NEW YORK / ÉTATS-UNIS
La foire qui a été inaugurée mercredi dans un nouveau lieu enchante marchands et acheteurs, constate le correspondant du JdA.
« On sent une certaine excitation » confie David Maupin, cofondateur de la galerie Lehmann Maupin. L’inauguration ce mercredi de Frieze New York, première foire américaine à se tenir physiquement en quatorze mois, fait remonter les souvenirs joyeux du monde d’avant : celui des rencontres impromptues dans les allées, des retrouvailles autour d’un verre au bar et des discussions passionnées face aux œuvres.
Cette version 2021 est pourtant bien différente. Pas de grande tente blanche ni de pique-niques sur les pelouses de Randalls Island comme lors des éditions précédentes. Cette année, Frieze New York se tient à l’intérieur du Shed, centre culturel inauguré en 2019 dans le nouveau quartier d’Hudson Yards, et n’accueille que 64 exposants contre près de 200 il y a deux ans.
« C’est beaucoup plus intime », se réjouit un marchand, « les échanges sont plus faciles ». Grande nouveauté, il fallait acheter son billet et réserver son créneau très en avance pour compter parmi les visiteurs, puis présenter une preuve de vaccination ou un test Covid négatif pour pouvoir rentrer. On peut sinon se rabattre sur la salle d’exposition en ligne, qui présente 160 galeries internationales et donne à la manifestation une dimension hybride bienvenue.
Avec une jauge très réduite, l’atmosphère est agréablement calme. L’absence du public international habituel faisait peser certaines craintes mais de grands collectionneurs de Dallas, de Miami ou de Los Angeles ont fait le déplacement : « ce n’est pas que New York, c’est toute l’Amérique qui se retrouve ici » se réjouit Marc Payot, président de Hauser & Wirth.
De nombreux exposants le concèdent, la plupart des ventes ont été conclues en amont de la manifestation : « avec la pandémie, les gens se sont habitués à la preview » commente Valentine Blondel, Senior Director chez Perrotin. Les premières heures de la journée ont toutefois connu une certaine activité : parmi les transactions de la matinée, Blind Man’s Buff de Louise Bourgeois (1984) chez Hauser, vendue 1 million de dollars, et, chez Maupin, un grand paravent peint de Hernan Bas, intitulé The Suspect (2021), négocié entre 350 et 400 000 dollars.
De l’avis général, cette version réduite de Frieze est plutôt une réussite. Olivia Barrett, propriétaire de Château Shatto, galerie située à Los Angeles, trouve le format « rafraîchissant » : elle observe un « engagement accru » avec les œuvres de l’artiste londonienne Zeinab Saleh qu’elle présente sur son stand. Chez Goodman, où figurent notamment un grand collage (2020) et quatre statuettes en bronze (2020) de William Kentridge, Denis Gardarin est satisfait de la « bonne énergie » de cette première journée. Pour le galeriste Richard Taittinger, « on oublierait même qu’on est sur un lieu marchand » : la riche programmation de la manifestation, qui rend notamment hommage au Vision & Justice Project, un groupe de réflexion sur le rôle de l’art dans la lutte antiraciste, fait aussi passer un « message très positif ».
« Une esthétique de pandémie »
Les peintures forment l’écrasante majorité des œuvres présentées à Frieze cette année et parmi les plus récentes, l’abstraction semble connaître un regain d’énergie. Le consultant en stratégie culturelle András Szántó y décèle « une esthétique de pandémie » marquée par « l’absence d’humains, beaucoup de vide, une tendance à la rêverie et à l’onirisme ».
Parmi ces peintures abstraites, on compte quatre compositions de Bernard Frize présentées ensemble par Perrotin, dans un box dédié. Cet accrochage est « la marque d’un effort pour mettre un avant le travail d’un artiste français et l’introduire au public très américain de la foire », explique Valentine Blondel. Malgré la programmation d’ordinaire assez internationale de la galerie new-yorkaise, Perrotin affiche pour cette édition de Frieze un « stand assez français », avec en plus des quatre Frize un grand Soulages, une sculpture de Jean-Michel Othoniel et une œuvre de Sophie Calle. Ailleurs dans les allées, les Français sont bien représentés : Lisson présente trois pièces de Daniel Buren, One Piece in Three Parts (1968-76), montrées pour la première fois aux États-Unis. Marian Goodman a couvert les murs extérieurs de son stand de nouveaux dessins d’Annette Messager et présente à l’intérieur deux installations de l’artiste, dont Petite Babylone (2019).
Seuls paraissent manquer les NFT et les œuvres numériques, en dépit de leur grande actualité. La galerie Barro de Buenos Aires est l’une des rares à se saisir de ce sujet avec Don’t Trust. Verify d’Agustina Woodgate (2021), un distributeur de billets qui débite 100 dollars sur votre compte et vous délivre en échange un billet d’une valeur correspondante transformé par l’artiste. C’est l’attraction de cette édition 2021 de Frieze, innovante à tous égards.
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Frieze New York : les foires sont de retour
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