cette foire généraliste repose sur plusieurs facteurs. Outre son organisation remarquable, elle offre la possibilité de toucher un nouveau public qui ne vient pas toujours dans les foires d’art contemporain », explique la galerie Bernier/Eliades (Athènes, Bruxelles), qui montre une céramique de l’artiste allemand Thomas Schütte, Blumenoval, de 2014. Sont également de la partie la galerie Rodolphe Janssen (Bruxelles), qui apporte une gravure de 2016 des jumeaux Gert et Uwe Tobias ; Patrick De Brock (Knokke-le-Zoute) qui présente des œuvres d’Imi Knoebel et Dan Walsh ou encore la galerie Omer Tiroche (Londres).
13 nouvelles galeries
Pour son édition 2017, la Brafa rassemble 132 exposants, contre 137 l’an passé. Pas moins de 45 galeries sont françaises, 58 sont belges et 29 sont étrangères (essentiellement venues d’Europe). En tout, seize pays sont représentés, mais les galeries américaines sont absentes. « Globalement, d’une année sur l’autre, il n’y a que 10 % à 15 % de turnover car les marchands sont fidèles à la Brafa. Ceci est un bon baromètre », affirme Harold t’Kint de Roodenbeke. Environ une quinzaine de galeries ne sont pas revenues, à l’exemple de De Jonckheere (Genève, Paris), Dutko (Paris), Dario Ghio (Monaco) ou encore François Léage (Paris). « Mon absence est exceptionnelle. J’ai simplement un autre projet qui tombe aux mêmes dates », explique Guillaume Léage. Et si les galeries conservent d’une année sur l’autre leur emplacement, ces défections ont permis à certaines, telle Stern Pissarro (Londres), d’obtenir un stand plus vaste.
En contrepartie, la foire accueille treize nouvelles enseignes. Pour sept d’entre elles, parmi lesquelles La Mésangère (Liège) ou les bruxelloises Anne Autegarden et Bernard de Grunne, il s’agit d’un retour après une ou plusieurs années d’absence. Pour les six autres, c’est une première. En plus des galeries d’art contemporain citées plus haut, la galerie Jacques de la Béraudière, installée depuis mai 2016 à Bruxelles, désirait poursuivre son installation sur la scène belge. « Je souhaitais participer à la Brafa pour aller à la rencontre des collectionneurs belges et faire connaître ma galerie », explique Jacques de la Béraudière, qui expose Femme, oiseaux, 1976, de Miró (850 000 €) et Site aléatoire avec un personnage, 1982, de Dubuffet (420 000 €).
Autre nouvelle recrue, la Belgian Fine Comic Strip Gallery (Luxembourg), spécialisée dans la bande dessinée. Cette arrivée est une bonne nouvelle puisque, jusqu’alors, le 9e art était représenté seulement par la galerie Huberty & Breyne (Bruxelles). Pour l’occasion, Bernard Soetens et Olivier Van Houte rendent hommage à Hergé, « l’artiste le plus important du 9e art en Europe », selon leurs propres termes.
Toujours aussi éclectique, la foire bruxelloise couvre toutes les disciplines : archéologie, bijoux, peinture ancienne, sculpture, mobilier et objets d’art, design, céramiques, art d’Asie, arts premiers, art moderne et contemporain… Certains domaines sont cependant mieux représentés que d’autres. C’est le cas notamment de l’archéologie qui ne rassemble pas moins de neuf spécialistes, contre dix l’an passé, le marchand new-yorkais Alan Safani n’étant pas revenu. Pour cette édition, la Galerie Chenel (Paris) a choisi de collaborer avec Ultra Moderne (Paris). Dans un décor futuriste, les antiquités classiques – dont un Torse d’Hercule, travail romain (Ier-IIe siècle) — se confrontent au design des années 1970 et 1980. La galerie suisse Phoenix Ancient Art présente un casque en bronze, daté du Royaume d’Urartu (IXe-XVIIIe siècle av. J.-C.), issu de l’ancienne collection de l’homme d’affaires italien Giancarlo Ligabue ; J. Bagot (Barcelone) montre un cratère à décor de guerriers, art grec, vers 450 av. J.-C., attribué au peintre de Perséphone. Quant à la galerie David Ghezelbash (Paris), elle expose une Tête de pharaon, Égypte, période ptolémaïque (332-330 av. J.-C.) offerte dans les années 1950 par le roi Farouk au scénographe et costumier français Bernard Daydé.
Autre discipline bien représentée à la Brafa, l’art tribal, qui compte lui aussi 9 exposants, tout comme l’an passé, le départ de la galerie zürichoise Dierking étant compensé par le retour de Bernard de Grunne. Bernard Dulon (Paris) montre une figure d’ancêtre tutélaire, Indonésie, XIXe siècle ou antérieur, qui a appartenu au couturier Kenzo (autour de 300 000 €). « C’est un objet exceptionnel. Il n’en existe qu’une douzaine au monde », rapporte le marchand. Didier Claes (Bruxelles) dévoile quant à lui une Figure Hemba, République démocratique du Congo, provenant de l’ancienne collection Jacques Kerchache (850 000 €). Sont également partie prenante les galeries Monbrison (Bruxelles), Jacques Germain (Montréal) ou encore Yann Ferrandin (Paris).
Pissarro, Spillaert, Sérusier
D’autres œuvres sont à découvrir sur les stands, tous domaines confondus, comme un bureau de changeur d’époque Louis XIV en marqueterie d’étain, laiton et écaille de tortue, attribué à Pierre Gole (1620-1684) à la Galerie Berger (Beaune) ; une acrylique de 1973 de Sam Francis (300 000 €) chez Samuel Vanhoegaerden (Knokke) ; une Baigneuse de Dalou, en marbre, épreuve authentique taillée vers 1908 et signée par Becker, qui est le praticien de l’artiste pour le marbre (60 000 €). Ailleurs, une aquarelle Sans titre (Plantes), 2016, par Sam Szafran, est à voir à la Galerie Claude Bernard (Paris) ; Bords de l’Oise, environs de Pontoise, 1872, par Camille Pissarro (850 000 €), est exposée chez Stern Pissarro. Une Étude de grappes de raisins, vers 1670-1680, par Nicolas de Largillière est présentée chez Perrin (Paris) qui montre également Un sanglier forcé par des chiens de Desportes (1661-1743), quand la galerie Steinitz (Paris) expose une console en bois doré exécutée par la Société pour les Bâtiments du Roi, vers 1715. Élément Bleu XII, 1967, de Jean Dubuffet est affiché 1,8 million d’euros par Opera Gallery (Paris) ; Femme de pêcheur sur un ponton, 1909, un dessin de Léon Spilliaert, est proposé à 260 000 euros sur le stand de la Galerie Seghers (Ostende) et Les Tétraèdres, 1910, de Paul Sérusier, est accrochée sur les cimaises de La Patinoire royale (Bruxelles). Distincte du reste de l’œuvre de l’artiste, cette huile sur toile reflète ses inclinations pour certaines mythologies cosmogoniques (850 000 €).
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La Brafa s’ouvre à l’art contemporain
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Abonnez-vous dès 1 €Claudio Parmiggiani, Sans titre (1992), 19 x 28 x 25 cm - stand Meessen de Clercq - Photo courtesy Brafa 2017
Georges Remi alias Hergé, Portrait de Cuthbert Calculus (Professeur Tournesol), 1968, encre sur papier, 24,6 x 34,5 cm. Courtesy Belgian Fine Comic strips gallery, Bruxelles. © Hergé-Moulinsart 2017.
En savoir plus
Brafa, Brussels Art Fair, du 21 au 29 janvier, Tour & Taxis, Avenue du Port 86 C, Bruxelles, www.brafa.be, entrée 25 €
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°471 du 20 janvier 2017, avec le titre suivant : La Brafa s’ouvre à l’art contemporain